Question au Gouvernement n° 1935 :
Projet de loi d’orientation agricole

16e Législature

Question de : M. Jean-Pierre Vigier
Haute-Loire (2e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 6 juin 2024


PROJET DE LOI D'ORIENTATION AGRICOLE

Mme la présidente . La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.

M. Jean-Pierre Vigier . Que de temps perdu depuis les premières annonces d'un grand projet de loi d'orientation agricole ! Que de temps perdu, à proposer des mesures essentiellement techniques, qui ne répondent pas aux principales revendications de la profession agricole.

Depuis trop d'années, l'État rend la vie impossible à celles et ceux qui ne comptent pas leurs heures pour nous nourrir et entretenir nos paysages.

Alors que le projet de loi d'orientation agricole a été adopté sans enthousiasme par notre assemblée, force est de constater qu'il ne débarrassera pas nos agriculteurs des normes et des contraintes qui les empêchent de faire leur métier.

Nous attendions un cap clair et ambitieux ; vous nous avez proposé un texte qui n'apporte aucune perspective s'agissant du revenu, de la fiscalité, du foncier, de la compétitivité ou des surtranspositions. Votre projet de loi se paie de mots, sans apporter, je le répète, de réponse satisfaisante à la crise agricole.

À quatre jours d'un scrutin européen décisif, je salue les résultats obtenus et l'engagement des députés européens Républicains en faveur de la cause agricole et de notre ruralité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Sans mesures fortes – augmentation des crédits de la PAC, clauses miroirs dans les accords de libre-échange –, la souveraineté alimentaire ne restera qu'un vœu pieux. Quand comptez-vous réagir pour redonner, enfin, de la valeur au socle nourricier de la nation ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)

Mme la présidente . La parole est à M. le Premier ministre.

M. Francis Dubois . Allez, parlez-nous d'agriculture !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Dès ma nomination à Matignon, je l'ai rappelé : l'agriculture est au-dessus de tout et doit toujours être regardée comme telle.

Mme Isabelle Périgault . Très bien !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Pourquoi ? Parce qu'elle nous nourrit ; parce que c'est notre souveraineté et parce que l'agriculture est l'âme de la France ; ce sont des savoir-faire.

M. Francis Dubois . L'excellence !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . C'est notre identité ; ce sont nos terroirs et nos spécialités.

J'ai été nommé au moment où un mouvement de colère des agriculteurs avait émergé dans l'Europe entière. J'ai passé du temps avec les agriculteurs sur le terrain, et avec leurs représentants.

Il y a beaucoup à faire pour améliorer leur quotidien, simplifier certaines règles et sortir de situations kafkaïennes ou d'injonctions paradoxales. Ainsi, quand une loi oblige au débroussaillage pour des raisons de lutte contre les feux de forêt, une autre le leur interdit pour protéger la biodiversité !

M. Francis Dubois . Très juste !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Quatorze textes différents réglementent les haies !

Mme Isabelle Périgault . Oui, les haies !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . La météo des dernières semaines nous a rappelé combien les pluies sont importantes pour l'agriculture. Pourtant, alors que la sécheresse est toujours un risque, les agriculteurs ne peuvent stocker l'eau.

M. Pierre-Henri Dumont . Il faut construire des bassines !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Les enjeux sont également importants en termes de revenus. De tout cela, je suis conscient. C'est pourquoi nous avons pris soixante-cinq engagements avec les agriculteurs, qui sont traduits dans différents textes, dont le projet de loi d'orientation agricole. Mais d'autres vont suivre.

Mme Isabelle Périgault . Très bien !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Ils traiteront du revenu, pour faire suite à la mission confiée à Anne-Laure Babault et Alexis Izard.

Mme Isabelle Périgault . Attention !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Ils traiteront également des règles phytosanitaires puisque nous nous sommes engagés à supprimer l'obligation de conseil stratégique pour l'usage de produits phytosanitaires dès l'été.

Mme Isabelle Périgault . Ah !

M. Grégoire de Fournas . Ça ira alors, tout changera !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Des mesures en faveur de la compétitivité et de la fiscalité seront présentées dans les textes financiers. Le projet de loi d'orientation agricole n'est donc qu'une première étape ; une série de textes très importants le complétera très bientôt.

M. Francis Dubois . Mais quel est le calendrier ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre . N'oublions pas non plus le travail réglementaire. Un exemple – puisque l'un d'entre vous a évoqué les retenues d'eau : j'ai assumé de modifier l'article 4 de l'arrêté du 9 juin 2021 fixant les prescriptions techniques générales applicables aux plans d’eau afin de faciliter la création de retenues d'eau sur dérogation, notamment en zone humide, et permettre à nos agriculteurs de faire leur travail.

Le projet de loi d'orientation agricole est important, et ce n'est pas moi qui le dis. Les principaux syndicats agricoles – FNSEA, Jeunes Agriculteurs – plaident pour son adoption. Or ils sont souvent « vocaux » et, s'ils considéraient que le texte n'était pas utile, ils ne l'auraient pas soutenu.

Mme Isabelle Périgault . C'est pour cela qu'on l'a voté !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Je salue l'esprit de responsabilité du groupe LR. (Mmes Isabelle Périgault et Justine Gruet applaudissent.)

Plusieurs députés du groupe LR . Merci !

M. Pierre Cordier . Pour une fois qu'on nous fait un compliment !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Comme la majorité, votre groupe a beaucoup travaillé sur le texte et quatre-vingt de vos amendements ont été adoptés. Beaucoup d'entre vous l'ont voté, d'autres se sont abstenus – je crois que c'est votre cas, monsieur Jean-Pierre Vigier.

À l'inverse, la NUPES et le Rassemblement national ont voté contre. (Protestations sur les bancs du groupe RN.)

M. Kévin Pfeffer . Il n'y a rien dedans !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Il y a quelques jours, je discutais avec un agriculteur qui estimait que ce projet de loi comprend d'importantes mesures sur la simplification des sanctions ou le classement de l'agriculture comme activité d'intérêt général majeur. (Protestations sur les bancs du groupe RN.)

Mme Julie Lechanteux . Mensonges !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Vous criez parce que cela vous énerve et vous met mal à l'aise. Quand j'ai appris à cet agriculteur que le Rassemblement national avait voté contre le texte, il ne m'a pas cru. C'est votre méthode pourtant : dans l'hémicycle, vous votez contre et, dehors, vous ne dites rien, vous cachez, vous n'en parlez pas.

Plusieurs députés du groupe RE . Eh oui !

M. Rémy Rebeyrotte . Vous jouez double jeu !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Vous jouez sur l'ambiguïté et vous faites croire aux agriculteurs que vous êtes là pour les aider. (M. Yoann Gillet proteste.)

Vous procédez de la même façon sur les questions relatives au travail. Vous faites le tour de vos circonscriptions, en allant voir les patrons de PME, les commerçants, les artisans qui cherchent à recruter. Devant eux, vous estimez qu'il faut durcir les règles mais, une fois dans l'hémicycle, vous votez contre le conditionnement du versement du RSA à des heures d'activités, ou vous vous opposez à la réforme de l'assurance chômage. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

M. Rémy Rebeyrotte . Comme pour les soins palliatifs !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Bas les masques ! Bas les masques !

Monsieur Jean-Pierre Vigier, nous continuerons à agir pour nos agriculteurs, et le projet de loi d'orientation agricole n'écrase pas le reste du travail qui doit encore être mené pour eux. Nous continuerons à avancer avec celles et ceux qui ont l'intérêt du pays et de nos agriculteurs chevillé au corps ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – M. Jean-Luc Bourgeaux applaudit également.)

Mme la présidente . La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.

M. Jean-Pierre Vigier . Monsieur le Premier ministre, revenons à l'agriculture et aidons nos agriculteurs. Ce sont les premiers écologistes de France ;…

Mme Isabelle Périgault et Mme Justine Gruet . Oui ! Bravo !

M. Jean-Pierre Vigier . …ils veulent tout simplement vivre de leur travail. Il faut leur simplifier la vie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Vigier

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 juin 2024

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