Question écrite n° 3829 :
Situation des Pieux établissements de la France à Rome et à Lorette

17e Législature

Question de : Mme Caroline Yadan
Français établis hors de France (8e circonscription) - Ensemble pour la République

Mme Caroline Yadan appelle l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation inquiétante des Pieux établissements de la France à Rome et à Lorette (PEFRL), institution placée sous l'autorité de l'ambassadeur et du ministère. Dans son rapport rendu le 3 septembre 2024, la Cour des comptes a mis en évidence des dérives multiples au sein de cette entité : une administration défaillante, une gestion du patrimoine approximative et porteuse de risques, une gestion financière et des ressources humaines opaque et artisanale, une action mal encadrée. Cette situation, qui perdure depuis plusieurs décennies, entache la réputation de la France et lui fait encourir des risques financiers et juridiques importants. Sur ce dernier point, la haute juridiction italienne a confirmé, dans un arrêt de 2016, toutes les décisions des juridictions du premier et second degré, qui déduisaient le régime fiscal applicable aux biens gérés par les Pieux établissement de leur appartenance à l'État français. Ce n'est pourtant pas la position du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, lequel a confirmé en 2020, que les Pieux établissements relevaient du droit privé italien, qualifiant leur statut de sui generis. L'ambiguïté du cadre juridique actuel des Pieux établissements entretient ainsi les errements précités, raison pour laquelle la Cour a recommandé la création d'un établissement public dans le but de donner aux Pieux un statut conciliant autonomie, transparence et contrôle. Si le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères ne juge pas viable la recommandation de la Cour, comme il l'a précisé dans ses observations faites au rapport, nulle mention n'est faite du statut cible envisagé afin de sortir de cette ambiguïté. Compte tenu de l'urgence de la situation, elle lui demande de détailler les mesures prises par le ministère depuis la publication de ce rapport, de préciser le statut cible envisagé pour les PEFRL et son délai de mise en œuvre et de reclarifier la position française au regard de la jurisprudence italienne afin de se prémunir quant au risque contentieux en matière fiscale et sociale.

Réponse publiée le 17 juin 2025

Les Pieux Etablissements de la France à Rome et à Lorette (PEFRL) sont une fondation française installée en Italie, dirigée par des organes propres et placée sous la supervision de l'ambassade de France près le Saint-Siège. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) a pris bonne connaissance des observations définitives de la Cour des comptes y afférant, présentées dans son rapport du 2 septembre 2024. La vocation première des PEFRL est d'entretenir les communautés religieuses qui desservent ses cinq églises (communauté de Saint-Louis, couvent et rectorat de la Trinité des Monts, Chapellenie nationale de France à Lorette) et d'assurer l'accueil des pèlerins francophones à Rome (Maison d'accueil Saint-Joseph de la Trinité-des-Monts, Centre pastoral d'accueil). Au-delà, ils contribuent, par l'organisation de manifestations culturelles, au rayonnement de la France à Rome. Les PEFRL sont ainsi particulièrement investis dans l'organisation du Jubilé de l'Espérance qui se tient actuellement à Rome, tout au long de l'année 2025. Les Pieux Établissements et le centre Saint-Louis sont au centre de l'organisation relative à l'accueil, l'appui aux pèlerins et à la sécurité des églises, sous l'animation de l'ambassade de France près du Saint-Siège et en liaison avec les services français de Rome et la communauté française, religieuse et laïque. La gestion des PEFRL s'inscrit dans un agenda de transformation lancé en 2021 et qui, continûment perfectionné, a permis des changements déjà mesurables. Des mesures ont été mises en place pour répondre aux exigences de professionnalisation, notamment par le recrutement, dès 2021, d'une architecte comme directrice du patrimoine, depuis 2023, d'un administrateur, d'un trésorier et d'une comptable et, en 2024, d'un secrétariat, d'un responsable de la gestion immobilière et d'un responsable du patrimoine artistique. Depuis 2016, une rotation de l'administrateur et du trésorier a été instaurée avec une nomination pour cinq ans, permettant d'assurer une meilleure gouvernance des PEFRL.  Le patrimoine religieux français de Rome et les immeubles propriétés des PEFRL, issus de donateurs qui assurent l'équilibre financier de l'institution, ne sont pas menacés. Leur entretien est assuré, avec une contribution du ministère de la Culture pour les monuments. La sécurité incendie est prise en compte en fonction de l'affluence liée au Jubilé. Le MEAE souhaite poursuivre et approfondir les transformations déjà engagées, en tenant compte des observations de la Cour des comptes. L'ambassade de France près le Saint-Siège ainsi que l'équipe des PEFRL y veillent au quotidien. En 2024, 10 des 12 recommandations formulées par la Cour dans son rapport avaient d'ailleurs été mises en œuvre. Parmi les évolutions récentes visant à garantir une bonne gestion et une bonne gouvernance des PEFRL, figurent notamment l'instauration d'une réunion mensuelle de la députation administrative, le lancement d'appels d'offres concurrentiels et une application intégrale du règlement des PEFRL. En 2024, un ensemble de textes de référence règlementant notamment les loyers aidés a été constitué. Ces efforts de professionnalisation et de rationalisation ont permis d'aboutir à une occupation du parc immobilier tendant vers 100 % en 2024, assurant une soutenabilité financière. Le MEAE estime que la recommandation de la Cour de transformer les PEFRL en établissement public n'est pas viable. Le régime légal de laïcité impose en effet des normes strictes dans les rapports entre l'Etat et les religions et cultes. La piste de transformation des PEFRL en établissement public engagerait l'Etat à assumer le financement et l'organisation du culte, et les salariés des PEFRL. La création de ce qui s'apparenterait ainsi à un établissement public du culte français à Rome ne peut donc être envisagée. Le MEAE est favorable à une poursuite de la transformation engagée dans le cadre institutionnel existant. Dans ce contexte, les recommandations de la Cour des comptes sont une boussole très appréciée.

Données clés

Auteur : Mme Caroline Yadan

Type de question : Question écrite

Rubrique : Associations et fondations

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 11 février 2025
Réponse publiée le 17 juin 2025

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