16ème législature

Question N° 11306
de M. Guillaume Vuilletet (Renaissance - Val-d'Oise )
Question écrite
Ministère interrogé > Travail, plein emploi et insertion
Ministère attributaire > Travail, plein emploi et insertion

Rubrique > accidents du travail et maladies professionne

Titre > Sur la nécessité de protéger les salariés contre les maladies respiratoires

Question publiée au JO le : 19/09/2023 page : 8264
Réponse publiée au JO le : 05/12/2023 page : 11022

Texte de la question

M. Guillaume Vuilletet attire l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion concernant la nécessité de protéger les salariés contre les maladies respiratoires. À ce jour, les maladies professionnelles graves, voire mortels, dans certains secteurs sont toujours très nombreuses, y compris auprès de salariés portant des masques. Dans ce cadre, la question du risque respiratoire doit être évoquée. Selon les recommandations de l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS) de 2017 et de l'Association française de normalisation (AFNOR), il serait pertinent d'imposer un test d'ajustement des masques chaque année pour chaque professionnel exposé à ces risques respiratoires afin de vérifier que le masque est bien porté et, de ce fait, étanche. De nombreux pays, tels que les États-Unis d'Amérique et le Royaume-Uni, ont déjà rendu ce test obligatoire pour tous les types de masques. La conception des équipements de protection individuelle (EPI) respiratoires est réalisée de manière à s'adapter à la morphologie de chaque individu. Afin d'assurer une protection adéquate, ces dispositifs sont conçus pour être ajustés de manière optimale au visage de chaque utilisateur. Bien qu'actuellement obligatoire en France pour les protections respiratoires en présence de fibres d'amiante, ce test est peu pratiqué dans d'autres situations. De plus, un décret du 23 décembre 2021 prévoit de réduire progressivement les valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP) aux poussières des salariés exerçant leur activité dans des locaux à pollution spécifique. Il s'agit des locaux au sein desquels les travailleurs sont exposés à des substances dangereuses, le texte visant en particulier les poussières dites « sans effet spécifique ». À compter du 1er juillet 2023, les concentrations moyennes ne doivent pas dépasser 4 mg/m3 d'air pour les poussières totales et 0,9 mg/m3 d'air pour les poussières alvéolaires. Par ailleurs, la VLEP du cristallin (organe de l'œil) aux rayonnements ionisants est abaissée à 20 mSv à compter du 1er juillet 2023. À titre transitoire, du 1er juillet 2018 au 30 juin 2023, la valeur limite cumulée était fixée à 100 mSv, pour autant que la dose reçue au cours d'une année ne dépasse pas 50 mSv. Enfin, à compter du 11 juillet 2023, la VLEP à l'acide arsénique et ses sels, ainsi que ses composés inorganiques (fraction inhalable), pour le secteur de la fusion du cuivre, sera fixée à 0,01 mg/m3. Cela rend encore plus critique la responsabilité des acteurs des secteurs les plus exposés. Il lui demande quelles mesures il compte prendre pour garantir la sécurité des travailleurs exposés aux risques respiratoires.

Texte de la réponse

A titre liminaire, il convient de préciser que les services du ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion,  ne disposent pas d'éléments statistiques probants permettant de relier des maladies respiratoires graves et mortelles au port d'un masque par les salariés dans leur activité professionnelle. A supposer que cette information existe, elle ne permettrait pas de savoir si le test d'ajustement serait de nature à éliminer le risque, de nombreux facteurs entrant en ligne de compte pour conférer une protection effective au salarié qui porte un masque tels que l'intégrité et la qualité du masque lui-même et de ses composants, son adéquation au risque mais aussi aux caractéristiques de l'activité réelle du salarié, le choix du filtre (son bon renouvellement, son état de conservation…), le facteur de protection assigné (FPA) du masque, etc.  Des travaux sont actuellement menés avec l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS) sur les facteurs de protection assignés des masques, tous types de risques confondus. Ces travaux visent à réaliser un état des lieux ainsi qu'une mise à jour des FPA, mais également à déterminer des FPA pour les masques n'en disposant pas actuellement. Ceci permettra aux employeurs de choisir l'appareil de protection respiratoire le plus approprié.  Par ailleurs, l'efficacité de la protection conférée par un masque ne repose pas seulement sur la performance technique et l'adéquation physiologique. Des considérations liées au port effectif de l'équipement (acceptabilité liée à la durée de port, à la pénibilité et aux exigences de l'usage), à l'efficience de la formation dispensée par l'entreprise aux travailleurs et aux responsables, la vigilance de l'encadrement, la performance du processus de maintien en état des masques, sont susceptibles d'affecter voire de compromettre la protection effective du travailleur.  C'est pourquoi les principes généraux de prévention énoncés à l'article L. 4121-2 du code du travail prescrivent aux employeurs de prioriser l'évitement des risques ainsi que la détermination de mesures de protection collectives adéquates, complétées, de manière résiduelle, par des mesures de protection individuelles.  Le ministère chargé du travail a récemment abaissé plusieurs Valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP), en a créé de nouvelles et a transformé certaines VLEP indicatives en VLEP contraignantes afin de renforcer la protection de la santé des travailleurs.  En outre, la France s'est beaucoup investie dans l'amélioration de la réglementation européenne et notamment dans les travaux de révision de la directive 2009/148 UE relative à la protection des travailleurs contre les risques liés à une exposition à l'amiante pendant le travail. Ainsi, le test d'ajustement à l'achat (non annuel) imposé en France dans le cas d'exposition aux fibres d'amiante n'a pas été adopté au niveau européen, et les Etats membres ont en revanche privilégié une mesure collective en abaissant drastiquement la valeur limite d'exposition. Les mesures prises en matière d'amiante, fibre cancérogène sans seuil, ne sont pas transférables ipso facto à d'autres substances.  S'agissant des autres Etats - tiers à l'Union Européenne - pour lesquels il est indiqué que le test d'ajustement est devenu obligatoire pour tous les masques, il semble que le dispositif mis en place en Angleterre repose sur des recommandations. Il permet aux employeurs qui les appliquent de bénéficier d'une présomption de conformité, mais laisse la possibilité de choisir une autre méthode pour atteindre l'objectif fixé (cf. OC 282-28 - ex : « When should a fit test be carried out ? » …). Le dispositif américain (1910.134 - Respiratory protection. | Occupational Safety and Health Administration), qui est effectivement à caractère obligatoire, vise quant à lui certains secteurs : General Industry (part 1910), Shipyards (part 1915), Marine Terminals (part 1917), Longshoring (part 1918), and Construction (part 1926).  En outre, les employeurs français peuvent d'initiative recourir à des processus volontaires de tests d'ajustement, tel que celui publié sur le site du Syndicat national des acteurs du marché de la prévention et de la protection (SYNAMAP).  Enfin, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion est tout à fait sensible à la question de la responsabilité des employeurs en matière de santé et de sécurité au travail, préoccupation à laquelle la plupart des mesures décrites ci-dessus répondent, en leur donnant un cadre réglementaire précis et clair. Ceux-ci peuvent par ailleurs solliciter conseils et appuis auprès notamment des services de prévention et de santé au travail, des Caisses d'assurance retraite et de santé au travail (CARSAT), de l'INRS, de l'Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) ou encore de l'inspection du travail.