Question écrite n° 10194 :
Prise en charge des décasages à Mayotte

16e Législature
Question signalée le 9 octobre 2023

Question de : Mme Estelle Youssouffa
Mayotte (1re circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires

Mme Estelle Youssouffa interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer, sur le surcout des « décasages » (destruction des bidonvilles) qui sont directement amputés sur les ressources des collectivités territoriales. En 2022, 1 652 décasages ont eu lieu à Mayotte dont chaque opération coûte 1 500 euros aux municipalités. De ce fait, malgré les premiers échanges réalisés, il est nécessaire de porter à l'attention du ministre le maintien d'une zone grise dans le cadre de l'article 197 de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi dite « Elan »), qui dans les faits font payer le coût de la destruction des bidonvilles aux collectivités territoriales de Mayotte. Par conséquent, elle souhaite l'interroger sur la clarification des différentes dispositions afin qu'il n'y ait plus de prise en charge réelle, directe et indirecte de ces coûts par les collectivités territoriales.

Réponse publiée le 31 octobre 2023

Face à l'ampleur de l'expansion des constructions illégales par des propriétaires sans droit ni titre en Guyane et à Mayotte, l'article 197 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, dite loi ELAN, crée un nouvel outil juridique au profit des préfets de ces deux territoires, leur permettant de prononcer la démolition de poches d'habitats illégaux sans ordonnance préalable du juge judiciaire ou administratif. Pour garantir les droits des occupants, en premier lieu, l'article 197 prévoit un délai minimal d'un mois pour procéder à l'évacuation et une obligation pour le préfet de proposer à chaque occupant une solution de relogement ou d'hébergement d'urgence. En second lieu, il prévoit une procédure plus courte (dite "de flagrance") en cas d'édification en cours d'une construction illégale, pour permettre au préfet d'interrompre ces constructions. Les maires sollicitent la préfecture pour la mise en place de cette procédure. Le choix du site est réalisé en fonction des priorités d'actions du préfet ou de la collectivité demandeuse et répond à un ou plusieurs objectifs : prévenir des risques naturels ou périls, lutter contre l'insécurité publique et créer des aménagements ou infrastructures. 1 - Cadrage budgétaire et financement L'action 1 du programme 123 « conditions de vie outre-mer » est consacrée au logement : en effet, afin de mieux prendre en compte les particularités de chaque collectivité territoriale d'outre-mer, l'intervention de l'État dans le domaine du logement et de la résorption de l'habitat insalubre relève, depuis 1997, de la responsabilité du ministère chargé des outre-mer. L'action 1 du BOP 123 dite « Ligne budgétaire unique » (LBU) couvre six activités principales : - estimation des besoins et apport en ingénierie ; - logement social et actions foncières ; - amélioration de la sécurité du parc social antillais à l'égard du risque sismique ; - accession sociale à la propriété et amélioration du parc privé ; - accompagnement des politiques urbaines d'aménagement et de rénovation ; - résorption de l'habitat insalubre et informel. Par ailleurs, l'action 4 du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » vise à améliorer la cohésion sociale et à favoriser l'égalité des chances outre-mer. Ainsi, les enquêtes sociales réalisées dans le cadre de l'élaboration des arrêtés préfectoraux loi Elan sont financées sur cette ligne par la direction de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DEETS) de Mayotte. Il est notable que, si la politique du logement en outre-mer est supportée par le programme 123, la politique de l'hébergement, du parcours vers le logement et de l'insertion des personnes vulnérables relève du programme 177, dont l'action 12 « hébergement et logement adapté » représente la plus grande partie. Ce programme vise à permettre l'accès au logement tout en garantissant une réponse aux situations d'urgence qui soit la plus adaptée aux besoins. Il s'inscrit dans un contexte où la demande de mise à l'abri exprimée demeure très élevée. L'essentiel du programme finance ainsi des places d'hébergement en fonctionnement. En conséquence, pour la mise en œuvre des dispositions de l'article 197 de la loi dite ELAN, plusieurs programmes budgétaires ministériels sont sollicités : - Le P123 action 1 : au titre de la résorption de l'habitat insalubre et informel par la mobilisation de la LBU pour ce qui relève des coûts de démolition, - Le P177 pour l'hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables, pour ce qui relève de la prise en charge des hébergements des personnes concernées par les opérations de démolition. En 2022, six opérations ont été réalisées (450 cases) pour un montant de 2 M€. Depuis janvier 2023, dix opérations ont été réalisées (608 cases) pour un montant estimé à 3 M€. La lutte contre ce type de constructions nécessite une action forte et concertée de la part de l'ensemble des pouvoirs publics. Le maire, en tant que garant de la police de l'urbanisme sur son territoire, est le premier et principal échelon de cette lutte. L'expérience démontre qu'il lui est nécessaire d'intervenir le plus rapidement possible dès l'apparition des premières velléités d'infraction : sa première responsabilité est d'intervenir en flagrance en vertu de ses pouvoirs de police. A cet égard, les agents des collectivités ont été formés pour intervenir notamment ceux de la ville de Mamoudzou et de Koungou. Par ailleurs, les polices municipales de Mayotte sont financées et formées par la direction de l'aménagement, du logement et la mer de Mayotte (DEALM) concernant le volet urbanisme, ce qui participe à leurs capacités d'action dans le domaine du logement et de la résorption de l'habitat insalubre (RHI). Enfin, la contribution de 1 500 € des municipalités aux opérations ELAN ne concerne que les démolitions menées dans le cadre des opérations de flagrance, encore peu nombreuses. Le constat de flagrance relève de la responsabilité des seules collectivités, raison pour laquelle cela n'est pas pris en charge par la LBU. Concrètement, les polices municipales ou intercommunales constatent l'édification de locaux en cours et sollicitent immédiatement le concours de la force publique pour encadrer la démolition qui est réalisée soit en régie par la commune, soit par des entreprises extérieures. Seize constructions ont été démolies avec concours de la force publique : Koungou : 8Dembéni : 2Ouangani : 3Bandrélé : 2Chirongui : 1

Données clés

Auteur : Mme Estelle Youssouffa

Type de question : Question écrite

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Outre-mer

Ministère répondant : Outre-mer

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 9 octobre 2023

Dates :
Question publiée le 18 juillet 2023
Réponse publiée le 31 octobre 2023

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