
Mission d'information sur la situation démographique des outre-mer et le maintien des forces vives dans ces territoires
Jeudi 31 octobre 2024, la délégation aux outre-mer a créé une mission d’information relative à la situation démographique des outre-mer et au maintien des forces vives dans ces territoires. Elie Califer, Mikaele Seo et Jiovanny William en ont été nommés rapporteurs.
Mercredi 22 janvier 2025, la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale a autorisé la publication du rapport d’information sur la situation démographique des outre-mer et le maintien des forces vives dans ces territoires.
Cette mission avait été constituée pour la première fois en octobre 2022 par la délégation aux outre-mer de la XVIe législature. La dissolution de l’Assemblée nationale n’ayant pas permis de mener ce travail à son terme sous la XVIe législature, la délégation aux outre-mer a chargé les rapporteurs, tous trois réélus, de poursuivre la mission d’information reconstituée pour la XVIIe législature.
Le premier constat formulé par la mission est celui d’une grande diversité des situations démographiques des territoires ultramarins. Un premier groupe de territoires est caractérisé par un dépeuplement résultant de la fuite des forces vives et par une baisse de la natalité : c’est le cas des Antilles, mais aussi, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Wallis‑et‑Futuna et, depuis quelques années, de Saint-Martin.
Le second groupe se trouve dans une situation souvent qualifiée d’ « explosion démographique », laquelle a pour origines l’allongement de l’espérance de vie, la surreprésentation de la part de jeunes et un solde migratoire élevé ; cette situation se retrouve en Guyane et à Mayotte, mais aussi à Saint-Martin dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix. Entre ces deux pôles, les autres territoires connaissent des démographies en hausse de façon plus ou moins dynamique : Saint-Barthélemy, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et La Réunion, le plus peuplé des outre-mer.
Les rapporteurs constatent que la fiabilité du recensement est mise en cause par certains élus à Mayotte et en Guyane, territoires tous deux marqués par une expansion démographique très dynamique et une proportion significative d'habitat informel, plus difficile à recenser. Afin de remédier à ces difficultés, la mission appelle à mener un audit indépendant des méthodes de recensement en outre-mer, pour s’assurer qu’elles prennent pleinement en compte les spécificités de ces territoires.
La mission a souhaité mener une étude approfondie du phénomène des départs, qui concerne tous les territoires et qui a trait à l’identité et au vécu des ultramarins. Pour ce faire, les rapporteurs ont procédé à l’audition de plus de 50 personnes et se sont déplacés en Martinique, en Guadeloupe, à Saint-Martin et en Guyane, allant à chaque fois à la rencontre de jeunes ultramarins et recueillant leur témoignage.
Il ressort de ces échanges qu’en dépit d’un fort attachement à leur territoire, les jeunes en ont souvent une image dégradée, véhiculée notamment par les médias. Il ne s’agit pas seulement d’une « envie d’ailleurs », mais d’un découragement qui les empêche de se projeter dans les lieux où ils ont grandi. Afin de redonner de l’espoir aux jeunes, il est donc impératif de mieux communiquer sur les territoires, notamment sur les réseaux sociaux, afin de faire la promotion de leurs atouts et leurs réussites, en particulier économiques. Il convient également d’inciter le ministère en charge de l’enseignement supérieur et de la recherche à relayer, sur les réseaux sociaux, la communication en faveur des universités ultramarines.
Les expériences migratoires, notamment parce qu’elles concernent majoritairement des jeunes, ne sont pas toujours heureuses. Pour un jeune étudiant ultramarin, surtout s’il n’a jamais quitté son territoire d’origine, se retrouver brutalement dans l’hexagone, seul, loin de sa famille et de ses habitudes, peut s’apparenter à un traumatisme. Afin d’éviter un décrochage définitif, les rapporteurs recommandent notamment d’étendre la prise en charge d’un billet d’avion aller/retour en cours d’année universitaire à l’ensemble des étudiants.
Dans des territoires où le tissu économique est essentiellement composé de très petites entreprises (TPE), l’existence d’une offre suffisante de formation professionnelle est essentielle. L’apprentissage, constituant par nature un pont entre l’enseignement et les entreprises dans des territoires où ce lien est fondamental, y joue donc un rôle particulièrement important. C’est pourquoi les rapporteurs recommandent la mise en place de plateformes locales en ligne regroupant les offres et les demandes d’apprentissage. En outre, afin de d’élargir les possibilités offertes aux jeunes ultramarins, il convient d’enclencher au plus vite le processus visant à conclure des accords d’apprentissage transfrontaliers avec les États voisins des territoires ultramarins.
La mission s’est penchée sur les différents dispositifs proposés aux ultramarins qui souhaitent « revenir au pays », dans le but d’en examiner l’efficacité : programme « cadres d’avenir » ; pour les fonctionnaires, reconnaissance d’un « centre des intérêts matériels et moraux » (CIMM) en outre-mer et concours nationaux à affectation locale (CNAL) ; mais aussi « passeport pour le retour », créé par la loi de finances pour 2024 et restant à concrétiser.
Sur ce sujet particulièrement important pour les territoires ultramarins, les rapporteurs proposent notamment :
- d’élargir la procédure de recrutement par CNAL à de nouveaux corps de la fonction publique, notamment les corps généralistes ;
- d’autoriser l’organisation de CNAL à l’échelle des bassins régionaux, dans un espace géographique regroupant plusieurs collectivités ultramarines situées dans la même zone ;
- de créer un institut régional d’administration (IRA) dans un territoire d’outre-mer ;
- de prévoir, dans chaque territoire, une réunion du comité régional de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Crefop) par trimestre afin de mieux coordonner, dans chaque territoire, les politiques d'orientation, de formation professionnelle et d'emploi.