• M. Pierre Morel-À-L'Huissier
    Date : mercredi 22 mai 2024
    Cible : Sur l'ensemble du texte

    Le Projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, présenté, après plusieurs reports, le 10 avril 2024, en Conseil des ministres, arrive sur les bancs de l’Assemblée nationale à compter du 27 mai. Composé de deux parties – le renforcement des soins palliatifs, nouvellement dits d’accompagnement et la mise en place de l’aide active à mourir – ce texte reflète une évolution de l’opinion publique tant nationale qu’internationale et européenne. En effet, plusieurs pays européens, dont la Belgique et l’Espagne, ont déjà légalisé une forme d’euthanasie active, tandis que la France a vu émerger des conclusions favorables à la mise en place de l’accompagnement de la fin de vie, sous conditions, issues de la Convention citoyenne du 2 avril 2023.

    Ces éléments constituent un terreau fertile à l’introduction de l’accompagnement de la fin de vie, en France, dans un cadre légal bien circonscrit. Adossée au renforcement de l’organisation des soins palliatifs, ce texte s’inscrit dans la continuité de la stratégie décennale, mettant sur la table jusqu’à 1,1 milliard d’euros supplémentaire par an au bénéfice du développement des soins palliatifs. Toutefois, aujourd’hui, il est évident que c’est l’hypocrisie qui règne encore : l’accompagnement en fin de vie est privilégié à l’accompagnement pendant la vie. Bien que nécessaire, le texte ne remplace aucunement un projet de loi de programmation Grand âge, désormais écarté, qui aurait pu s'inscrire dans une approche globale de l'accompagnement des personnes en fin de vie adossée à une visibilité budgétaire plus large.

    Dans un contexte de crise hospitalière marqué par l’insolvabilité financière de plus de 85% de nos structures d’accompagnements (notamment nos EHPAD), je regrette la création envisagée d’une énième structure d’accompagnement (dite « maison d’accompagnement »), il serait bien plus pertinent de développer et de généraliser nos infrastructures déjà existantes, comme les résidences autonomie, partout sur notre territoire national. Afin de pallier ces problèmes notamment budgétaires, dus notamment à l’inflation, à la hausse moyenne des charges et la perte de confiance des familles suite à l’affaire Orpea entre autres, il serait judicieux de réfléchir à une réforme structurelle des unités d’accompagnement existantes (et leur enracinement dans chacun des départements) et au déblocage de fonds d’urgence à hauteur d’au moins 1,4 milliard d’euros, selon les estimations récentes des représentants principaux du secteur, afin de renforcer leur capacité à répondre aux besoins des patients et notamment en fin de vie.

    Au-delà de ces interrogations de fonds, j’ai proposé par voie d’amendements la mise en place d'un module d'enseignement sur les soins palliatifs lors des études de médecine, la garantie de l’égalité d’accès aux soins palliatifs pour tous, partout sur le territoire national, le juste encadrement des conditions d’accès à l’aide active à mourir, notamment avec la prise en considération des maladies incurables, comme la maladie de Charcot qui n’engage qu’à long terme le pronostic vital et l’ouverture d’un recours possible à un médiateur afin d’éviter toute éventuelle tension pouvant émerger au sein de la famille ou des proches de la personne souhaitant accéder à ce dispositif.

    Sensible à une évolution de l’état de droit actuel afin d’ouvrir la voie à l’introduction de l’aide active à mourir, je resterai attentif aux débats prochains et aux propositions qui y seront retenues et voterai en connaissance de cause le 11 juin prochain. Il est cependant important de souligner qu’il est nécessaire de continuer à travailler sur des solutions pérennes, en mettant l'accent sur le développement du traitement et l’écoute de la personne sur l’échelle de la douleur par le biais des soins palliatifs.

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