Question orale n° 972 :
Prolifération et dommages causés par le loup dans le département du Cantal

15e Législature

Question de : M. Jean-Yves Bony
Cantal (2e circonscription) - Les Républicains

M. Jean-Yves Bony appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, sur les conséquences des multiples attaques de loups ayant dernièrement causé, dans le département du Cantal, de nombreux dommages sur les troupeaux domestiques. Force est de constater que le loup s'installe dans plusieurs communes cantaliennes. La situation locale inquiète les éleveurs qui doivent faire face à une prédation toujours plus forte du fait d'un effectif de loups plus conséquent. L'État a élaboré plusieurs plans d'action visant à soutenir les éleveurs et ainsi autoriser le prélèvement de loups. Le dispositif actuel est fixé par l'arrêté expérimental du 26 juillet 2019 qui prévoit un certain nombre de mesures, notamment le relèvement du pourcentage de loups pouvant être tués, de 10 % -12 % à 17 %. Toutefois, le processus de régulation ne répond pas à l'augmentation du nombre de loups en France. Comment concilier les préoccupations des éleveurs au regard de la convention de Berne de 1979 qui fait du canis lapus une espèce protégée ? Aussi, il lui demande quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour faire valoir les spécificités des territoires dans le cadre du « plan loup » et ainsi mieux protéger les élevages du Cantal face aux attaques de ce prédateur.

Réponse en séance, et publiée le 12 février 2020

DOMMAGES CAUSÉS PAR LES LOUPS DANS LE CANTAL
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Bony, pour exposer sa question, n°  972, relative aux dommages causés par les loups dans le Cantal.

M. Jean-Yves Bony. L'Office français de la biodiversité annonce, dans un rapport publié le 27 janvier, que le loup s'est implanté dans cinq nouvelles zones dites de présence permanente. Voici un chiffre évocateur : dans quatre-vingt-dix-sept zones de présence permanente où les loups vivent de façon sédentarisée, on dénombre l'existence de quatre-vingts meutes. L'Office recensait 530 adultes en juin dernier, contre 430 un an plus tôt. Les derniers bilans font état d'une augmentation géographique de plus de 6 % entre 2018 et 2019. En 2019, 3 790 attaques de troupeaux ont eu lieu en France, soit 5,4 % de plus qu'en 2018. C'est le cas dans le Cantal où l'on a constaté de nombreux dommages sur les troupeaux.

La situation locale inquiète les éleveurs, des éleveurs désespérés, qui doivent faire face à une prédation toujours plus forte, mettant en péril la survie même des exploitations de montagne.

Il est vrai que l'État a élaboré plusieurs plans d'action visant à soutenir les éleveurs et ainsi à autoriser le prélèvement des loups, mais, malgré le dispositif actuel fixé par l'arrêté expérimental du 26 juillet 2019, qui prévoit plusieurs mesures, comme le relèvement du pourcentage de loups pouvant être tués, le processus de régularisation ne répond malheureusement pas au problème causé par l'augmentation du nombre de loups en France.

Quelles mesures envisagez-vous pour concilier les préoccupations des éleveurs au regard de la convention de Berne ? Ne pensez-vous pas que le déclassement d'espèce strictement protégée en espèce protégée apporterait une amélioration aux difficultés actuelles des éleveurs ?

D'autre part, l'État fixe chaque année un quota de loups à abattre. Pour 2020, le plafond est fixé à quatre-vingt-dix spécimens. Le plan loup prévoit également des aides à la protection des troupeaux, mais celles-ci ne sont pas suffisantes. Ne doit-on pas confirmer aux éleveurs un droit ordinaire de tir de légitime défense des troupeaux ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le député, vous avez interrogé Mme Borne. La ministre de la transition écologique et solidaire ne pouvant être présente, elle m'a chargée de vous répondre.

Le retour naturel du loup depuis l'Italie dans les années 1990 est un bon signe pour la biodiversité. Je suis néanmoins consciente de la difficulté que la prédation constitue pour les éleveurs et les bergers qui y sont confrontés. Alors que la tendance, au niveau national, est à la stabilisation du nombre de victimes, malgré la progression des attaques, une augmentation du nombre de victimes a été constatée dans le Cantal, en 2019 ; vous en faites état dans votre question.

La présence permanente du loup dans ce département ayant été reconnue en 2019, Mme la préfète du Cantal pourra prendre un arrêté, ouvrant aux éleveurs le bénéfice de l'aide au financement des mesures de protection dès 2020. Ce financement fait partie de la palette de mesures proposées depuis 2004 par les plans nationaux d'actions successifs visant à concilier présence du loup et maintien du pastoralisme.

Le plan adopté en 2018 offre de nouveaux moyens pour réduire la prédation, pour protéger les troupeaux et pour améliorer les pratiques en matière de tirs contre les loups. Pour permettre cette cohabitation complexe entre pastoralisme et grands prédateurs, nous devons adapter en permanence notre action. Le Gouvernement a donc pris en 2019 de nouvelles mesures. Tout d'abord, le plafond en matière de prélèvement des loups par tir a été relevé de 10 % à 17 % de la population. Je rappelle toutefois que les tirs contre des loups, espèce protégée, ne sont autorisés que pour réduire la prédation.

Le financement des mesures de protection a été révisé en novembre 2019 ; un nouveau dispositif d'indemnisation, instauré en juillet 2019, revalorise de plus de 14 % l'indemnisation des dommages dus au loup. Un conseil scientifique du plan national d'actions sur le loup a été installé en mars 2019, afin de conseiller et d'orienter l'action.

Le Gouvernement lancera en 2020 un observatoire des mesures de protection, pour que celles-ci soient mieux mises en œuvre et gagnent en efficacité ; les premières analyses porteront sur les élevages les plus attaqués. Le Gouvernement soutient ainsi la dynamique instaurée par le plan adopté en 2018, et reste engagé dans la recherche d'actions en faveur de la coexistence de l'élevage et des espèces protégées.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Bony.

M. Jean-Yves Bony. Merci, madame la secrétaire d'État, pour votre réponse. Il faut trouver rapidement des solutions plus efficaces. Les éleveurs sont désespérés ; ils sont soumis à un stress permanent, malgré les efforts consentis et les moyens de protection mobilisés – chiens, regroupements nocturnes et autres –, qui n'ont jamais permis d'abaisser le nombre annuel de victimes.

Le loup progresse dans toutes les régions. Il est faux de croire qu'il se cantonne à la montagne ; il peut vivre dans des milieux très variés, et sa présence est avérée dans des zones périurbaines. Nous ne nous opposons pas à la présence du loup – simplement, celle-ci ne doit pas nuire aux hommes et à leurs activités.

Données clés

Auteur : M. Jean-Yves Bony

Type de question : Question orale

Rubrique : Élevage

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès de la ministre)

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès de la ministre)

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 février 2020

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