Question écrite n° 115 :
Absence d'indemnisation pour les victimes indirectes des essais nucléaires

17e Législature

Question de : M. Daniel Grenon
Yonne (1re circonscription) - Non inscrit

M. Daniel Grenon appelle l'attention de M. le ministre des armées et des anciens combattants sur l'absence de mesures d'indemnisation pour les victimes par ricochet des essais nucléaires. La loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 permet aux individus atteints de maladies causées par les radiations ionisantes issues des essais nucléaires français, dont les affections sont répertoriées dans une liste établie par un décret en Conseil d'État, de bénéficier d'une compensation complète pour leurs préjudices. Cette possibilité de réclamation s'étend aux héritiers dans le cas où la victime est décédée. Néanmoins, un obstacle majeur demeure : la difficulté à reconnaître officiellement et à indemniser les victimes indirectes. La complexité réside dans la nécessité de prouver une relation directe et indubitable entre une exposition à un cancérigène et le développement d'un cancer, d'autant plus que ces maladies peuvent avoir plusieurs causes. Les démarches administratives requises pour les proches des défunts sont extrêmement longues et ardues. Par ailleurs, il n'existe actuellement aucun dispositif permettant de reconnaître le préjudice moral et financier subi par ces victimes par ricochet. Pourtant, bien souvent, les conjoints ou des membres de la famille des victimes des essais nucléaires sont obligés de cesser leurs activités professionnelles pour s'occuper à plein temps de ces derniers, quand ils ne meurent pas prématurément du fait des cancers causés par l'exposition aux radiations. Les procédures intentées par ces victimes indirectes devant les tribunaux administratifs pour faire reconnaître le préjudice moral et financier sont longues et infructueuses. Pour toutes ces raisons, il lui demande si des mesures sont envisagées afin de reconnaître les préjudices moral et financier subis par les victimes « par ricochet » des essais nucléaires.

Réponse publiée le 11 novembre 2025

L'article 1er de la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français dispose que « I. Toute personne souffrant d'une maladie radio-induite résultant d'une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français et inscrite sur une liste fixée par décret en Conseil d'État conformément aux travaux reconnus par la communauté scientifique internationale peut obtenir réparation intégrale de son préjudice dans les conditions prévues par la présente loi. II. Si la personne est décédée, la demande de réparation peut être présentée par ses ayants droit (…) ». Les ayants droit peuvent ainsi demander l'indemnisation du préjudice subi par les victimes directes des essais nucléaires, quand celles-ci sont décédées, dans les conditions particulières prévues par la loi susmentionnée, auprès du comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN). Les proches de la victime directe ayant été exposée à des rayonnements ionisants ne peuvent pas mobiliser ce dispositif en vue d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices propres ou « par ricochet » (préjudice d'affection, préjudice d'accompagnement, préjudice économique). Il leur est néanmoins possible de solliciter une réparation selon les règles de droit commun, comme l'a jugé la cour administrative d'appel de Paris par un arrêt du 30 décembre 2021, à condition de démontrer l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre la pathologie ayant entraîné le décès de la victime et son exposition aux essais nucléaires. En outre, dans l'hypothèse où la personne décédée était militaire et avait été exposée à raison de ses fonctions, ses ayants droit peuvent demander une réparation au titre de la jurisprudence « Brugnot » (Conseil d'État, 1er juillet 2005, n° 258208), comme l'a jugé la cour administrative de Douai par un arrêt du 12 mai 2021.

Données clés

Auteur : M. Daniel Grenon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Aide aux victimes

Ministère interrogé : Armées et anciens combattants

Ministère répondant : Armées et anciens combattants

Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 11 novembre 2025

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