• Le Projet de loi relatif à la souveraineté en matière agricole et renouvellement des générations en agriculture, présenté, après plusieurs reports depuis 2022, le 3 avril 2024, en Conseil des ministres, est arrivé sur les bancs de l’Assemblée nationale à compter du 15 mai. Ce texte, modifié suite aux mouvements agricoles de début janvier, est complété ainsi par le titre IV intitulé « Sécuriser, simplifier et libérer l’exercice des activités agricoles ». Celui-ci est cependant très loin de satisfaire le monde agricole, qui a largement fait savoir le manque d’ambition de ce texte faisant abstraction du foncier, de la rémunération et du changement climatique, pourtant enjeux majeurs de l’attractivité des métiers agricoles.

    Très sensible au monde agricole de ma circonscription et au-delà, j’ai posé des questions d’actualité au Gouvernement à de multiples reprises, avant même le début de la crise agricole, sur les souffrances de nos agriculteurs afin de relayer et de faire entendre leur voix et d’interroger l’exécutif sur les mesures urgentes et précises à mettre en place, et ce sur tous les plans des revendications agricoles.

    Le choix du Gouvernement est de soumettre aux parlementaires un texte à visée programmatique et largement réglementaire, comme en atteste la création d’une licence agricole : sa valeur juridique réelle est remise en cause, et ce à juste titre. Malgré l’adoption en commission des Affaires économiques, confirmée par le début de l’examen en séance publique de nombreux amendements transpartisans visant à peaufiner la définition de la souveraineté agricole et plus spécifiquement la portée de l’agriculture en tant qu’ » intérêt général majeur de la nation française » et ses objectifs, aucune garantie législative ni aucune déclinaison budgétaire ne permette le respect de ses avancées certes bienvenues, mais limitées. On reste dans un débat sémantique !

    Pourtant la volonté de nos agriculteurs est bien connue, et ce de longue date : une vraie rémunération et de la reconnaissance et du respect, moins de charges et de normes, justes échanges, réciprocité des normes, exonération de charges sur la main-d’œuvre, choc de simplification, amélioration des retraites agricoles et lutte contre la prédation du loup et j’en passe.  

    Afin de combler les lacunes évidentes de cette initiative gouvernementale, l’exécutif a récemment confié une nouvelle mission temporaire pour une énième Loi EGALIM aux députés de la majorité, un aveu direct de l’échec de la mise en œuvre des trois précédentes lois. De surcroît, plusieurs représentants du secteur demandent un calendrier législatif vis-à-vis des sujets agricoles ainsi qu’une transparence quant au contenu des futures lois plus complètes. Il est à noter que le prochain texte pourrait être présenté avant la suspension estivale de notre institution. Il est regrettable qu’un seul texte ne puisse traiter l’ensemble des sujets agricoles afin d’offrir une solution directe et immédiate à nos agriculteurs.    

    Au-delà de ces interrogations de fonds, j’ai proposé par voie d’amendements et en étroite collaboration avec mon groupe parlementaire, l’ouverture de la liste des espèces autorisées à pâturage afin de faire profiter l’ensemble des animaux des sous-bois présents par département ; la simplification de la procédure et du cadre d’intervention des lieutenants de louveterie et la généralisation des brigades loups afin de mieux lutter contre la prédation des loups, en hausse dans nombreux de nos départements et l’élargissement de l’accès au foncier non seulement pour les éleveurs, mais également pour les exploitants agricoles, tels que les castanéiculteurs largement présents en Lozère. Bon nombre des amendements ont été déclarés irrecevables, ce qui dénote une méfiance vis-à-vis du travail parlementaire.

    Dans un contexte marqué par la crise agricole, je resterai attentif aux débats en cours, et aux propositions qui y seront retenues, largement suivis également par les représentants principaux du secteur. Je voterai en connaissance de cause le 28 mai prochain pour ou contre une loi très largement en deçà des attentes du monde agricole.

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  • L’article 1er du présent projet de loi attribue à la pêche et de l’aquaculture, comme à l’agriculture de manière générale, un intérêt général majeur « en tant qu’elles garantissent la souveraineté alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux ».
    Cette évolution permet de mettre en lumière l’importance de la pisciculture dans notre économie, et plus particulièrement de nos étangs.
    En effet, les étangs de France représentent une ressource inestimable tant sur le plan écologique qu'économique. Avec 120 000 étangs et 60 000 gestionnaires, notre pays dispose du plus grand potentiel européen en termes de superficie d’étangs, mais paradoxalement, il ne se classe qu’au septième rang des producteurs. Aujourd’hui, la production annuelle est tombée à 3 000 tonnes, contre 12 000 tonnes il y a dix ans, ce qui révèle une décroissance alarmante. Face à cette situation, il est urgent de promouvoir les étangs et leurs usages tout en défendant leurs gestionnaires.
    En effet, les étangs jouent un rôle crucial dans la production alimentaire (brochet, tanche, perche, sandre, truite, carpe, etc.). En étant non délocalisables tout au long de leur chaîne de valeur, ils concourent à une véritable souveraineté alimentaire dans un contexte où la France est devenue importatrice de nombreuses denrées. Renforcer cette production locale pourrait réduire notre dépendance vis-à-vis des importations et stabiliser l’approvisionnement en produits piscicoles.
    Par ailleurs, sur le plan environnemental, les étangs soutiennent une biodiversité remarquable et spécifique : ils sont à la fois indispensables au maintien des zones humides adjacentes, qui sont essentielles en période de sécheresse, et jouent également un rôle épurateur crucial en filtrant de nombreuses molécules polluantes. Ils contribuent également à la régulation hydrologique en offrant de l’eau pour l’abreuvement, en régulant les inondations annuelles et en soutenant les niveaux d’étiage. Les étangs permettent aussi de gérer les précipitations soudaines et massives de plus en plus fréquentes, et servent de réserves pour l’irrigation agricole.
    Enfin, les étangs représentent un atout touristique majeur en attirant les amateurs de pêche de loisirs et en offrant des paysages pittoresques qui enrichissent notre patrimoine culturel. Les étangs communaux jouent un rôle social important, renforçant les liens au sein des communautés locales. Le classement de certains étangs en tant que patrimoine naturel sous des labels tels que Ramsar, CEN, ou Réserve Naturelle, témoigne de leur valeur inestimable.
    En dépit de toute leur importance, force est de constater que les étangs sont malheureusement souvent mal compris et injustement critiqués pour leur consommation d’eau. L’évaporation naturelle, souvent pointée du doigt, est une nécessité écologique qui maintient l’humidité bénéfique pour de nombreuses espèces précieuses comme les microorganismes et les batraciens. Les politiques actuelles, telles que les arasements subventionnés, ne résolvent pas les problèmes écologiques mais les déplacent, souvent au détriment d’écosystèmes délicats.
    Aussi, au-delà des dispositions législatives du projet de loi, des actions politiques, et notamment fiscales, sont nécessaires pour soutenir ces écosystèmes fragiles, car les impôts fonciers basés sur un revenu cadastral théorique pénalisent sévèrement la pisciculture extensive en étangs. Il est également indispensable de repenser notre approche de la protection des espèces. Le classement européen des espèces protégées doit intégrer une régulation pragmatique qui tienne compte des dynamiques éthologiques et écologiques. Actuellement, la pisciculture en étangs contribue à nourrir des espèces protégées et offre des aménités environnementales profitant à toute la société, sans recevoir de compensations équitables.
    En définitive, les étangs de France doivent être reconnus et valorisés pour leurs multiples bénéfices. À l’heure où une agriculture plus verte et durable est nécessaire, la pisciculture en étangs offre une solution écologique et économique viable. Défendre et promouvoir ces écosystèmes est non seulement un impératif écologique, mais aussi une nécessité pour garantir notre souveraineté alimentaire et préserver notre patrimoine naturel et culturel.

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