Question écrite n° 5705 :
Nécessité de reconnaître et protéger les droits trans et non-binaires

17e Législature

Question de : M. Emmanuel Fernandes
Bas-Rhin (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

M. Emmanuel Fernandes alerte Mme la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations sur la nécessité de reconnaître et protéger les droits trans et non-binaires. M. le député interpelle Mme la ministre sur la nécessité de faire progresser les droits des personnes trans ou non-binaires en France. L'État ne reconnaît pas suffisamment le droit des personnes trans comme des personnes non-binaires à vivre leur vie, alors que les droits trans sont des droits humains. Il a quasiment fallu attendre la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) de Strasbourg dans l'affaire Garçon et Nicot contre France pour faire adopter la loi du 18 décembre 2016 qui a enfin arrêté d'exiger des personnes trans leur stérilité pour changer leur état civil. Plus récemment, le Parlement a étendu avec difficulté aux personnes trans la protection de la loi du 31 janvier 2022 interdisant les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne. Surtout, des insuffisances demeurent aujourd'hui dans la loi qui reste discriminante à l'encontre des personnes trans et surtout non-binaires, dont les droits humains ne sont que partiellement conquis. Ainsi, le Conseil constitutionnel a reconnu le 8 juillet 2022, dans sa décision sur la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) de l'association Groupe d'information et d'action sur les questions procréatives et sexuelles, que le législateur a volontairement écarté les personnes trans de l'accès à la procréation médicalement assistée (PMA). Cette différence de traitement ne saurait être justifiée : le législateur empêche aujourd'hui un homme trans, ayant obtenu la modification en ce sens de son état civil, d'accéder à la PMA alors même que son corps lui permet de porter un enfant. Dans les faits, il s'agit d'un obstacle posé à la reconnaissance pour les personnes trans de leur genre, qui préfèrent parfois, malgré les difficultés profondes dans lesquelles cela peut les plonger et la haine auxquelles elles peuvent faire face, ne pas faire reconnaître leur situation. Ainsi, il souhaite lui demander quel est son plan d'action pour permettre aux personnes trans ou non-binaires de conquérir les droits qui ne leurs sont pas encore reconnus par la loi. Des chantiers profonds demeurent à ouvrir dans de nombreux domaines. Le premier domaine est celui de l'état civil. Malgré la loi de 2016, le rapport « État civil de demain et transidentité » de la mission de recherche Droit et justice pointe plusieurs questions qui demeurent aujourd'hui sans cadre légal : la modification de marqueur de sexe pour les mineurs non-émancipés représentés par leur parents et l'absence de lien entre sexe à l'état civil et des critères biologiques. Les associations militant en faveur des droits trans plaident de plus pour la fin de la judiciarisation de leurs vies par l'accès au changement de marqueur de sexe en mairie, comme c'est le cas aujourd'hui pour le changement de prénom. Enfin, l'existence de personnes non-binaires demeure un impensé du droit français et de l'état civil. Cette existence nécessite une reconnaissance, par exemple via la fin de l'enregistrement du marqueur de sexe sur les documents d'identité. Le deuxième domaine est celui de la filiation. C'est le cas de l'accès à la PMA pour les hommes trans qui en sont injustement exclus, toute personne en capacité de porter un enfant devrait avoir le droit à la PMA. Aujourd'hui, il y a encore une absence de garantie légale de possibilité d'utilisation des gamètes des personnes trans conservés avant un traitement hormonal, tel que le permet pourtant la décision MSP-2015-009 du 22 octobre 2015 du Défenseur des droits. Il est enfin nécessaire d'organiser des campagnes actives pour encourager le don de gamètes. Plus profondément, il s'agit de l'ouverture de la filiation pour qu'elle puisse correspondre aux réalités des personnes trans ou non-binaires, pour faire en sorte que ces personnes n'aient plus jamais à adopter leur propre enfant, qu'elles ont parfois accouché. Le troisième domaine est celui des conditions de vie des personnes trans ou non-binaires. Celles-ci doivent être mieux protégées de la haine transphobe ou embyphobe et du rejet de leurs identités, face à la crise de violence pointée par le rapport 2023 de l'association SOS Homophobie. Les soins de transition trans, dont certains pourtant absolument nécessaires à une vie normale pour ces personnes, demeurent extrêmement coûteux, doivent être rendus accessibles, notamment via une meilleure formation sur ces questions des professionnels de la santé qui améliorera également le respect des droits des patients médicaux, le libre choix des parcours médicaux sur la base du consentement éclairé, mais également par un remboursement à 100 % des soins de santé trans par l'assurance maladie. Le Gouvernement doit enfin faire cesser les mutilations génitales sur les nourrissons et enfants intersexes, qui visent à faire conformer une réalité biologique complexe avec un imaginaire social binaire du genre. M. le député, en tant que représentant de la Nation, se fait le relais des voix trans et non-binaires sur la question demande à Mme la ministre quelle politique elle compte mener dans le domaine. Les droits des personnes trans et non-binaires doivent être reconnus et protégés. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.

Réponse publiée le 3 juin 2025

Ce 26 mai 2025 s'est tenu le 1er comité de suivi du plan national pour l'égalité, et contre la haine et les discriminations LGBT+ présidé par la Ministre Aurore Bergé, en lien avec la DILCRAH. Ce plan, structuré autour de cinq grands axes d'action (nommer, mesurer, former, protéger, sanctionner), mobilise l'ensemble des ministères, les collectivités, les établissements publics et un large réseau d'associations partenaires. La ministre a fixé trois priorités d'action pour accélérer sa mise en œuvre : Renforcer la protection des personnes LGBT+ et sanctionner les auteurs de propos haineux, Assurer un accès équitable aux services de santé pour les personnes LGBT+, L'éducation comme pilier central de la lutte contre les discriminations. Les droits des personnes LGBT+ sont des droits fondamentaux, protégés à titre égaux devant la loi (orientation sexuelle et identité de genre). En droit français, le mineur (sauf s'il est émancipé) est juridiquement incapable d'exercer seul un certain nombre d'actes ou droits. Le changement de sexe à l'état civil est considéré comme un acte d'une grande portée personnelle, ce qui justifie une approche prudente du législateur et des juges. Le sexe à l'état civil n'est plus juridiquement lié à des critères biologiques (chromosomes, organes génitaux, etc.), mais à l'identité de genre telle qu'exprimée et vécue par la personne. En effet, le changement de sexe à l'état civil ne dépend plus de preuves médicales ou biologiques : depuis la loi de 2016 (article 61-5 du Code civil). Depuis la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 (dite Justice du XXIs), la procédure de changement de la mention de sexe à l'état civil n'a pas été déjudiciarisée mais on peut considérer qu'elle a été simplifiée. Il n'est plus nécessaire de subir une opération chirurgicale ou un traitement médical pour demander la modification de la mention de sexe (question de droits fondamentaux/ dignité bien sûr). La personne doit démontrer que la mention de sexe figurant sur son état civil ne correspond pas à celle dans laquelle elle se présente et est connue. La campagne #FaitesDesParents menée à l'automne 2024 a permis de multiplier par 2,5 les candidatures au don de spermatozoïdes et par 2 celles au don d'ovocytes dans les centres concernés, ainsi qu'une forte hausse de la fréquentation des sites dédiés (+x6 et +x12). Une nouvelle agence de communication a été engagée début 2025. Pour 2025, une nouvelle tournée dans 10 villes est prévue, avec une campagne nationale en septembre et des kits de communication mis à disposition pour les autres territoires Le Plan national traduit l'engagement du Gouvernement pour éradiquer les violences et la haine, garantir l'égalité des droits et construire une société où chacun peut être soi-même. Il mobilise l'ensemble des ministères, les préfectures, les collectivités territoriales, les établissements publics, les institutions judiciaires et éducatives, ainsi qu'un large réseau d'associations, partenaires indispensables et exigeants des pouvoirs publics. Le dernier rapport du Ministère Intérieur indique : 4824 infractions LGBT+ en 2024 ; +5% par rapport à 2023 C'est pourquoi un comité de suivi du Plan national pour l'égalité contre la haine et les discriminations anti LGBT+ (2023-2026) s'est tenu ce 26 mai en présence de tous les Ministères parties prenantes, services et cabinets ainsi que de toutes les associations co-constructrices de ce Plan qui se développent en 117 mesures dont 85 % sont engagées autour de 5 grands axes, dont les 4 suivantes : Sanctionner les auteurs, Accompagner les victimes, Éduquer les jeunes et former tout au long de la vie et Défendre les droits des personnes LGBT en Europe et dans le monde. Sanctionner les auteurs : La mise en place de 2 plateformes de signalements l'une dédiée à l'atteinte aux personnes et l'autre à la haine en ligne et le renforcement des sanctions contre les propos discriminatoires, notamment en milieu sportif Accompagner les victimes : Le développement les réseaux des référents LGBT+ (police, gendarmerie, enseignement supérieur) La direction générale de l'enseignement et de la recherche du ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire s'est elle aussi dotée d'un réseau national en matière d'égalité, de diversité et de lutte contre toutes les formes de violence et de discriminations (Ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire). Une circulaire est en cours pour intégrer les enjeux liés à la diversité dans les missions des Hauts fonctionnaires à l'Égalité (Ministère de l'Action publique, de la Fonction publique et de la Simplification).  Conformément à l'engagement pris par la Première ministre, Élisabeth Borne, le 4 août 2022, une enveloppe de 10 millions d'euros est consacrée au financement des Centres LGBT+ et à la création de nouvelles structures sur la période 2022 - 2026. Depuis 2022, 21 nouveaux Centres ont été créés, soit deux fois plus que l'objectif initialement annoncé. En 2025, l'État finance ainsi 59 Centres LGBT+ à travers 51 départements (dont la Guadeloupe, la Réunion, la Martinique, la Polynésie française et la Guyane), contribuant à un maillage territorial renforcé. Le 24 avril dernier, la Ministre a inauguré le premier Centre LGBT+ de Guadeloupe. Éduquer les jeunes et former tout au long de la vie : Avec la mise en œuvre du programme d'éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS). En France, les soins médicaux liés à la transition de genre peuvent être pris en charge par l'Assurance Maladie dans le cadre de l'Affection de Longue Durée (ALD) 31, une ALD hors liste. Cependant, la prise en charge varie selon les soins concernés. Les mutilations génitales sont évidemment interdites dans notre pays. L'encadrement de l'intervention médicale concernant les enfants présentant des variations du développement génital a fait l'objet de discussions pendant la loi de bioéthique. L'article 30 de la loi du 2 août 2021 inscrit dans la loi les principes de concertation préalable à toute intervention. En France, les soins médicaux liés à la transition de genre peuvent être pris en charge par l'Assurance Maladie dans le cadre de l'Affection de Longue Durée (ALD) 31, une ALD hors liste. Cependant, la prise en charge varie selon les soins concernés. Les mutilations génitales sont évidemment interdites dans notre pays. L'encadrement de l'intervention médicale concernant les enfants présentant des variations du développement génital a fait l'objet de discussions pendant la loi de bioéthique. L'article 30 de la loi du 2 août 2021 inscrit dans la loi les principes de concertation préalable à toute intervention

Données clés

Auteur : M. Emmanuel Fernandes

Type de question : Question écrite

Rubrique : Discriminations

Ministère interrogé : Égalité entre les femmes et les hommes et lutte contre les discriminations

Ministère répondant : Égalité entre les femmes et les hommes et lutte contre les discriminations

Dates :
Question publiée le 8 avril 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025

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