Question au Gouvernement n° 1046 :
Double évasion à la maison d'arrêt de Dijon

17e Législature

Question de : Mme Océane Godard
Côte-d'Or (1re circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 24 décembre 2025


DOUBLE ÉVASION À LA MAISON D'ARRÊT DE DIJON

Mme la présidente . La parole est à Mme Océane Godard.

Mme Océane Godard . J’associe à cette question mes collègues députés dijonnais Catherine Hervieu et Pierre Pribetich.

Monsieur le ministre de la justice, jeudi dernier, la maison d’arrêt de Dijon a été le théâtre d’une évasion spectaculaire. Deux détenus se sont enfuis en plein jour, exploitant les failles d’un établissement en situation de forte surpopulation carcérale, sous-doté et dont les bâtiments souffrent de malfaçons, tout comme ceux des établissements pénitentiaires de Gradignan, Rennes, Riom, Ducos ou encore Remire-Montjoly.

Certaines synchronicités sont stupéfiantes : j’avais prévu de visiter ce jour-là la maison d’arrêt de Dijon, aux côtés des personnels et des syndicats. Cette visite faisait écho au plan de lutte contre les objets illicites en prison que vous aviez annoncé et qui constituait une réponse plus qu’urgente, bien que tardive, pour Dijon, Rennes et d’autres prisons.

Vous avez également parlé de choc de sécurité. Il faut vous dire le choc qu'ont ressenti les personnels pénitentiaires et les syndicats suite à cette double évasion, qui s'est produite malgré les alertes nombreuses qu'ils avaient lancées ces derniers mois. Je tiens ici à saluer le professionnalisme des agents pénitentiaires et la dignité dont ils font preuve pour maintenir ce service public essentiel. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Erwan Balanant et M. Jean-Victor Castor applaudissent également.) Je salue également les forces de l’ordre, toujours à la recherche du second détenu.

Monsieur le ministre, je note une injonction paradoxale dans vos propos et interventions récents : en réponse aux évasions, vous restreignez les sorties collectives pensées pour préparer la réinsertion et limiter les récidives. Dans le même temps, vous semblez inciter à des libérations anticipées, faute de places et de moyens.

C’est donc votre cohérence que je mets en question. Rassurez les personnels pénitentiaires et les Français en nous précisant clairement quels moyens et quelles mesures vous entendez déployer à court, moyen et long terme, pour que « la conception de la prison [soit], bien sûr, la sanction, mais aussi l’amendement et la réinsertion », comme le disait avec force Robert Badinter. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

Mme la présidente . La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux, ministre de la justice . Je veux dire comme vous mon soutien aux agents pénitentiaires, notamment ceux de la maison d'arrêt de Dijon, qui travaillent en effet dans une prison particulièrement vétuste, dont les difficultés qui caractérisent les conditions de vie des détenus et surtout les conditions de travail des agents pénitentiaires ne sont pas dignes d'une grande démocratie comme la nôtre.

C'est d'ailleurs pour cela qu'il y a cinq semaines, avant même cette évasion, j'ai obtenu de M. le premier ministre, notamment pour la maison d'arrêt de Dijon – cela a alors fait l'objet de publications, y compris dans la presse locale –, que soient menés des travaux d'urgence. Six millions d'euros y seront consacrés pour le seul établissement de Dijon. Il s'agit de lutter contre les drones et les projections de drogue, de téléphones et de couteaux en céramique dont pâtissent les agents pénitentiaires, dans une prison vétuste qui, comme beaucoup de prisons françaises, n'a pas connu de travaux depuis longtemps.

Vous dites, madame la députée, que nous devons disposer de moyens supplémentaires. Je ne peux que vous encourager à soutenir le budget du ministère de la justice pour l'année prochaine (M. Ugo Bernalicis s'exclame), qui prévoit 1 000 agents supplémentaires alors qu'il en manque 4 000. Ne pas le voter, c'est priver les agents pénitentiaires de la maison d'arrêt de Dijon et de toutes les prisons de France de collègues qui les soutiendraient et les encourageraient.

Ce budget augmente également de 300 millions d'euros les montants consacrés aux travaux et à la construction de prisons qui nous manquent. S'il y a une injonction paradoxale, madame la députée, c'est la vôtre : vous faites malheureusement partie d'un groupe politique représentant un parti qui, lorsqu'il était aux responsabilités sous le président Hollande, a instauré un moratoire sur toutes les constructions de places de prison. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)

M. François Hollande . Ce n'est pas vrai !

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux . Vous n'en avez ouvert que 923 alors que, depuis six ans, les gouvernements qui se sont succédé en ont créé plus de 6 000.

M. Ugo Bernalicis. Régulation carcérale !

M. Pierre-Yves Cadalen. Vous fermez les écoles et vous ouvrez des prisons ! Bravo !

Données clés

Auteur : Mme Océane Godard

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Lieux de privation de liberté

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 24 décembre 2025

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