Cellule Demeter et observatoires de l'agribashing
Question de :
Mme Marie Pochon
Drôme (3e circonscription) - Écologiste et Social
Mme Marie Pochon alerte Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la cellule Demeter et les observatoires de l'agribashing. Une enquête exclusive parue dans le Journal Le Monde le 27 décembre 2024 remet en question la légitimité de la cellule de renseignement Demeter, créée le 3 octobre 2019, alors que le Conseil d'État vient de valider ses missions de « suivi (...) des actions idéologiques », visant à surveiller des « atteintes » d'ordre réputationnel au monde agricole. Cette enquête s'appuie sur les réponses et documents fournis par dix préfectures de l'ouest de la France en charge des « observatoires de l'agribashing » obtenues par l'ONG ARIA. Elle montre que, d'une part, depuis 2020 les agriculteurs ne se sont pas emparés de ce dispositif et que, d'autre part, il existe une vraie disproportion entre les menaces d'agribashing invoquées en 2019 à la création de la cellule Demeter et la mise en place des observatoires de l'agribashing et les infractions recensées depuis. En effet, dans nombre des préfectures contactées, les observatoires de l'agribashing ne s'étaient pas réunis pendant de longs mois voire années. À l'échelon national et toujours selon l'enquête exclusive parue dans Le Monde, la gendarmerie nationale ne semble pas non plus être en capacité d'obtenir un bilan des actions menées par la cellule Demeter depuis sa création, en matière de nombre d'enquêtes, d'interpellations ou de condamnations. Dans ce contexte, elle lui demande quels sont les financements et les moyens humains mis à disposition de la cellule Demeter et des observatoires de l'agribashing, quel est le nombre d'enquêtes et d'arrestations effectuées dans le cadre des actions de la cellule et pourquoi aucune évaluation de ce dispositif n'est faite alors même qu'il semble sous-utilisé voire inutilisé.
Réponse publiée le 17 juin 2025
Créée à la fin de l'année 2019 sur décision du ministre de l'Intérieur, la cellule "Demeter" a été organisée sur un mode « fonctionnel » au sein de la gendarmerie nationale. Elle n'a donc pas fait l'objet d'une création d'unité ad hoc ni bénéficié d'un budget spécifique. Progressivement, cette cellule fonctionnelle s'est transformée en une démarche globale de lutte contre les atteintes au monde agricole et de réassurance de la filière agricole à l'instar des opérations mises en œuvre au profit de professions exposées comme les médecins, les pharmaciens ou encore les élus. Dans le cadre de ce dispositif et dans le respect des lois et règlements, la gendarmerie mobilise des expertises dans les domaines tels que la prévention, la communication, le renseignement et la police judiciaire. Il s'agit de développer une démarche partagée avec les exploitants agricoles, en diffusant des conseils organisationnels et techniques afin de réduire les vulnérabilités constatées. S'agissant des actions de prévention, la gendarmerie est pleinement engagée dans la prévention des atteintes en renforçant sa présence sur la voie publique. Le projet de création de 239 nouvelles brigades (avec 80 créées en 2024), dont deux tiers de brigades mobiles, s'inscrit pleinement dans cette démarche et participe à la densification du maillage territorial. Les référents et correspondants sûreté présents dans chaque groupement de gendarmerie départementale et commandements de la gendarmerie d'outre-mer, arment la chaîne de prévention situationnelle. À la demande des agriculteurs, ils peuvent être engagés pour réaliser des évaluations portant sur les vulnérabilités des emprises agricoles et fournir des préconisations techniques, humaines et organisationnelles afin d'y remédier. Ainsi, en 2024, les référents sûreté de la gendarmerie présents dans chaque département ont réalisé avec précision 66 diagnostics de sûreté au profit des exploitations et concessionnaires agricoles et 544 consultations de sûreté. En parallèle, les chaînes d'alerte SMS « Vigi-agri », mises en œuvre dans les groupements en lien avec les chambres d'agriculture départementales, permettent de lutter contre les atteintes aux biens (ex. vols, dégradations, intrusions) et de prévenir les agressions au sein des exploitations agricoles. En fonction des besoins locaux, l'offre de sécurité est adaptée par les groupements de gendarmerie. Le dispositif « Gend'Viti », initié par le groupement de la Marne, permet aux gendarmes d'être à l'écoute du monde viticole, le temps des vendanges. Cette brigade mobile saisonnière permet de recueillir des signalements, de prendre des plaintes en mobilité et d'assurer une présence au plus près des agriculteurs et de la population. Cette démarche de proximité vis-à-vis des les agriculteurs tient compte de leurs contraintes professionnelles et facilite le recueil de plaintes en mobilité ainsi que la judiciarisation des faits. Cette manœuvre globale de prévention est confortée par la volonté d'identifier le plus en amont possible les éventuelles menaces, qu'elles soient liées à des enjeux de délinquance ou à des groupes radicalisés violents. La recherche du renseignement est ainsi menée localement par les brigades, dans le cadre de la police de sécurité du quotidien, avec des capacités d'analyse détenues par des services spécialisés comme le service de renseignement criminel de la gendarmerie nationale. C'est également dans cette dynamique qu'une convention de partenariat a été signée en décembre 2019 entre le ministère de l'intérieur, la fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles et les Jeunes agriculteurs. Cette convention fait l'objet d'une animation trimestrielle par la gendarmerie qui permet d'aborder l'état de la délinquance et les préoccupations du monde agricole (ex. agribashing, mesures de prévention, etc.). En outre, cette convention nationale a été déclinée au niveau local par les groupements de gendarmerie qui entretiennent des liens réguliers avec les représentants locaux de ces syndicats professionnels. Au travers des actions des forces de sécurité intérieure, le Gouvernement démontre sa volonté de garantir de manière constante la sécurité des agriculteurs sur l'ensemble du territoire national.
Auteur : Mme Marie Pochon
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 18 février 2025
Réponse publiée le 17 juin 2025