Question écrite n° 4371 :
Critères de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle des phénomènes RGA

17e Législature

Question de : Mme Marie Mesmeur
Ille-et-Vilaine (1re circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

Mme Marie Mesmeur attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les critères inadéquats de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle dans le cadre des dommages liés au phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA). Ce phénomène, largement aggravé par les épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents et intenses, provoque des dégâts considérables sur les habitations, comme en témoigne la situation à Pont-Péan, commune bretonne particulièrement touchée. Malgré les rapports scientifiques, les publications du BRGM et les observations locales démontrant l'ampleur du problème, l'État a systématiquement refusé de reconnaître le statut de catastrophe naturelle pour cette commune. Le tribunal administratif de Rennes, dans une décision récente, a demandé à l'État de réexaminer sa position pour la période du dernier trimestre 2018, soulignant l'insuffisance des critères actuels pour prendre en compte les spécificités locales et la cinétique lente du phénomène. La Cour des comptes elle-même a relevé les insuffisances du modèle actuel de reconnaissance des catastrophes naturelles pour le RGA. En effet, les critères météorologiques, fondés sur une modélisation par Météo France sur des mailles de 64 km² et des simulations saisonnières, sont inadaptés à l'alternance entre sécheresse et réhydratation ainsi qu'à l'analyse fine à l'échelle de la parcelle sinistrée ou de la commune. Ces limites empêchent de garantir une indemnisation juste et équitable pour les habitants, contraints de supporter des coûts de réparation souvent exorbitants. Cette situation qui dure depuis 2016 avec des positions contradictoires entre le tribunal administratif de Rennes et le ministère de l'intérieur, des publications du BRGM qui stipulent que leur étude devrait aider les sinistrés de la commune dans leurs procédures de reconnaissance de catastrophe naturelle, créent beaucoup d'incompréhension des sinistrés. Les sinistrés veulent encore croire à l'indépendance de la justice et des services de l'État comme le BRGM. Aujourd'hui, ce sont plus de 100 habitations et donc jusqu'à 500 Pont-Péannais qui sont dans une très grande détresse psychique et morale. Les maisons se dégradent année après année et présentent pour certaines des risques techniques forts. Les sinistrés voient leurs biens perdre en valeur, parfois invendables, balayant ainsi tout projet serein d'avenir. Cette situation est très difficile à vivre pour tous ces sinistrés qui se sentent démunis devant l'ampleur des dégâts qui ne cessent de s'amplifier au fil des années. Face à cette situation, des propositions de loi visant à réformer ces critères ont mis en avant l'importance d'intégrer des mesures de variation d'humidité prises sur le terrain et de réévaluer les seuils de sécheresse sur une base temporelle plus longue et adaptée à la réalité des sols. Il est essentiel que ces mesures soient évaluées pour garantir qu'elles permettent une analyse locale précise et qu'elles répondent à l'urgence croissante des dommages causés par les RGA. Elle lui demande quelles sont les mesures concrètes envisagées pour adapter les critères de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle aux spécificités du phénomène RGA et assurer un traitement juste et rapide des sinistres pour les communes touchées, comme Pont-Péan. Elle souhaite également connaître le calendrier de mise en œuvre de ces réformes, l'engagement de l'État en matière de prévention face à ce risque croissant, ainsi que les moyens techniques prévus pour garantir la fiabilité des données transmises par Météo France.

Réponse publiée le 24 juin 2025

Les conséquences sur les constructions du retrait-gonflement des argiles (RGA) sont couvertes depuis 1989 par le régime des catastrophes naturelles, tel que défini à l'article L. 125-1 du code des assurances. Selon les données de la Caisse centrale de réassurance, 42 % des 56,6 Md € versé au titre de dégâts causés par les catastrophes naturelles depuis la mise en place du régime en 1982, l'ont été pour ce phénomène, constituant le deuxième poste d'indemnisations, après les inondations. Le Gouvernement ne méconnait ni les effets de ce phénomène sur les bâtiments, ni les conséquences pour les familles sinistrées à Pont-Péan. Pour décider de la reconnaissance d'une commune en état de catastrophe naturelle, l'autorité administrative est tenue de se prononcer non pas sur l'importance des dégâts, mais sur le caractère anormal de l'intensité de l'épisode de sécheresse au regard des critères en vigueur. Ces critères sont fondés sur des études approfondies réalisées par les services d'expertise mandatés par l'administration. Pour prendre en compte l'évolution des connaissances scientifiques et une meilleure lisibilité du dispositif, tout en maintenant une instruction la plus équitable possible à l'échelle du territoire, les critères de reconnaissances ont été adaptées avec le temps. Ainsi, jusqu'en 2023, outre la présence d'argiles sensibles au retrait-gonflement, le critère de reconnaissance était la survenue d'une sécheresse exceptionnelle à l'échelle d'une saison, c'est-à-dire un épisode survenant en moyenne au moins une fois tous les 25 ans. Pour faire face aux dommages grandissants causés par le phénomène RGA, le Gouvernement conscient des difficultés d'indemnisation rencontrées par nos concitoyens, a engagé une réforme importante des critères de reconnaissance. Afin de mieux prendre en compte les dégâts causés par la sécheresse, les critères de reconnaissance ont été assouplis à partir du 1er janvier 2024. En application de l'ordonnance n° 2023-78 du 8 février 2023, la période de retour est désormais calculée sur l'ensemble de l'année, elle est en outre abaissée à 10 ans. Par ailleurs, des conditions alternatives permettent une prise en compte des successions d'épisodes significatifs et intègrent la situation des communes limitrophes. A ce titre, la circulaire n° IOME2322937C du 29 avril 2024 précise ces modalités de reconnaissance. Ainsi, lorsque la période de retour est supérieure ou égale à 5 ans, une reconnaissance est désormais possible si les périodes de retour de 2 des 4 années précédentes sont supérieures à 5 ans (succession d'épisodes significatifs) ou si la commune est limitrophe d'une commune reconnue par l'une des deux autres conditions. Ces nouveaux critères permettront à l'avenir de reconnaître plus facilement un épisode de sécheresse, comme Pont-Péan en a connu par exemple en 2022, avec un épisode présentant une durée de retour égale à 10 ans. Conscients de l'ampleur des dommages subis par la population et de la préoccupation grandissante face au phénomène de sécheresse-réhydratation des sols, les pouvoirs publics déploient des nouveaux efforts face à ce phénomène et adaptent les critères de reconnaissance. Enfin, le troisième plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC-3), publié le 10 mars 2025, consacre sa mesure 5 à la protection de la population des désordres sur les bâtiments liés au retrait-gonflement des argiles et la loi de finances 2025 prévoit que soient engagées des démarches de prévention du phénomène de retrait-gonflement des argiles.

Données clés

Auteur : Mme Marie Mesmeur

Type de question : Question écrite

Rubrique : Catastrophes naturelles

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 25 février 2025
Réponse publiée le 24 juin 2025

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