Question au Gouvernement n° 959 :
Guerre civile au Soudan

17e Législature

Question de : Mme Nadège Abomangoli
Seine-Saint-Denis (10e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

Question posée en séance, et publiée le 5 novembre 2025


GUERRE CIVILE AU SOUDAN

Mme la présidente . La parole est à Mme Nadège Abomangoli.

Mme Nadège Abomangoli . Ils sont loin ; ils sont africains ; ils sont pauvres. L’Union africaine s’en lave les mains. Le bilan apocalyptique de la guerre civile soudanaise depuis 2023 s'élève pourtant à 150 000 morts, 13 millions de déplacés, des viols, la famine et le choléra. Le général Al-Bourhane, à la tête de l’armée dite régulière, et Hemetti, le chef des Forces de soutien rapide, massacrent et pillent. Pendant ce temps, l'Union européenne est aux abonnés absents et la diplomatie française elle aussi regarde ailleurs.

C’est l’ampleur des atrocités commises par les FSR à El-Fasher dans le Darfour du Nord qui a remis le Soudan au cœur de l’actualité médiatique et diplomatique. Les espoirs nés de la révolution citoyenne de 2019 sont noyés dans le sang par Hemetti et Al-Bourhane, putschistes ensemble en 2021, ennemis mortels à présent. Le commandant des Forces de soutien rapide, bourreau du Darfour, était pourtant devenu un interlocuteur privilégié de l’Union européenne en 2016, et il était mis en valeur dans la presse française jusqu’en 2023.

Les Nations unies dénoncent les ingérences étrangères, intéressées par l’or soudanais et les débouchés maritimes, dans la pire crise humanitaire au monde. Fin 2024, Amnesty International indiquait que du matériel militaire français était utilisé par les miliciens d’Hemetti. Comment est-ce possible ? J’ai interrogé par deux fois le gouvernement à ce sujet sans recevoir de réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Monsieur le ministre des affaires étrangères, devant de tels crimes contre l’humanité, le silence et l’inaction sont-ils devenus la ligne directrice de la diplomatie française ? Agirez-vous au sein du Conseil de sécurité de l’ONU pour un embargo total sur les armes élargi au-delà du Darfour, un cessez-le-feu et l'ouverture d’un corridor humanitaire ? (Mêmes mouvements.) Soutiendrez-vous la création d’une force d’interposition ? Soutiendrez-vous enfin les emergency rooms nominées pour le prix Nobel de la paix, ces forces d'intervention citoyennes qui luttent pour un pouvoir civil démocratique au Soudan ? (Applaudissements sur les bancs du LFI-NFP dont les députés se lèvent et sur quelques bancs du groupe SOC. – M. Jérémie Iordanoff applaudit également.)

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des affaires étrangères . Effectivement, c'est dans une grande indifférence que se déroule au Soudan l'une des guerres les plus meurtrières du monde, la crise humanitaire la plus grave du monde, un calvaire sans fin depuis deux ans et demi pour les Soudanaises et les Soudanais. Deux tiers de la population sont en situation d'urgence alimentaire ; il y a 13 millions de personnes déplacées, dont 4 millions d'enfants.

La France ne détourne pas le regard. Un an après le début de la guerre civile, c'est à Paris que la communauté internationale s'est réunie pour lever 2 milliards d'euros d'aide humanitaire au profit des populations soudanaises. Je me suis moi-même rendu l'année dernière dans les camps d'Adré, à la frontière entre le Soudan et le Tchad, où près de 300 000 réfugiés soudanais, dans des camps surpeuplés, tentent de trouver de l'aide et du soutien auprès des ONG et des agences des Nations unies que je suis allé encourager ; j'ai également vérifié le décaissement des sommes que nous avions levées. Cette année encore, pour le deuxième triste anniversaire de cette guerre, la France coprésidait à Londres une conférence humanitaire sur le Soudan.

Vous l'avez dit, depuis quelques jours, la situation s'est dégradée plus encore avec la prise par les Forces de soutien rapide de la ville d'El-Fasher. De nombreuses exactions ont été commises depuis : 2 000 personnes auraient été froidement exécutées ; 460 ont été tuées dans l'assaut mené par les Forces de soutien rapide contre une maternité il y a quelques jours. Nous condamnons les atrocités à caractère ethnique menées par les Forces de soutien rapide ; nous les exhortons à mettre fin à leur offensive militaire dans le nord du pays ; nous appelons toutes les parties à cesser tout soutien militaire à l'égard à l'égard des belligérants et nous exigeons le respect du droit international et du droit international humanitaire. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

M. Jean-François Coulomme . Et l'embargo ?

Mme la présidente . La parole est à Mme Nadège Abomangoli.

Mme Nadège Abomangoli . Vous n'avez pas répondu sur la question de l'embargo sur les armes. Il faut assécher le trafic d'armes au Soudan sinon notre action ne servira à rien. Par ailleurs, le budget de la diplomatie française est en baisse. Comment financerons-nous tout cela ? (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent. - Mmes Béatrice Bellay et Sandrine Rousseau applaudissent également.)

Données clés

Auteur : Mme Nadège Abomangoli

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 5 novembre 2025

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