Sur la différence de traitement des victimes antillaise exposées au chlordécone
Publication de la réponse au Journal Officiel du 16 septembre 2025, page 8003
Question de :
M. Jiovanny William
Martinique (1re circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Jiovanny William interroge Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les raisons pour lesquelles il existe une différence de traitement et de méthode entre victimes contaminées au chlordécone et victimes exposées aux autres produits phytosanitaires lors de la fixation du taux d'incapacité. En effet, toutes les victimes du chlordécone sont examinées aux Antilles par les médecins-conseils de la Sécurité sociale, lesquels vont analyser le dossier médical de la victime sur la base des examens médicaux et pièces fournies. Ils sont alors appelés à donner un avis tenant compte des symptômes et du lien de causalité entre la maladie et la profession exercée par le demandeur. Toutefois, ces mêmes médecins à l'origine de l'avis transmis au fonds d'indemnisation, ne seront pas mandatés pour fixer le taux d'incapacité des victimes, pourtant déterminant pour allouer une pension d'invalidité juste et cohérente. Pour les victimes antillaises, le taux sera fixé dans l'Hexagone, à 8 000 km, par un autre médecin qui ne l'aura jamais vu et qui ne procédera à aucun examen de cette dernière. Or telle n'est pas la procédure appliquée pour les autres victimes des produits phytosanitaires dans l'Hexagone. Le même médecin-conseil examine, étudie le dossier et fixe le taux. De même, il est à signaler qu'entre le moment où le fonds a été mis en place et aujourd'hui, on a pu assister à une baisse significative du montant des pensions allouées, sans pouvoir en expliquer la cause. Ces pensionnés peinent à vivre avec les sommes indignes qui leurs sont allouées. Il la prie de faire la lumière sur cette différence de traitement et lui demande de préciser ses intentions pour rétablir une égalité de traitement entre Français empoisonnés.
Réponse publiée le 16 septembre 2025
Depuis sa création en 2020, le fonds d'indemnisation des victimes de pesticides (FIVP) a instauré une égalité de traitement entre les assurés relevant du régime général, des régimes agricoles et d'Alsace-Moselle, victimes d'une exposition professionnelle aux pesticides. La gestion des dossiers du FIVP a été confiée, en application du deuxième alinéa de l'article R. 723-24-7 du code rural et de la pêche maritime, à la mutualité sociale agricole (MSA) Mayenne Orne Sarthe. Aussi, les demandes des assurés de métropole et d'outre-mer sont centralisées et instruites de façon harmonisées. L'instruction d'une demande de reconnaissance de maladie professionnelle en est simplifiée et la réparation des préjudices subis facilitée. L'égalité de traitement entre les assurés [en métropole et dans les départements d'outre-mer (DOM)] repose également sur l'harmonisation des décisions prises grâce à la mise en place d'un comité de reconnaissance des maladies professionnelles unique. Dès lors, les décisions tenant à la reconnaissance des maladies professionnelles, à la détermination du taux d'incapacité permanente et au niveau d'indemnisation sont homogénéisées au niveau national (métropole et DOM dont les Antilles) en appliquant le droit commun du régime des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). Plus précisément, en cas de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie en lien avec une exposition aux pesticides, lorsque des séquelles subsistent au moment de la stabilisation de l'état de santé de l'assuré, le collège de médecins du FIVP fixe la date de consolidation et détermine le taux d'incapacité permanente. Ce taux conditionne le versement d'un capital ou d'une rente à l'assuré. Avant l'instauration du FIVP, il existait des différences d'appréciation d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) à l'autre (ce qui peut expliquer une différence du niveau d'indemnisation depuis l'instauration du FIVP). Le FIVP garantit également une amélioration du niveau de prestations versées pour les non-salariés agricoles avec la création d'un complément d'indemnisation et permet aux retraités partis avant la création de la branche AT-MP des non-salariés agricoles en 2002 (ATEXA) d'être éligibles et de pouvoir être couverts en cas d'exposition aux pesticides. Aux Antilles, la création du FIVP a nécessité d'améliorer l'indemnisation des victimes de pesticides et d'informer, dans le cadre du plan chlordécone IV, la population sur la procédure d'indemnisation en cas d'exposition professionnelle aux pesticides. Il n'en demeure pas moins que la procédure applicable aux victimes professionnelles exposées aux pesticides dont la chlordécone est la même que celle applicable en métropole. Cette procédure, déclinée au sein du code de la sécurité sociale, notamment à l'article D. 491-6, prévoit que le médecin-conseil de la caisse de MSA à laquelle est déléguée la gestion du fonds se prononce sur le taux d'incapacité permanente de la victime en se fondant sur les éléments médicaux transmis par le médecin-conseil de la caisse dont dépend l'assuré (caisse générale de sécurité sociale pour les Antilles et caisse de MSA ou caisse primaire de l'assurance maladie ou caisse d'assurance accidents agricoles Alsace-Moselle pour la métropole). À ce titre, un collège médical a été mis en place au sein du service du contrôle médical de la MSA Mayenne Orne Sarthe pour assurer de manière uniforme le traitement des dossiers des victimes de pesticides. Selon les informations figurant dans le dernier rapport d'activité du FIVP (disponible sur le site du fonds), en 2023, le collège médical du FIVP s'est réuni lors de 52 séances et a examiné 432 rapports de consolidation rédigés par les médecins-conseils des caisses d'affiliation. En pratique, les praticiens du collège examinent l'ensemble du rapport de consolidation transmis, déterminent la date de consolidation et le taux d'incapacité selon le barème indicatif des AT-MP. Leur décision est collégiale. Ce rapport souligne que la fréquence des séances et le nombre de dossiers étudiés permettent aux praticiens de se référer à l'ensemble des décisions rendues et aux taux d'incapacité retenus par pathologie afin de fixer des taux précis en garantissant leur harmonisation.
Auteur : M. Jiovanny William
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 8 septembre 2025
Dates :
Question publiée le 25 février 2025
Réponse publiée le 16 septembre 2025