Question de : M. Christophe Naegelen (Grand Est - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires)
M. Christophe Naegelen attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur le transfert de charges vers les complémentaires santé. Le montant de ce transfert de charges, initialement annoncé à 300 millions d'euros, a finalement atteint les 500 millions et constitue une hausse du ticket modérateur, c'est-à-dire de la part non remboursée par l'assurance maladie sur tous les actes des chirurgiens-dentistes, passant de 30 % à 40 % dès octobre 2023. Cette décision, prise sans avoir réuni en amont le Comité de dialogue avec les organismes complémentaires établi en octobre 2022, par M. le ministre de la santé et de la prévoyance, transfère aux complémentaires santé une charge de 500 millions d'euros. Elle entraîne également une hausse des cotisations complémentaires pour les usagers et un paiement direct pour les 4 % de la population ne disposant pas d'une complémentaire santé. À travers ce transfert, la dimension solidaire des politiques de santé est remise en question et risque d'impacter fortement les Français les plus précaires, qui sont déjà plus susceptibles de renoncer aux soins dentaires. De plus, les personnes souscrivant à des contrats individuels, comme les personnes sans emploi, âgées ou malades seront également impactées, car leurs tarifs n'étant pas négociés, aucune prise en charge de leurs cotisations n'est possible, au contraire des salariés qui bénéficient, eux, de contrats collectifs obligatoires. Même s'il est trop tôt pour estimer l'augmentation du prix pour les patients, cette hausse du ticket modérateur impactera directement les Français les plus fragiles, qui seront amenés à renoncer encore davantage à ces soins, alors qu'ils représentent les cibles prioritaires des politiques de prévention. De ce fait, il est crucial de rappeler la nécessité de définir les sujets structurels relatifs à la rénovation du système de santé, en instaurant un véritable dialogue. Ainsi, il lui demande ce que le Gouvernement compte faire pour éviter aux citoyens, notamment les plus précaires, de faire face à une hausse de leurs cotisations complémentaires, qui entraînera in fine la renonciation à certains actes dentaires et chirurgicaux.
Réponse publiée le 5 mars 2024
La mesure visant à diminuer la prise en charge, par l'assurance maladie obligatoire, des soins bucco-dentaires, poursuit plusieurs objectifs dont le rééquilibrage de la part des dépenses entre l'assurance maladie obligatoire et les complémentaires santé dans la Consommation de soins et de biens médicaux (CSBM) et la possibilité donnée aux complémentaires santé de prendre une part plus importante dans l'ensemble de la chaîne des soins dentaires, de la prévention à la réparation. La mesure ne remet pas en cause le remboursement des soins bucco-dentaires, elle ajuste les niveaux de participation entre les Assurances maladie obligatoires (AMO) et les Assurances complémentaires obligatoires (AMC). L'assuré bénéficiera donc pour ces soins, comme cela était le cas jusqu'à aujourd'hui, d'une prise en charge par l'assurance maladie obligatoire d'une part et d'une prise en charge par sa complémentaire santé pour le reste à charge d'autre part. Par conséquent, l'impact direct de cette mesure est neutre pour 96 % de la population qui bénéficie d'une assurance santé complémentaire, individuelle ou collective, pour financer les dépenses non couvertes par l'assurance maladie obligatoire et comprises dans les garanties des contrats responsables. Concernant le montant des cotisations prévues par les complémentaires santé pour couvrir les garanties qu'elles proposent à leurs clients, ces garanties relèvent de la liberté contractuelle des complémentaires santé. Toutefois, plusieurs dispositifs ont été mis en place par le Gouvernement afin de limiter l'augmentation des cotisations des complémentaires santé en fonction de la situation de l'assuré : - l'encadrement tarifaire par le décret n° 2017-372 du 1er juillet 2017 qui permet aux anciens salariés ayant bénéficié d'une couverture santé d'entreprise de conserver cette portabilité durant un an à compter de la fin du contrat de travail ; - pour les retraités du secteur privé, les dispositions de l'article R. 912-2 du code de la sécurité sociale prévoient que les branches mettant en place une recommandation peuvent notamment prévoir "une prise en charge, totale ou partielle, de la cotisation de tout ou partie […] des anciens salariés." ; - pour les retraités de la fonction publique, le décret n° 2022-633 du 22 avril 2022 prévoit qu'ils pourront demander à être bénéficiaires du contrat collectif souscrit par son dernier employeur, avec un dispositif de plafonnement de leur cotisation et un encadrement de son évolution en fonction de l'âge. Par ailleurs, l'assuré peut mobiliser la résiliation infra-annuelle. En effet, la loi n° 2019-733 du 14 juillet 2019 relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé permet aux assurés de résilier, après un an de souscription, leur contrat de complémentaire santé, à tout moment, sans frais ni pénalité. Par ce biais, il est permis aux assurés de résilier un contrat inadapté ou trop coûteux s'ils ont connaissance d'une offre plus avantageuse ou mieux adaptée à leurs besoins, dès lors qu'un délai minimal de couverture d'un an est respecté. Ces dispositions visent notamment à augmenter la concurrence sur ce marché et inciter à une baisse des tarifs. Pour éclairer le choix d'un nouveau contrat, la mise en œuvre de la résiliation infra-annuelle pour les contrats de complémentaire santé s'est accompagnée, en parallèle, de travaux visant à améliorer la lisibilité et la comparabilité des contrats. L'assuré peut également se rapprocher de son organisme complémentaire afin de renégocier son contrat en adaptant ou supprimant des garanties inutilisées pour faire varier le montant des cotisations à la baisse. Enfin, pour les populations aux revenus plus faibles, a été mise en place la Complémentaire santé solidaire (C2S). Elle permet la prise en charge de la part complémentaire des frais de santé, à titre gratuit ou avec une faible participation en fonction de leurs revenus. A cet égard, l'article 21 du PLFSS vise à élargir la couverture de la C2S en mettant en place : - une présomption de droit à la C2S avec participation financière à la majorité des nouveaux bénéficiaires de l'Allocation adulte handicapé (AAH), de l'Allocation de solidarité spécifique (ASS), de l'Allocation supplémentaire d'invalidité (ASI) et de l'Allocation contrat d'engagement jeune (ACEJ) sous certaines conditions précisées dans la loi ; - un renouvellement automatique du droit quand leur situation reste inchangée. Cette mesure participe de l'effort visant à améliorer la couverture santé des allocataires de minima sociaux, qui peut encore être améliorée. Elle s'inscrit dans la continuité des efforts du Gouvernement : depuis le 1er janvier 2022, les bénéficiaires du Revenu de solidarité active (RSA) bénéficient automatiquement de la C2S gratuite.
Auteur : M. Christophe Naegelen (Grand Est - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires)
Type de question : Question écrite
Rubrique : Assurance complémentaire
Ministère interrogé : Santé et prévention
Ministère répondant : Travail, santé et solidarités
Dates :
Question publiée le 12 septembre 2023
Réponse publiée le 5 mars 2024