15ème législature

Question N° 984
de M. Charles de Courson (UDI, Agir et Indépendants - Marne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès du ministre d'État)
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès du ministre d'État)

Rubrique > énergie et carburants

Titre > importation d'huile de palme pour la production de carburant

Question publiée au JO le : 13/06/2018
Réponse publiée au JO le : 13/06/2018 page : 5921

Texte de la question

Texte de la réponse

IMPORTATION D'HUILE DE PALME POUR LA PRODUCTION DE CARBURANT


M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe UDI, Agir et indépendants.

M. Charles de Courson. Monsieur le Premier ministre, l'autorisation donnée au groupe Total (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe LR), par un arrêté du 16 mai 2018 signé du représentant de l’État dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, d'importer quelque 300 000 tonnes d'huile de palme par an – sur les 450 000 tonnes d'huile végétale brute nécessaires au fonctionnement du site de La Mède – en provenance, pour l'essentiel, d'Indonésie et de Malaisie, afin d'alimenter la nouvelle usine de biodiesel, constitue, je cite, « la goutte d'huile qui fait déborder le vase » de la colère des agriculteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir et sur quelques bancs des groupes LR et NG.)

Pour éclairer les débats, monsieur le Premier ministre – car, dans votre réponse, vous n'avez pas donné les chiffres –, 300 000 tonnes, c'est trois fois plus que les 100 000 tonnes actuellement importées par le groupe Avril. Depuis de nombreuses années, en effet, la profession agricole a développé, dans le cadre d'une politique européenne, les deux filières de biocarburant – biodiesel et bioéthanol – avec pour objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Tout au long de ces années, nous avons toujours soutenu cette politique.

Alors même que le Parlement européen a récemment adopté une résolution visant à interdire l'utilisation d'huile de palme dans les biocarburants à partir de 2021, l'arrêté dont j'ai parlé est intervenu à contre-courant. Le démarrage de cette usine va casser la filière française du biodiesel et entraîner la fermeture d'une ou deux usines alimentées par du colza et du tournesol, produits majoritairement dans des zones intermédiaires, c'est-à-dire défavorisées du point de vue agronomique. La colère légitime des agriculteurs se traduit par des actions de blocage de treize raffineries et de dépôts pétroliers. Ils ne comprennent plus la politique agricole menée par le gouvernement actuel.

L'affaire de La Mède illustre les contresens d'une politique qui pénalise la vocation alimentaire mais aussi énergétique de la France. Alors que la Commission européenne envisage de réduire d'environ 10 %, en euros constants, les moyens de la PAC – la politique agricole commune – dans les six ans qui viennent, alors que les revenus de l'agriculture française se sont effondrés depuis trois ans, quelle politique le Gouvernement entend-il mettre en œuvre pour redresser les revenus des agriculteurs, notamment à travers des baisses de charges fiscales, sociales et réglementaires ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-Agir et LR.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. (Vives protestations sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe UDI-Agir. – Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.)

M. Fabien Di Filippo. Séance de rattrapage !

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Vous le savez, monsieur de Courson, le Gouvernement est attentif aux agriculteurs. Et, si je réponds à la place de Stéphane Travert, c'est parce qu'il est actuellement à leurs côtés. Je tiens à redire l'engagement clair du Gouvernement en faveur de la réduction de la part d'huile importée dans la production d'agrocarburants au cours des années à venir. Sur ce sujet encore, la réponse doit être européenne, mais la France est volontariste : nous ne restons pas assis les bras croisés.

Pour réussir, nous avons besoin de cette collaboration européenne. C'est pourquoi j'ai participé, hier encore, au Luxembourg, au conseil des ministres européens de l'énergie. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Aurélien Pradié. Donnez-lui des palmes pour qu'elle s'en sorte !

M. Fabien Di Filippo. Et un tuba !

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État . Il est extrêmement facile, messieurs, d'être confortablement assis sur vos bancs et de lancer des invectives pendant que la majorité, elle, agit et met en œuvre la transition écologique ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Christian Jacob. Au lieu de taper sur l'Europe, prenez vos responsabilités !

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État . Nous entendons donc trouver des solutions compatibles avec les règles du commerce mondial ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM. – Huées sur les bancs du groupe LR.)

Vous savez, mesdames, messieurs les députés de droite, je suis mère d'une petite fille de trois ans : sincèrement, vos réactions sont du même niveau que les siennes. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe LR.) C'est la réalité, vraiment ! Je doute, d'ailleurs, que vos électeurs soient très contents de vous voir vous comporter ainsi, désolée de vous le dire. Bref ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Sébastien Leclerc. Heureusement pour vous que les gens n'ont pas voté pour vous faire entrer au Gouvernement !

M. Christian Jacob. Incompétente !

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État . Il faut donc que cesse l'augmentation régulière de la production des agrocarburants à fort impact sur l'affectation des terres. Nous voulons aussi réviser ce plafond et doter l'Union européenne d'une véritable stratégie de lutte contre la déforestation importée. Nous avons donc demandé à la Commission européenne de prendre ses responsabilités d'ici à 2020. La France, dans ce domaine, joue un rôle particulièrement moteur, et je me suis battue pour cela hier. (Exclamations ininterrompues sur les bancs du groupe LR.)

Si nous soutenons la production d'énergies renouvelables, avec l'objectif d'en porter la proportion à 32 %, une part importante doit être assumée par le secteur des transports. Mais cela ne doit pas être fait n'importe comment : il faut impérativement réduire l'utilisation d'huile de palme et de tout autre agrocarburant susceptible d'avoir un impact négatif sur la biodiversité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM. – Huées sur les bancs du groupe LR.)