Question au Gouvernement n° 481 :
Moyens alloués à la justice

17e Législature

Question de : Mme Estelle Mercier
Meurthe-et-Moselle (1re circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 13 mars 2025


MOYENS ALLOUÉS À LA JUSTICE

Mme la présidente . La parole est à Mme Estelle Mercier.

Mme Estelle Mercier . La semaine prochaine, nous examinerons dans l'hémicycle la loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic. Nous partageons le constat alarmant et l'urgence de la situation parfaitement décrits dans le rapport sénatorial de notre collègue socialiste Jérôme Durain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.) Cette loi est ambitieuse et nécessaire mais notre justice est fragile. Sans moyens supplémentaires, elle sera inefficace.

La France est notoirement sous-dotée, avec à peine trois magistrats pour 100 000 habitants – c'est quatre fois moins que la moyenne européenne. Malgré la loi de programmation qui n'offre qu'un effet de rattrapage, notre système de justice s'embolise de jour en jour et les dossiers mettent toujours plus de temps à être traités. Au tribunal judiciaire de Nancy – dans ma circonscription –, les délais s'élèvent désormais à trois ans pour le jugement des dossiers criminels. Il manque près de dix magistrats dans le ressort de la cour d'appel et autant de greffiers ou d'assistants judiciaires.

Pourtant, nous disposons de l'une des huit juridictions interrégionales spécialisées de France – Jirs – véritable pierre angulaire dans la lutte contre le narcotrafic, mais qui travaille, elle aussi, avec des moyens trop limités. Enfin, la construction de la nouvelle cité judiciaire, annoncée en 2019 et qui devait ouvrir ses portes cette année, est au point mort. La justice se rend grâce à l'engagement sans faille des magistrats, des greffiers et des assistants, dans des salles minuscules, en sous-sol et dans un bâtiment où il pleut. Est-ce digne d'une grande démocratie ?

La justice a besoin d'un véritable plan Marshall. Monsieur le ministre de la justice, au-delà des effets d'annonce médiatiques auxquels vous nous avez habitués, quels moyens donnerez-vous réellement à la lutte contre le narcotrafic ? Que répondez-vous à tous ceux qui, à Nancy, attendent que la nouvelle cité judiciaire voie enfin le jour ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe EcoS.)

M. Dominique Potier . Bravo !

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Gérald Darmanin, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice . Je suis heureux de constater que vous allez soutenir le texte visant à lutter contre le narcotrafic, alors qu'en commission, vous n'avez pas voté celui pourtant proposé par le sénateur socialiste Durain et par le sénateur Blanc. Le débat aura lieu la semaine prochaine dans l'hémicycle. J'espère que nous pourrons avancer ensemble pour cette cause nationale qui mérite, comme au Sénat, de réunir l'unanimité des groupes politiques responsables ou en tout cas de s'en approcher.

Pour lutter contre le narcotrafic, nous avons besoin d'un parquet national, d'un régime de détention, de techniques de renseignement et de moyens supplémentaires alloués aux magistrats. Je suis sûr que nous arriverons à vous convaincre de changer votre vote, pour le bien des magistrats et de notre population.

S'agissant de l'augmentation du nombre de magistrats en Jirs, je partage votre préoccupation. C'est pourquoi, à la demande du premier ministre, j'ai annoncé que 150 magistrats supplémentaires par rapport aux prévisions de mon prédécesseur Éric Dupond-Moretti seraient directement affectés dans les Jirs et dans la création du parquet national anti-criminalité organisée. Dès le mois de septembre prochain, une quarantaine de magistrats seront envoyés dans les huit Jirs de France, notamment à Nancy, et une soixante supplémentaire viendra les renforcer au cours de l'année 2026. L'augmentation du nombre de magistrats du parquet comme du siège, en particulier à Nancy, sera donc substantielle.

Enfin, vous posez la question de la cité judiciaire de Nancy. Comme vous le savez, je viens d'arriver au ministère de la justice, mais je sais que sa réalisation est estimée à 120 millions d'euros. La ville doit acquérir un terrain pour un montant de 2,4 millions – j'ai échangé avec M. le maire à ce sujet. Nancy est évidemment une ville judiciaire très importante et sera considérée avec intérêt, conformément aux engagements pris par la collectivité et par mon prédécesseur. J'ai dit au maire de Nancy que je reviendrai vers lui et vers l'ensemble des élus la semaine prochaine pour discuter de l'ensemble des projets de cité judiciaire – il y en a vingt et un que je dois soumettre à l'arbitrage du premier ministre, parmi lesquels Bobigny et Marseille. J'aurai l'occasion de vous consulter après ces échanges. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)

Données clés

Auteur : Mme Estelle Mercier

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 mars 2025

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