Situation d'urgence dans l'école publique en Seine-Saint-Denis
Question de :
M. Alexis Corbière
Seine-Saint-Denis (7e circonscription) - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale
M. Alexis Corbière alerte M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la question du délitement de l'école publique, du manque de moyens matériels ainsi que du manque d'enseignants dans le département de la Seine-Saint-Denis. Le 1er septembre 2022, 12,2 millions d'élèves, de la maternelle aux formations post-baccalauréat dispensées en milieu scolaire, reprendront le chemin de l'école ainsi que près de 900 000 professeurs, en charge des enseignements. Or il s'avère que l'école publique en Seine-Saint-Denis se trouve aujourd'hui dans une situation de grande urgence. Alors que c'est le département le plus pauvre de la métropole et le plus fortement marqué par les inégalités, il souffre pourtant d'une pénurie de moyens et d'une sous-dotation chronique. Le rapport d'information « sur l'évaluation de l'action de l'État dans l'exercice de ses missions régaliennes en Seine-Saint-Denis », réalisé lors de la précédente mandature, résumait cette situation, indiquant que « le moins bien doté des établissements parisiens est mieux doté que le plus doté des établissements de la Seine-Saint-Denis ». Un établissement du département sur six est classé REP ou REP+. Les contractuels y représentent 15,3 % des personnels contre 5 % à Neuilly ou Boulogne. Les élèves y perdent l'équivalent d'une année sur l'ensemble de leur scolarité, faute de professeurs. Toutefois, cette situation ne semble pas s'améliorer à la rentrée prochaine, bien au contraire. Dans l'académie de Créteil, au concours externe des professeurs des écoles, on compte seulement 419 admis pour 1 079 postes. Cela revient à n'avoir que 39 % des postes remplis, soit deux fois moins qu'en 2021. Enfin, même si grâce au concours exceptionnel de l'académie de Créteil (500 postes offerts) tous les postes venaient à être pourvus, cela ne parviendrait même pas à compenser le manque d'enseignants. Dans un courrier adressé aux enseignants et daté du 27 juin 2022, M. le ministre définit comme premier axe fort de sa politique future « la lutte contre les inégalités sociales » et estime que la promesse d'une égalité de traitement entre tous les élèves est « une promesse non tenue et qui fait de l'ombre à nos actes ». Le dernier axe mis en avant dans cette même lettre est celui de la « revalorisation du métier d'enseignant », car « rien ne se fera sans les professeurs ». Il lui demande donc comment le Gouvernement compte agir en ce sens et quelles sont les mesures concrètes prévues afin d'améliorer le fonctionnement de l'école publique, gratuite et républicaine, pour les élèves, pour leurs familles ainsi que pour les personnels des établissements.
Réponse publiée le 24 janvier 2023
Le budget pour 2023 du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse reste le premier budget de l'État avec 59,7 milliards € (hors contributions aux pensions de l'État). Sur le seul périmètre de l'enseignement scolaire, le budget est de 58,8 milliards €, soit une augmentation historique de 6,5 % depuis la loi de finances initiale pour 2022 (+ 3,6 Md€). Cette hausse s'ajoute aux augmentations régulières de ces dernières années (progression de + 21 % entre 2017 et 2023, contre + 11 % entre 2012 et 2017). Au sein de ce budget, une enveloppe de 1 135 M€ (environ 2 Mds€ en année pleine) est destinée à revaloriser les agents du ministère, pour leur pleine reconnaissance et au bénéfice de l'amélioration du système éducatif. Cette revalorisation, qui interviendra à compter de septembre 2023, comportera deux axes : une part inconditionnelle et une part conditionnelle qui doit permettre de mieux reconnaître l'engagement des professeurs et d'enclencher une dynamique de transformation de l'École au bénéfice de la réussite des élèves. S'agissant de la revalorisation inconditionnelle, l'ambition poursuivie est de revaloriser l'ensemble des professeurs, tout en renforçant l'attractivité du métier en assurant une rémunération des néo-titulaires de 2 000 € nets et une redynamisation de la progression de carrière. Concernant plus particulièrement la Seine-Saint-Denis dans le premier degré, alors que le département a perdu 1,3 % de ses élèves sur la période 2016-2021 (soit 2 453 élèves en moins), il est attendu une baisse de 4,2 % sur les 3 prochaines années, soit environ 8 000 élèves en moins, dont – 3 011 dès la rentrée de septembre 2022. Pour autant sur la même période, plus de 1 900 emplois en moyens d'enseignement ont été attribués dans le département : 504 équivalents temps plein (ETP) en 2016, 500 ETP en 2017, 469 en 2018, 284 en 2019, 113 en 2020 et 103 en 2021. Par conséquent, avec l'attribution de ces moyens supplémentaires, les taux d'encadrement, nombre d'élèves par classe (E/C) et nombre de postes d'enseignant pour cent élèves (P/E) n'ont cessé de s'améliorer. Ainsi, le P/E – qui était à la rentrée 2016 de 5,51 en Seine-Saint-Denis et 5,27 dans l'académie de Créteil pour une moyenne nationale de 5,36 – a augmenté à la rentrée 2021 pour atteindre 6,43 en Seine-Saint-Denis, 5,89 dans l'académie de Créteil pour une moyenne nationale de 5,84. Avec l'attribution de 73 emplois supplémentaires à la rentrée 2022 et une diminution prévue de 3 011 élèves, le taux d'encadrement départemental devrait encore s'améliorer, passant à 6,56 postes pour 100 élèves, contre 6,06 dans l'académie de Créteil et 5,94 en moyenne nationale. Par ailleurs, le E/C qui était à la rentrée 2016 de 23,58 en Seine-Saint-Denis et de 24,13 dans l'académie de Créteil pour une moyenne nationale de 23,56, est passé à la rentrée 2021 à 20,43 en Seine Saint-Denis et 21,95 dans l'académie de Créteil pour une moyenne nationale de 21,86. C'est en REP/REP+ que ce taux a davantage progressé entre 2016 et 2021, passant de 22,9 à 18,1 en Seine-Saint-Denis, de 23 à 18,3 dans l'académie de Créteil et de 22,8 à 18 en moyenne au niveau national. Ces taux d'encadrement traduisent notamment les efforts de dédoublement dans les classes de grande section de maternelle, CP et CE1 dans l'éducation prioritaire. Hors éducation prioritaire, le nombre d'élèves par classe a également diminué entre 2016 et 2021 : il est passé de 25 à 24,2 en Seine-Saint-Denis, de 25,1 à 24,4 dans l'académie de Créteil, et de 24,1 à 23,1 en moyenne au niveau national. Les priorités académiques pour cette rentrée 2022 ont porté sur la poursuite de la mesure de dédoublement des grandes sections de maternelle en éducation prioritaire, l'amélioration des décharges de direction, l'ouverture de dispositifs permettant la scolarisation d'élèves à besoins éducatifs particuliers : unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) dans les écoles, instituts médico-éducatifs (IME), unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants (UPE2A), ainsi qu'à l'accompagnement du futur projet de territoire numérique éducatif. À cette fin, le département de Seine-Saint-Denis comme les autres départements de l'académie de Créteil, ont anticipé leurs recrutements d'agents contractuels : des cellules académiques et départementales ont été mises en place afin de garantir que chaque élève ait eu un enseignant en classe dès la rentrée. Du point de vue des ressources humaines, le ministère applique la mesure interministérielle de fidélisation en Seine-Saint-Denis et prévoit la création d'un concours exceptionnel de titularisation des enseignants contractuels qui concernera notamment l'académie de Créteil.
Auteur : M. Alexis Corbière
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : Éducation nationale et jeunesse
Ministère répondant : Éducation nationale et jeunesse
Dates :
Question publiée le 12 juillet 2022
Réponse publiée le 24 janvier 2023