Suppressions massives de classes et des décharges de direction Paris
Question de :
Mme Sophia Chikirou
Paris (6e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Sophia Chikirou alerte Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur la baisse des moyens alloués par le Gouvernement à l'école publique. Cette austérité budgétaire a des conséquences directes comme les fermetures massives de classes prévues à la rentrée 2025, en particulier dans les quartiers populaires, ou la remise en cause du régime de décharge de direction dont bénéficient les écoles parisiennes. Dans le budget 2025 passé en force par 49.3, le Gouvernement a fait le choix de réduire de 200 millions d'euros le budget de l'éducation nationale, en contradiction totale avec les promesses faites par M. le Premier ministre de revenir sur son projet de suppression de 4 000 postes dans l'éducation nationale. Partout en France, des classes ferment, des postes d'enseignants sont supprimés et des professeurs ne sont pas remplacés. A Paris, ce ne sont pas moins de 110 postes de professeurs qui seront supprimés et près de 170 fermetures de classes qui ont été confirmées pour la rentrée 2025 lors du Conseil départemental de l'éducation nationale (CDEN) du 21 mars 2025. Ces suppressions concernent surtout les arrondissements populaires du nord et de l'est, alors que les quartiers favorisés, comme le 7e arrondissement, sont épargnés. L'école élémentaire REP (réseau d'éducation prioritaire), située au 77 rue de Belleville, en est un exemple édifiant. Malgré l'arrivée prévue de 22 élèves supplémentaires à la rentrée 2025 (portant les effectifs totaux de 176 à 198 élèves), cette école se voit pourtant imposer la suppression d'une classe (de 12 à 11 classes). Concrètement, cela implique dès 2025 une augmentation immédiate de 25 % des effectifs dans les classes non dédoublées et dès 2026, une situation intenable avec des classes de CE2, CM1 et CM2 pouvant atteindre 34 élèves, en totale violation des normes en vigueur pour les établissements REP et REP+. Parallèlement à la suppression des classes, le régime de décharge dont bénéficient les directrices et directeurs d'écoles parisiennes est également menacé par le Gouvernement, sans réelle concertation. Ce dispositif, jugé « essentiel à la réussite des enfants » par la Fédération des conseils de parents d'élèves elle-même, offre aux directeurs le temps d'assurer le bon fonctionnement pédagogique et administratif de leur établissement. Malgré l'annonce d'un moratoire arraché sous la pression d'une mobilisation massive 11 février 2025, aucune garantie concrète et pérenne n'a été apportée par le ministère, laissant ces personnels dans l'incertitude. En conséquence, elle souhaite savoir si elle entend revenir sur ces fermetures de classes injustes et garantir le maintien des décharges de direction à Paris.
Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025
SUPPRESSION DE CLASSES À PARIS
Mme la présidente . La parole est à Mme Sophia Chikirou, pour exposer sa question, n° 330, relative à la suppression de classes à Paris.
Mme Sophia Chikirou . Après avoir nié le résultat des élections législatives de juillet dernier et s'être maintenu au pouvoir contre le vote des Français, après avoir fait passer le pire budget de la Ve République par la force du 49.3, par la ruse et grâce à la trahison de certains sur ces bancs, votre gouvernement, composé de macronistes et de représentants de la droite jusqu'à l'extrême, est pris dans plusieurs scandales concernant le surfinancement de l'école privée.
Dans le budget de 2025, vous réduisez les crédits de l'éducation nationale de 200 millions d'euros, ce qui contredit totalement la promesse du premier ministre de revenir sur son projet initial de supprimer 4 000 postes. On voit clair dans votre jeu : vous dépouillez l'école publique, vous l'abaissez, vous la privez des moyens de la réussite ; ce faisant, vous portez atteinte à l'égalité républicaine.
Votre politique illégitime a des conséquences graves et immédiates : dès la rentrée 2025 sont ainsi prévues des fermetures massives de classes, tandis qu'est remis en cause le régime de décharge de direction dont bénéficient les écoles parisiennes.
Partout en France des classes ferment, des postes d’enseignants sont supprimés et des professeurs ne sont pas remplacés.
À Paris, pas moins de 110 postes de professeurs seront supprimés et près de 170 fermetures de classes ont été confirmées pour la rentrée 2025 lors du conseil départemental de l’éducation nationale du 21 mars. Ces suppressions concernent surtout les arrondissements populaires du nord et de l’est, alors que les quartiers favorisés, comme le 7e arrondissement, sont épargnés.
L’école élémentaire en réseau d'éducation prioritaire (REP) située au 77 rue de Belleville est un exemple édifiant. Malgré l’arrivée prévue de vingt-deux élèves supplémentaires à la rentrée 2025, vous y supprimez une classe. Concrètement, cela implique que, dès 2025, l'école connaîtra une augmentation immédiate de 25 % des effectifs dans les classes non dédoublées, et qu'elle se trouvera dès 2026 dans une situation intenable, avec des classes de CE2, CM1 et CM2 pouvant atteindre jusqu'à trente-quatre élèves, en violation totale des règles en vigueur dans les établissements en REP et REP+ – réseau d'éducation prioritaire renforcé.
En parallèle, le régime de décharge dont bénéficient les directrices et directeurs des écoles parisiennes est également menacé, sans concertation. Ce dispositif, jugé essentiel à la réussite des enfants par la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE), permet aux directeurs d'avoir le temps d’assurer le fonctionnement pédagogique et administratif de leur établissement. Le ministère a annoncé un moratoire à la suite de la mobilisation massive du 11 février dernier, mais il n'apporte aucune garantie concrète. Je ne peux pas ne pas vous rappeler le suicide d’une directrice, Mme Renon, en 2019 ; je ne peux pas non plus ne pas évoquer cette scène, dont j'ai été témoin, en février dernier, dans le 11e arrondissement, lorsqu'une directrice en larmes a interpellé la ministre de l'éducation nationale, lui faisant part de sa détresse.
Renoncerez-vous aux fermetures de classes qui aggraveront la situation et qui contreviennent aux règles applicables aux REP ? Recruterez-vous des remplaçants afin que chaque classe ait un professeur ? Respecterez-vous les directeurs et directrices d’école en maintenant les décharges de direction à Paris ?
Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire . Je me permets de vous répondre au nom de la ministre de l'éducation nationale, qui vous prie d'excuser son absence. Élisabeth Borne et moi-même comprenons votre inquiétude.
L'académie de Paris subira une baisse démographique importante à la rentrée prochaine,…
Mme Sophia Chikirou . C'est faux !
Mme Annie Genevard, ministre . …avec 3 200 élèves en moins pour le seul premier degré, ce qui permettra de réduire le nombre d’élèves par classe. L'académie de Paris présentera donc à la rentrée prochaine le meilleur taux d’encadrement de France métropolitaine, avec vingt élèves par classe en moyenne.
Vous mentionnez les inégalités sociales, qui sont aussi notre priorité. À Paris, en REP, huit élèves sur dix sont scolarisés dans des classes de moins de vingt élèves. Ce sera aussi le cas au sein de l’école élémentaire Belleville, labélisée REP, que vous évoquez : à la rentrée prochaine, ses six classes de CP et CE1 compteront quatorze élèves chacune, et les cinq classes de CE2, CMI et CM2, vingt élèves. Les fermetures prévues se traduiront donc non par une baisse mais bien par une hausse du taux d’encadrement.
Le régime dérogatoire dont bénéficient les seuls directeurs d’école publique de Paris est en vigueur depuis 1982 : il leur permet d'être déchargés de leur fonction d’enseignement à partir de cinq classes, contre douze classes ailleurs en France. Or, depuis 2019, la Ville de Paris n’a plus contribué à ce dispositif, occasionnant une perte sèche de 116 millions d’euros pour le ministère – une situation anormale épinglée par la Cour des comptes en septembre dernier. Élisabeth Borne a annoncé une concertation avec la Ville et les partenaires pour trouver une solution pérenne. Le moratoire dont vous parliez n'a donc pas été arraché au ministère, mais bien décidé après une concertation. L’annonce a d'ailleurs été accueillie favorablement par les organisations syndicales, et en premier lieu par l’association des directeurs d’école de Paris, avec qui le dialogue est engagé.
Mme la présidente . La parole est à Mme Sophia Chikirou.
Mme Sophia Chikirou . Si je vous pose cette question, c'est parce que je continue d'être interpellée à Paris par les directeurs et les directrices d'établissement, qui n'ont pas confiance dans les promesses du gouvernement. Au bout du compte, à Paris, la suppression de cinquante-deux postes de directeurs d'école est en jeu.
S'agissant de l'école Belleville, j'étais à leurs côtés juste avant les vacances, avec le directeur, avec le personnel et les parents d'élèves, qui manifestaient devant l'établissement : les chiffres que vous donnez ne correspondent tout simplement pas à la réalité ! Des inégalités scandaleuses subsistent à Paris et les moyennes que vous citez ne permettent pas de répondre aux besoins.
Auteur : Mme Sophia Chikirou
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement maternel et primaire
Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 avril 2025