Question orale n° 100 :
Centre hospitalier de Brocéliande

16e Législature

Question de : Mme Claudia Rouaux
Ille-et-Vilaine (3e circonscription) - Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES)

Mme Claudia Rouaux appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur l'avenir du site de Saint-Méen-le-Grand relevant du centre hospitalier de Brocéliande à la suite de la fermeture du service de soins de suite et de réadaptation (SSR), dont la préservation était pourtant actée lors de la fusion des hôpitaux de Montfort-sur-Meu et de Saint-Méen-le-Grand, en Ille-et-Vilaine. La fermeture de ce service médical, qui comprenait des lits de SSR, dont 6 dédiés à des patients atteints de sclérose en plaques, est une situation dramatique pour ce territoire rural qui suscite de fortes et légitimes inquiétudes des élus locaux, des professionnels de santé et de la population. Cette situation fait suite à la démission d'un médecin et aux difficultés de recrutement d'un médecin généraliste ou gériatre SSR à orientation neurologique. Si des efforts sont déployés afin de préserver ce service médical, il subsiste des obstacles afin de donner une suite favorable à des candidatures de médecins étrangers hors UE. Un montage de service associant des praticiens d'origine étrangère et un temps de supervision à distance avec le CHU de Rennes pourrait constituer une solution, parmi d'autres pistes. Si l'article R. 6152-902 du code de la santé publique prévoit que « les praticiens associés exercent leurs fonctions par délégation, sous la responsabilité directe du praticien responsable de la structure dont ils relèvent ou de l'un de ses collaborateurs médecin, chirurgien, odontologiste ou pharmacien. », la difficulté dans ce cas réside dans le fait qu'il n'y a pas de praticien responsable du service SSR à Saint-Méen-le-Grand pour encadrer un praticien d'origine étrangère dans le cadre d'un parcours de consolidation des compétences. Afin de renforcer l'attractivité et de maintenir des services médicaux en milieu rural, elle souhaiterait donc connaître les intentions du Gouvernement pour assouplir des aspects réglementaires sur le recrutement de praticiens associés étrangers, en particulier face au risque de fermeture de services médicaux dans des territoires menacés par la désertification médicale, tout en garantissant l'accompagnement et la prise en charge des patients.

Réponse en séance, et publiée le 11 janvier 2023

CENTRE HOSPITALIER DE BROCÉLIANDE
Mme la présidente. La parole est à Mme Claudia Rouaux, pour exposer sa question, n°  100, relative au centre hospitalier de Brocéliande.

Mme Claudia Rouaux. Je souhaite vous alerter sur l'avenir du site de Saint-Méen-le-Grand relevant du centre hospitalier de Brocéliande, dit CHB, en Ille-et-Vilaine, en Bretagne.

Le CHB est né le 1er janvier 2022 de la fusion des hôpitaux de Montfort-sur-Meu et de Saint-Méen-le-Grand, et comprend une direction commune avec le centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes. Situé aux confins de trois départements bretons, il a récemment été labellisé hôpital de proximité. Il comprenait une offre sanitaire et médico-sociale, avec quarante lits en service de soins de suite et de réadaptation – SSR –, dont six dédiés à des patients atteints de sclérose en plaques. Depuis le 1er octobre 2022, ce service est fermé à la suite du départ du médecin en exercice et des difficultés rencontrées pour en recruter un nouveau. Cette situation dramatique pour ce territoire rural très éloigné de la métropole rennaise suscite de fortes et légitimes inquiétudes chez les élus locaux, les professionnels de santé et la population. Du reste, le 12 novembre, une marche citoyenne a réuni près de 1 000 personnes pour défendre l'hôpital et protester contre la fermeture de ce service médical.

Il est regrettable que toutes les pistes n'aient pas été explorées de manière suffisamment anticipée. Pourtant, elles existent. D'une part, on aurait pu créer un service associant des praticiens d'origine étrangère et une supervision à distance par le CHU de Rennes en assouplissant les conditions d'accès au statut de praticien à diplôme hors Union européenne – Padhue – et en allégeant les procédures d'examen des dossiers par le Centre national de gestion pour accélérer leur traitement. D'autre part, on pourrait envisager un projet mixte associant des médecins libéraux du territoire, comme c'est le cas à Janzé, commune d'Ille-et-Vilaine. Ce dispositif fonctionne bien.

Lors de la fusion, l'engagement a été pris de construire un nouvel hôpital à Saint-Méen comprenant trente lits en SSR, dont huit réservés aux patients atteints de sclérose en plaques, douze à orientation neurologique et dix polyvalents. Si un service de médecine ne rouvre pas, c'est l'avenir même du site hospitalier de Saint-Méen qui nous préoccupe. Après avoir fermé ce service et redéployé l'ensemble du personnel, quels engagements le Gouvernement compte-t-il prendre pour garantir sa réouverture, et plus largement l'accès aux soins dans les territoires ruraux ? La population a le sentiment d’être abandonnée et attend à juste titre des réponses concrètes.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. L'activité de SSR du centre hospitalier de Brocéliande sur le site de Saint-Méen-le-Grand se heurte à des difficultés importantes, faute de personnel. Aussi l'établissement a-t-il été contraint de la suspendre temporairement depuis le mois d'octobre. Les patients nécessitant encore une hospitalisation en SSR ont été orientés vers le centre hospitalier de Montfort-sur-Meu. Le suivi médical des patients restants est assuré par le médecin généraliste de la commune avec l'appui du CHU de Rennes.

L'agence régionale de santé (ARS) et le centre hospitalier de Brocéliande ont exploré la possibilité d'une organisation médicale associant des médecins à diplôme étranger et une supervision à distance par des praticiens du CHU de Rennes. Les structures d'accueil dans le cadre du dispositif prévu pour les Padhue sont soumises à une condition unique de validation. Elles doivent répondre de la présence d'au moins un praticien de plein exercice qualifié dans la spécialité à temps plein dans le service. Cette condition permet d'assurer la sécurité des soins et la formation des praticiens qui accomplissent leur parcours de consolidation des compétences – PCC.

L'absence d'un praticien responsable au service de SSR de Saint-Méen-le-Grand pour encadrer un praticien d'origine étrangère ne permet pas d'envisager actuellement cette hypothèse de travail. Les conditions requises pour l'accueil de Padhue lors de l’accomplissement de leur PCC sont conçues pour être suffisamment souples pour les structures tout en garantissant la sécurité des patients et la qualité de la formation des Padhue.

Le ministère est conscient de la situation liée à l'apport de praticiens étrangers dans un contexte de tension sur les effectifs de médecins. C'est pourquoi le projet de loi relatif à l'immigration servira de support à des dispositions permettant l'amélioration et la fluidification du dispositif d'intégration de ces praticiens.

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudia Rouaux.

Mme Claudia Rouaux. Je ne doute pas de la volonté d'essayer de rouvrir ce service médical. Néanmoins, chaque jour, on nous annonce la fermeture de services de médecine en territoire rural, afin essentiellement de déployer des effectifs au CHU de Rennes. Dans quelques années, les personnes vivant dans les territoires ruraux n'auront plus accès aux soins.

Alors que le prix du litre de gasoil ou d'essence atteint 2 euros, il va devenir impossible de parcourir une distance aller-retour de 100 kilomètres pour voir son conjoint ou son enfant à l'hôpital. Dans les territoires ruraux, souvent, les personnes sont relativement pauvres. On ne peut pas dire d'un côté qu'on entend la population et, de l'autre, ne pas garantir l'accès à la santé dans toute la France.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Je le redis : 87 % du territoire français sont un désert médical, et le plus grand de ces déserts est l'Île-de-France. Néanmoins, si le ministère délégué dont j'ai l'honneur d'avoir la charge s'intitule « organisation territoriale et des professions de santé », c'est justement parce que le Président de la République et la Première ministre ont bien conscience que la même réponse ne peut être donnée en Île-de-France, dans votre territoire et dans les territoires ruraux. Nous donnerons une réponse adaptée à chaque territoire, dont les modalités prendront en considération l'évolution de notre société.

Un médecin ne s'installera plus dans un village. Avec les collectivités, nous devons donc développer le « aller vers » et l'organisation de l'offre de soins à l'échelle d'un territoire. Je le répète : 87 % de la France est un désert médical. Nous n'abandonnons pas les territoires ruraux, mais la réponse donnée ne peut être la même que celle apportée à une région comme l'Île-de-France.

Données clés

Auteur : Mme Claudia Rouaux

Type de question : Question orale

Rubrique : Établissements de santé

Ministère interrogé : Santé et prévention

Ministère répondant : Santé et prévention

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 janvier 2023

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