Question au Gouvernement n° 983 :
importation d'huile de palme pour la production de carburant

15e Législature

Question de : M. Olivier Gaillard
Gard (5e circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 13 juin 2018


IMPORTATION D'HUILE DE PALME POUR LA PRODUCTION DE CARBURANT

M. le président. La parole est à M. Olivier Gaillard, pour le groupe La République en marche.

M. Olivier Gaillard. Madame la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, paradoxe, c'est le terme qui s'impose, au regard des blocus par la FNSEA et les JA – la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles et les Jeunes agriculteurs – des raffineries Total à la suite de la confirmation de l'importation d'huile de palme par ce groupe. On a, d'un côté, une production française de biocarburants à l'impact environnemental néfaste à cause de la déforestation, et, de l'autre, une législation française faisant le pari légitime d'une montée en gamme qualitative de la production.

Les agriculteurs français se conforment à des normes qui intègrent de plus en plus les enjeux environnementaux, comme l'engagement pris, au plus haut niveau de l’État, de sortir du glyphosate à l'horizon de trois ans. Cela va dans le bon sens, mais tout le monde ne converge pas vers les mêmes standards de production, qu'il s'agisse des États producteurs, des industriels de l'agroalimentaire, de la grande distribution ou des acteurs de l'énergie – l'utilisation du diméthoate en témoigne.

L'autorisation administrative officielle n'a pas permis d'encadrer les volumes importés d'huile de palme. Total peut ainsi pratiquer le greenwashing en commercialisant du biocarburant loin d'être bio, alors qu'il aurait pu contenir de l'huile de tournesol ou de colza, avec un meilleur impact écologique.

M. Thibault Bazin. Même un député de la majorité le dit !

M. Olivier Gaillard. Le Président Macron s'est engagé en faveur d'un plan protéine ambitieux, garant de la souveraineté alimentaire de notre pays. Cela suppose que les ambitions des filières françaises ne soient pas réduites à néant par des importations de ce type et par la nécessité d'importer des tourteaux génétiquement modifiés. Le problème ne se limite pas à l'huile de palme, loin de là : molécules interdites en France, hormones de croissance, farines animales dans l'alimentation s'ajoutent à une liste déjà trop longue.

C'est un message de compréhension et surtout de clarification, suivi d'une réaction concrète de l’État et de l'Union européenne, que les agriculteurs demandent. À défaut, il existe un risque de durcissement accru des rapports entre les parties prenantes. Pourriez-vous, madame la secrétaire d’État, expliciter comment, demain, pour reprendre les mots du ministre de l'agriculture, « Total pourra s'approvisionner de la meilleure manière auprès des producteurs français » ? Cela implique une obligation renforcée de prise en compte de l'impact écologique de l'approvisionnement. Plus largement, quelle est la stratégie du Gouvernement ? De quelle réponse européenne…

M. le président. Merci, mon cher collègue. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur Gaillard, le Gouvernement est bien entendu à l'écoute des différentes inquiétudes exprimées depuis quelques jours par les agriculteurs. Nous entendons ces inquiétudes, et c'est pourquoi Stéphane Travert est en train de recevoir les agriculteurs au ministère.

Vous le savez, c'est en 2015 que fut prise la décision de transformer le site de La Mède en bioraffinerie. Cette décision a été prise car il était nécessaire de sauver 450 emplois et parce qu'elle permettait – et permet encore – de s'éloigner de la production d'hydrocarbures. L'objectif que nous devons tous garder en mémoire était aussi et surtout de substituer une production française à des produits importés contenant de l'huile de palme. Car il est faux de dire que la consommation de 300 000 tonnes d'huile de palme à La Mède viendra en supplément de l'utilisation actuelle d'huile de palme dans le secteur des agrocarburants ; ce n'est pas la réalité. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Jean-Yves Bony. Et la déforestation ?

M. Christian Jacob. Vous devriez plutôt vous taire !

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État . Je ne suis pas favorable aux agrocarburants mais cette usine produit des huiles végétales hydrogénées, nécessaires pour atteindre le seuil de 7 % d'agrocarburants dans la production totale de carburant, objectif assigné aux producteurs français. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.) Or, actuellement, les HVO consommées en France, intégralement importées, sont produites à partir d'huile de palme. Nous entendons donc substituer des HVO produites en France à l'huile de palme importée : tel est l'objectif. (Mêmes mouvements.) Total, avec qui nous en avons discuté, devra d'ailleurs utiliser 50 000 tonnes d'huile de colza produites par l'agriculture française.

Parallèlement, une réponse européenne est nécessaire. Hier encore, j'ai rencontré les ministres européens de l'énergie pour pousser des mesures ambitieuses en la matière. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM. – Huées sur les bancs du groupe LR.)

Données clés

Auteur : M. Olivier Gaillard

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès du ministre d'État)

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès du ministre d'État)

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 juin 2018

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