Question écrite n° 4480 :
Transmission à l'administration fiscale des revenus issus de réseaux sociaux

17e Législature

Question de : Mme Claudia Rouaux
Ille-et-Vilaine (3e circonscription) - Socialistes et apparentés

Mme Claudia Rouaux attire l'attention de Mme la ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics, sur la nécessité de mettre en place une transmission automatique et obligatoire à l'administration fiscale des revenus issus de réseaux sociaux à abonnement destinés à partager des contenus photographiques ou vidéographiques tels que Justforfans, Onlyfans ou encore Mym. Ces réseaux sociaux dédiés aux créateurs de contenus proposent aux utilisateurs des contenus exclusifs avec un service d'abonnement payant pour les fans. Le profil des créateurs de contenus est diversifié en comprenant par exemple des artistes, des sportifs, des coachs, des influenceurs qui produisent et diffusent sur internet des contenus variés, parfois sensibles d'ailleurs. Ces types de réseaux sociaux sont réputés pour générer des revenus de façon rapide et significative. Les revenus de ces créateurs de contenus doivent être dûment déclarés et imposés au nom de la justice fiscale et de la lutte contre la fraude fiscale. Or de nombreux créateurs ne procèdent pas aux déclarations obligatoires. Dans le cadre de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, des plateformes de vente en ligne de biens ou de services ont désormais l'obligation de transmettre à l'administration fiscale les revenus perçus par leurs utilisateurs. C'est notamment le cas d'Airbnb, Vinted, Ebay, Blablacar ou Leboncoin, sous conditions d'un seuil de recettes et de nombre de transactions. Mais le champ d'application de cette loi n'intègre pas des réseaux sociaux à système d'abonnement. Dans ce cas précis, les conditions pourraient être fixées en fonction d'un seuil de revenus et d'un nombre d'abonnés à ces contenus payants. Il faudrait que ces plateformes précitées aient notamment l'obligation de transmettre à l'administration fiscale la liste des personnes de nationalité française inscrites en tant que créateurs de contenus, mais également la liste des créateurs résidant en France. Cela permettrait à l'administration fiscale de contrôler leur qualité de résident fiscal français et de vérifier que les montants déclarés correspondent bien aux montants perçus par eux via ces plateformes. Au moment où le redressement des comptes publics et la lutte contre la fraude constituent des priorités, elle souhaite connaître les engagements concrets que compte prendre le Gouvernement pour rendre automatique et obligatoire la transmission à l'administration fiscale, par ces plateformes, des revenus des créateurs de contenus sur des réseaux sociaux avec un système d'abonnement, ainsi que pour renforcer les contrôles fiscaux liés à ce type d'activité.

Réponse publiée le 3 juin 2025

Afin de répondre à cette question, il convient de différencier les ventes ou les prestations réalisées en utilisant une plateforme de mise en relation et les contenus produits par les influenceurs pour leur propre compte leur permettant de générer des revenus via des plateformes de diffusion. S'agissant des plateformes de mise en relation, une obligation déclarative mise à la charge des opérateurs a été créée en France par l'article 10 de la loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude. Elle a été abrogée par l'article 134 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022, qui a transposé en droit interne la directive (UE) 2021/514 du Conseil du 22 mars 2021 modifiant la directive 2011/16/UE relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal, dite « DAC 7 ». Cette directive, transposée sous les articles 1649 ter A à 1649 ter E du code général des impôts, a mis en place à partir du 1er janvier 2023 un dispositif déclaratif au sein de l'Union européenne pour les opérations réalisées à compter de cette même date. Le dispositif transfrontalier prévoit l'obligation pour les opérateurs de procéder à la déclaration des opérations réalisées sur leur plateforme auprès de leur État de rattachement, les États ainsi collecteurs procédant ensuite entre eux à l'échange automatique de ces informations, en fonction du lieu de situation des vendeurs ou des biens immobiliers loués, le cas échéant. Certains des réseaux sociaux à système d'abonnement, mentionnés dans la présente question, sont établis hors de France et relèvent ainsi d'un État tiers pour la collecte des données relatives aux opérations qui y sont réalisées. Le nouveau dispositif de collecte et d'échange couvre plusieurs types d'opérations spécifiquement définis par la directive. Au cas particulier, il couvre le type d'opérations appartenant au domaine des services personnels, définis comme "un travail à l'heure ou à la tâche qui est exécuté par une ou plusieurs personnes physiques agissant soit de manière indépendante soit pour le compte d'une entité, et qui est fourni à la demande d'un utilisateur, soit en ligne soit physiquement hors ligne, après avoir été facilité par l'intermédiaire d'une plateforme". Par ailleurs, il convient d'apprécier ces opérations en tenant compte de l'interprétation développée par l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) des règles types de déclarations applicables aux plateformes numériques et dont le dispositif DAC7 est la traduction européenne. A ce titre, l'OCDE a notamment précisé que la définition de services personnels couvrait les contenus audiovisuels délivrés sur des plateformes numériques. Lorsque le contenu fourni à la demande du consommateur est personnalisé, l'opération entre dans la définition d'un service personnel et est alors déclarable. Dès lors qu'elles sont réalisées dans ces conditions, les opérations évoquées dans la question entrent dans le champ de l'obligation déclarative DAC7 et doivent donc être déclarées. Les opérateurs concernés ne répondant pas à leur obligation déclarative peuvent se voir appliquer l'amende prévue au XI de l'article 1736 du code général des impôts. Les informations ainsi collectées ou échangées auprès de ces opérateurs peuvent être mobilisées en matière de contrôle fiscal en cas de défaillance déclarative de créateurs de contenus audiovisuels. Concernant les plateformes de diffusion de contenus, qu'elles disposent ou non d'un système d'abonnement, elles sont hors du champ d'application de la DAC7 et effectivement utilisées par les influenceurs pour générer des revenus liés à leur popularité. Ces revenus sont imposables et doivent donc être déclarés par les intéressés.

Données clés

Auteur : Mme Claudia Rouaux

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Comptes publics

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Dates :
Question publiée le 25 février 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025

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