Reconnaissance des risques de cancer liés à l'activité de sapeur-pompier
Question de :
Mme Florence Goulet
Meuse (2e circonscription) - Rassemblement National
Mme Florence Goulet attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur le manque de reconnaissance des risques de cancer liés à la toxicité de l'activité de sapeur-pompier. Alors que l'OMS reconnaît depuis 2022 un lien entre l'exposition des sapeurs-pompiers et au moins sept types de cancer, la France reste en retrait en ne reconnaissant que le cancer du nasopharynx. Pourtant, de nombreuses études internationales attestent de cette corrélation. Une étude canadienne a révélé un risque de cancer du sein cinq fois plus élevé chez les sapeurs-pompières et un risque deux fois plus élevé de cancer des testicules chez les sapeurs-pompiers. Une autre étude américaine indique que 68 % des pompiers développent un cancer au cours de leur carrière. Face à ces risques, plusieurs pays, dont le Canada, les États-Unis d'Amérique, la Belgique ou encore l'Australie, reconnaissent jusqu'à 23 types de cancer liés à cette activité et ont renforcé la prévention. La reconnaissance du risque de cancer dans le cadre de l'activité de sapeur-pompier est essentielle pour un suivi médical adapté, une prise en charge précoce et un accès facilité aux soins et indemnisations. La mise en place d'une politique de prévention serait alors nécessaire. Aussi, elle lui demande si, face à ces risques, elle envisage d'instaurer des mesures de prévention, de renforcer l'accompagnement des sapeurs-pompiers et d'étendre cette reconnaissance.
Réponse publiée le 13 mai 2025
Les risques professionnels auxquels sont exposés les sapeurs-pompiers professionnels sont un sujet d'attention pour le ministère chargé du travail et de l'emploi. Compte tenu des expositions potentielles aux fumées de combustion contenant de multiples substances toxiques voire Cancérogènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction (CMR), la profession bénéficie en effet de mesures de prévention prévues par le code du travail et relatives aux expositions aux agents chimiques CMR (mesures de protection pour minimiser les expositions aussi bas que techniquement possible et dispositions en matière de surveillance médicale renforcée notamment). En outre, le décret n° 2024-307 du 4 avril 2024 a introduit de nouvelles dispositions imposant à l'employeur d'établir la traçabilité de l'exposition des travailleurs aux agents CMR à compter du 5 juillet 2024. L'employeur est ainsi tenu d'établir une liste nominative et actualisée des travailleurs susceptibles d'être exposés aux agents CMR. Cette liste précise, pour chaque travailleur, les substances CMR auxquelles il est susceptible d'être exposé ainsi que les informations connues sur la nature, la durée et le degré de son exposition. Concernant la réparation des pathologies professionnelles, les sapeurs-pompiers militaires et les sapeurs-pompiers professionnels relèvent de régimes spécifiques (L. 822-20 du code de la fonction publique), basés sur une reconnaissance automatique via les tableaux du régime général et, à défaut, avec un système permettant une reconnaissance devant des conseils médicaux. Il est donc d'ores et déjà possible pour les sapeurs-pompiers de demander la reconnaissance en maladie professionnelle devant le conseil médical, qui rend un avis sur l'origine professionnelle de la pathologie. Par ailleurs, il convient de mentionner l'existence des tableaux de maladies professionnelles n° 43 bis et 45, qui mentionnent explicitement les travaux d'extinction des incendies pour la réparation du carcinome du nasopharynx et les services de secours et de sécurité pour celle du carcinome hépato-cellulaire. En complément, les services du ministère chargé du travail et de l'emploi ont saisi l'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) pour expertiser la mise à jour de l'ensemble des tableaux des maladies professionnelles existants. Ce rapport fait état d'un niveau de preuves avéré entre les cancers de la vessie, de la plèvre ou du péritoine (mésothéliome) et la profession de pompier, en s'appuyant notamment sur les monographies du centre international de recherche sur le cancer. Ces pathologies figurant respectivement aux tableaux des maladies professionnelles n° 30, 15 ter et 16 bis, il est donc d'ores et déjà possible pour les pompiers de demander la reconnaissance en maladie professionnelle devant les conseils médicaux ou devant les comités régionaux dédiés (pour les pompiers relevant du secteur privé). Les services du ministère ont déjà entamé les démarches nécessaires à la révision ou modification des tableaux afin d'intégrer le lien entre les cancers de la vessie, de la plèvre ou du péritoine (mésothéliome) et la profession de pompier. La révision des trois tableaux de maladies professionnelles précités figure bien dans le programme de travail de la commission spécialisée relative aux pathologies professionnelles du conseil d'orientation des conditions de travail pour 2025-2026 et fera l'objet d'une priorisation. Enfin, le plan interministériel sur les substances per- ou polyfluoroalkylées (PFAS), également appelées "polluants éternels", contient une action spécifique pour les populations de travailleurs potentiellement les plus exposées telles que les sapeurs-pompiers et les militaires. Par ailleurs, les services du ministère se sont associés à la saisine de l'ANSES pour établir un bilan de la contamination des différents milieux par les PFAS et orienter ainsi les mesures de gestion des risques à mettre en place. Cette saisine, dont les résultats sont attendus pour avril 2025, doit notamment définir les priorités de surveillance des expositions professionnelles aux PFAS pour les secteurs d'activités les plus exposés. La profession de sapeur-pompier devrait dès lors faire l'objet de recommandations spécifiques.
Auteur : Mme Florence Goulet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Accidents du travail et maladies professionnelles
Ministère interrogé : Travail, santé, solidarités et familles
Ministère répondant : Travail et emploi
Dates :
Question publiée le 18 février 2025
Réponse publiée le 13 mai 2025