Reconnaissance tardive de la qualité de travailleur handicapé et rétroactivité
Question de :
M. Julien Gokel
Nord (13e circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Julien Gokel interroge Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée de l'autonomie et du handicap, sur la situation des personnes ayant fait reconnaître tardivement leur qualité de travailleur handicapé (RQTH) et ne pouvant ainsi pas bénéficier de la rétroactivité des droits spécifiques adossés à ce statut. De nombreuses personnes en situation de handicap attendent plusieurs années avant d'entamer les démarches administratives auprès de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) en vue de faire reconnaître leur qualité de travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Les raisons, aussi diverses que légitimes, peuvent aller du manque d'information à la complexité du processus, en passant parfois par la difficulté à évaluer sa propre situation ou par l'évolution du handicap au fil du temps. Pour toutes ces personnes, les droits accordés par une RQTH de manière tardive ne sont malheureusement pas rétroactifs. Cela pénalise particulièrement celles qui approchent de l'âge de départ à la retraite et qui ne peuvent ainsi pas demander un départ anticipé faute d'avoir cotisé assez de trimestres en tant que travailleur handicapé. Aujourd'hui, la seule possibilité offerte à ces travailleurs pour faire valoir leurs droits est un long parcours administratif et judiciaire auprès de différentes instances : une commission nationale placée auprès de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS), voire le pôle social du tribunal judiciaire, pour espérer obtenir la qualité de travailleur handicapé de manière rétroactive. Compte tenu de la situation que vivent de nombreux travailleurs en situation de handicap, il l'interroge sur la façon dont l'administration pourrait faciliter les démarches et renforcer l'accompagnement afin que la qualité de travailleur handicapé soit reconnue de manière rétroactive ; cela permettrait de réparer de nombreuses injustices vécues par des milliers de personnes qui ont travaillé toute leur carrière sans aménagement adapté à leur situation physique, sensorielle, mentale ou psychique.
Réponse publiée le 24 juin 2025
Est considérée comme travailleur handicapé au sens de la loi (article L. 323-10 du code du travail), toute personne dont les possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite de l'altération d'une ou plusieurs fonctions physique, sensorielle, mentale ou psychique. La qualité de travailleur handicapé est reconnue par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), après l'instruction d'une demande déposée auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Cette demande relève du choix de la personne que nul peut contraindre. En outre, la décision rendue par la CDAPH produit ses effets à compter du dépôt du dossier auprès de la MDPH. S'agissant du bénéfice de la retraite anticipée, un dispositif spécifique a été prévu en faveur des personnes qui peuvent justifier des durées d'assurance requises mais ne pouvant pas attester, sur la totalité de cette durée, de la reconnaissance administrative de leur incapacité (taux d'incapacité au moins de 50%) ou d'une Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) pour les périodes antérieures au 31 décembre 2015. En effet, la loi (article L. 161-21-1 du code de la sécurité sociale) prévoit que les assurés de l'ensemble des régimes obligatoires de base dans lesquels existe une retraite anticipée pour les travailleurs handicapés peuvent, sous certaines conditions, bénéficier de l'examen de leur situation par une commission nationale placée auprès de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés. Ce dispositif permet aux travailleurs handicapés qui auraient saisi la MDPH tardivement de bénéficier de la retraite anticipée pour les travailleurs handicapés. Elles ont vocation à éviter les procédures contentieuses lourdes et longues. L'examen de la situation de la personne sollicitant cette commission est fondé sur un dossier à caractère médical, les données transmises par l'assuré permettant à la commission d'établir l'ampleur de l'incapacité, de la déficience ou du désavantage pour les périodes considérées. A l'issue de l'examen du dossier, l'avis motivé de la commission est notifié à l'organisme débiteur de la pension, auquel il s'impose. Par ailleurs, diverses mesures ont été adoptées en 2018 en vue de simplifier et d'alléger les démarches des travailleurs handicapés. La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel introduit, depuis 2020, la possibilité pour les MDPH d'attribuer la RQTH à titre permanent lorsque le handicap est irréversible. De même, dans l'objectif de prévenir les ruptures de droits au moment des renouvellements et plus généralement de ne pas imputer les délais de traitement, qui sont variables d'une MDPH à l'autre, aux usagers, le décret n° 2018-850 du 5 octobre 2018 relatif à la simplification de la procédure de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé et à l'amélioration de l'information des bénéficiaires de l'obligation d'emploi prévoit que toute demande de renouvellement de RQTH proroge les effets du bénéfice de la RQTH délivrée au titre d'une précédente décision, dans l'attente de son instruction. Enfin, plus récemment, la loi pour le plein emploi de 2023 à amélioré les droits des personnes reconnues handicapées par l'extension des droits applicables aux personnes titulaires de la RQTH aux catégories bénéficiant de l'obligation d'emploi en dehors des ayants-droits (veufs et veuves de guerre, pupilles de la nation, enfants de harkis). Le Gouvernement poursuit de manière volontariste les chantiers de simplification qui permettront de générer, à terme, une réduction des délais de traitement des demandes par les MDPH et de faciliter sensiblement les démarches des personnes handicapées. Cependant, la demande de RQTH reste une démarche individuelle et personnelle. Une personne peut choisir de ne pas faire reconnaitre sa situation de handicap pour diverses raisons et l'administration ne peut l'y contraindre.
Auteur : M. Julien Gokel
Type de question : Question écrite
Rubrique : Personnes handicapées
Ministère interrogé : Autonomie et handicap
Ministère répondant : Autonomie et handicap
Dates :
Question publiée le 8 avril 2025
Réponse publiée le 24 juin 2025