Question de : M. Patrice Martin
Seine-Maritime (6e circonscription) - Rassemblement National

M. Patrice Martin attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la nécessité d'une régulation accrue de la population lupine en France. Après sa disparition du territoire national au début du XXe siècle, le loup a naturellement recolonisé l'Hexagone à partir des années 1990, notamment en provenance d'Italie. Aujourd'hui, sa présence s'étend bien au-delà des massifs alpins et pyrénéens, touchant également le Massif Central, les Vosges et certaines plaines. Selon les derniers relevés, la population de loups dépasse désormais 1 013 individus, causant chaque année la prédation de plus de 12 000 animaux d'élevage dans 60 départements. En 2024, les attaques lupines ont augmenté de 4,6 %, avec des cas particulièrement marquants, comme celui d'un éleveur de Saint-Bérain-sur-Dheune, en Saône-et-Loire, victime de sa 25e attaque en janvier dernier. Les éleveurs font face à des pertes considérables, non seulement en raison de la mortalité directe des animaux, mais aussi des impacts indirects sur la reproduction, la sélection génétique et la viabilité économique des exploitations. Ces prédations fragilisent gravement l'élevage pastoral, essentiel à la vitalité des territoires ruraux. La nécessité d'une régulation effective du loup est renforcée par la décision récente de l'Union européenne, en décembre 2024, d'abaisser son niveau de protection, passant de « strictement protégé » à « protégé », permettant une plus grande flexibilité dans la gestion de cette espèce. Dans ce contexte, l'arrêté du 7 février 2025, modifiant celui du 21 février 2024, a élargi les possibilités de dérogation préfectorale aux interdictions de destruction du loup. Ces avancées réglementaires doivent s'accompagner d'objectifs clairs et d'une politique de régulation ambitieuse afin de garantir la pérennité du pastoralisme. Le Rassemblement National s'est d'ailleurs saisi du sujet, à travers ses travaux au Parlement européen et le dépôt d'une proposition de résolution à l'Assemblée nationale. Aussi, il souhaite connaître les mesures concrètes que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour assurer une régulation efficace du loup dans le cadre de son déclassement à la Convention de Berne. Il lui demande également quels objectifs chiffrés de population lupine elle entend fixer afin de rétablir un équilibre entre la préservation de l'espèce et la protection des éleveurs.

Réponse publiée le 15 juillet 2025

La ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire est pleinement consciente de la détresse des éleveurs. Les attaques par le loup ont un impact conséquent sur leur activité, en termes économiques, mais aussi psychologiques et impliquent une adaptation subie de leurs pratiques agricoles. Dans ce contexte, si la population lupine semble se stabiliser selon les estimations élaborées en 2024 par l'office français de la biodiversité (OFB), établie à un effectif moyen de 1 013 individus, elle a toutefois connu, durant ces dernières années, une augmentation ainsi qu'une expansion géographique. En conséquence, un nombre élevé de dommages aux troupeaux ont été dénombrés, dont le bilan provisoire pour 2024 est chiffré à environ 12 000 animaux prédatés, en hausse sur le front de la colonisation. L'État accompagne les éleveurs, autant pour prévenir que pour indemniser, dans le cadre notamment du plan national d'actions (PNA) loup et activités d'élevage 2024-2029 qui vise à trouver le juste équilibre entre préservation de l'espèce et maintien de l'activité d'élevage. À cette fin, le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire soutient financièrement les éleveurs pour la mise en place de mesures de protection des troupeaux. Cette politique repose sur un triptyque de moyens de protection : gardiennage, mise en place de parcs électrifiés et recours aux chiens de protection des troupeaux. Ainsi, l'aide à la protection des troupeaux contre la prédation a été maintenue et renforcée dans la nouvelle programmation de la politique agricole commune (PAC). Cette aide permet le financement du gardiennage par les bergers, l'achat de clôtures, l'achat et l'entretien de chiens de protection, ainsi que la réalisation d'études de vulnérabilité et un accompagnement technique. Cependant, des difficultés de protection de certains troupeaux subsistent, malgré les nombreux efforts des éleveurs à cet égard. C'est pourquoi l'un des objectifs du PNA loup et activités d'élevage 2024-2029 est également de permettre la délivrance d'autorisations de tirs dans les meilleurs délais dès lors que les conditions préalables en termes de protection des troupeaux sont réunies. Pour l'année 2025, suite à la dernière estimation établie par l'OFB sur la base d'une nouvelle méthode plus solide scientifiquement, le plafond de spécimens pouvant être détruits est fixé à 192. En outre, l'État a souhaité faciliter l'accès aux autorisations de tirs de défense afin d'apporter une réponse aux éleveurs bovins, équins et asins, victimes de prédation lupine et en l'absence d'un référentiel de protection validé. Un arrêté modifiant l'arrêté du 21 février 2024, fixant les conditions et limites dans lesquelles les dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup, a été signé conjointement par les ministres chargés de l'agriculture et de la transition écologique le 21 juin et publié le 22 juin 2025 au Journal officiel de la République. Cet arrêté a fait l'objet d'une consultation publique du 20 mai au 10 juin 2025. Cet arrêté qui s'inscrit dans le prolongement de l'arrêté du 7 février 2025, est pris en application du paragraphe IV de l'article 47 de la loi d'orientation n° 2025-268 du 24 mars 2025 pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture.  L'évolution organisée dans cet arrêté offre un cadre renforcé pour permettre aux éleveurs de défendre leurs troupeaux, notamment de bovins, qui représentent désormais près de 8 % de la totalité des attaques répertoriées sur des troupeaux domestiques.  Enfin, il est apparu nécessaire d'envisager l'évolution des textes internationaux (convention de Berne) et européens (directive Habitats) afin de tenir compte de l'état réel de conservation de l'espèce du loup. Le comité permanent de la convention de Berne a approuvé, le 22 mars 2025, la proposition d'abaissement du niveau de protection du loup, passant de « strictement protégé » à « protégé », portée par la Commission européenne sur demande des États membres. Dans cette continuité, les États membres ont également approuvé, le 16 avril 2025, la proposition de la Commission européenne de révision du statut de protection du loup dans le cadre de la directive Habitats. Enfin, le Parlement européen a voté en faveur de cette modification, le 8 mai 2025, et le Conseil a approuvé cette évolution à une très grande majorité le 5 juin 2025. Cela offrira plus de flexibilité à la France pour gérer les populations lupines. L'entrée en vigueur de ce déclassement interviendra probablement mi-juillet prochain, après la publication au Journal officiel de l'Union européenne (UE). Les travaux relatifs à la transposition de cette directive habitat sont actuellement conduites par la préfète coordinatrice en collaboration avec les professionnels concernés et le groupe national Loup.  Dans ce contexte, la France et l'UE continueront de soutenir la mise en place d'actions en faveur de la coexistence et de la prévention de la prédation. De plus, les aides destinées à indemniser les agriculteurs concernés par des attaques pourront être maintenues.

Données clés

Auteur : M. Patrice Martin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Animaux

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 1er avril 2025
Réponse publiée le 15 juillet 2025

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