Question écrite n° 1994 :
Expositions toxiques auxquels sont soumis les sapeurs-pompiers

17e Législature

Question de : M. Paul Christophle
Drôme (1re circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Paul Christophle attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les expositions toxiques auxquelles sont soumis les sapeurs-pompiers. Dans le cadre de leurs interventions, ils inhalent de nombreuses fumées toxiques dégagées lors des incendies de produits de combustion (les hydrocarbures, les particules) et de produits chimiques (comme les retardateurs de flamme ajoutés dans de nombreux objets du quotidien). À ce jour, un seul cancer est automatiquement reconnu en France comme maladie professionnelle : le cancer du nasopharynx, contre 12 en Australie, 19 au Canada et 30 aux États-Unis d'Amérique. Or en 2022, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), a évalué l'exposition professionnelle du sapeur-pompier comme « cancérogène pour l'homme », reconnaissant des preuves suffisantes pour le mésothéliome et le cancer de la vessie ; et limitées notamment pour les cancers de la plèvre, du côlon, de la prostate, des testicules, le mélanome et le lymphome. D'après une récente étude, 4 % des sapeurs-pompiers seraient victimes de cancers dus à des polluants. Par conséquent, il demande au Gouvernement quelles mesures sont prévues pour améliorer la reconnaissance des risques liés aux fumées d'incendie, afin d'élargir, à terme, la liste des cancers reconnus comme maladie professionnelle pour les sapeurs-pompiers et de permettre que ces maladies professionnelles puissent également s'appliquer aux sapeurs-pompiers volontaires, soumis aux mêmes risques que les professionnels.

Réponse publiée le 3 juin 2025

La prise en charge des risques liés à la toxicité des résidus d'incendie et à la pollution par les particules fines constitue une problématique majeure de protection de la santé des sapeurs-pompiers clairement identifiée par le Gouvernement. Depuis plusieurs années et notamment à la suite de la publication en 2017 d'un rapport de la CNRACL relative à la prévention des risques induits par les résidus des fumées d'incendie sur la santé des sapeurs-pompiers, les services du ministère de l'intérieur ont engagé un plan d'actions visant d'une part, à mieux connaître la réalité de l'exposition à certains risques et leurs conséquences pour les sapeurs-pompiers, et, d'autre part, à mieux les prévenir et les empêcher. Après avoir établi, en 2018, un guide de doctrine opérationnelle « prévention des risques liés à la toxicité des fumées » à destination des services d'incendie et de secours (SIS), l'amélioration de la protection individuelle des sapeurs-pompiers a été inscrite dans des travaux continus notamment au sein du plan global de santé, sécurité et qualité de vie en service porté par le ministère de l'intérieur et s'est traduite par l'évolution des équipements de protection individuelle (cagoule de protection filtrante, …). Dans le domaine de la connaissance des risques, les services du ministère de l'intérieur ont également initié plusieurs chantiers d'études relatifs à l'élaboration d'une matrice emploi/tâche/exposition visant à identifier les risques associés à chaque activité de sapeurs-pompiers et au soutien d'un travail de thèse sur les effets à moyen et long termes des activités de sapeur-pompier sur la santé. S'agissant des maladies professionnelles chez les sapeurs-pompiers, il peut être utile de rappeler qu'il est d'ores et déjà possible de bénéficier de leur reconnaissance lorsque l'affection résulte d'une maladie non inscrite au tableau des maladies professionnelles, conformément au dernier alinéa de l'article L. 822-20 du code général de la fonction publique. Des travaux scientifiques nécessaires à conforter le faisceau d'arguments internationaux tendant à mettre en évidence le lien entre l'activité de sapeur-pompier et certains cancers sont en cours. Ils devraient permettre d'établir un consensus, sur les pathologies à soumettre à l'inscription au tableau des maladies professionnelles, notamment au sein de l'observatoire national sur la santé des agents des SIS, mis en place en 2024 et dans lequel les organisations représentatives des sapeurs-pompiers professionnels sont partie prenante. Une demande de révision du tableau des maladies professionnelles a par ailleurs été adressée à madame la ministre chargée du travail en décembre 2024. Ces études contribueront également à poser des éléments plus concrets du suivi de l'exposition des sapeurs-pompiers aux risques inhérents aux différentes missions des services d'incendie et de secours, éléments qui pourront utilement éclairer le suivi médical des sapeurs-pompiers tout au long de la carrière ainsi que le suivi post-professionnel instauré dans la fonction publique territoriale par le décret n° 2015-1438 du 5 novembre 2015. En particulier, concernant le suivi tout au long de leur carrière, les sapeurs-pompiers bénéficient d'ores et déjà d'examens cliniques et de bilans sanguins réguliers permettant de dépister les cancers hématologiques tel le lymphome. Le dépistage du sang dans les urines permet aussi de détecter les cancers de l'arbre urinaire. S'il n'existe pas d'examens de dépistage systématique aujourd'hui recommandés en France en prévention de la toxicité des fumées, des cytologies urinaires pour les sapeurs-pompiers très exposés, comme certains formateurs utilisant régulièrement les dispositifs de feux réels, sont préconisés par un référentiel national, à paraître dans le cadre de la réforme des textes relatifs à l'aptitude des sapeurs-pompiers. Il est souligné que la réforme de l'arrêté du 6 mai 2000 fixant les conditions d'aptitude médicale des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires est largement initiée suite à la parution du décret n° 2025-330 du 10 avril 2025 relatif à la médecine d'aptitude des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires ainsi que de son arrêté d'application qui permettront, au 1er janvier 2026, de disposer d'un système rénové. De même, les actions menées avec les parlementaires sur les conditions d'exercice de la médecine professionnelle et préventive au sein des services d'incendie et de secours seront aussi de nature à mieux tenir compte des risques de cancers. Dans un domaine particulièrement complexe, les travaux et les dispositifs que le Gouvernement déploient ont vocation à déterminer plus précisément les risques auxquels les sapeurs-pompiers sont exposés, y compris pour les fumées toxiques, à prévenir l'apparition de maladies et à mieux les protéger face à ces risques.

Données clés

Auteur : M. Paul Christophle

Type de question : Question écrite

Rubrique : Accidents du travail et maladies professionnelles

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 19 novembre 2024
Réponse publiée le 3 juin 2025

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