Question de : M. Fabien Di Filippo
Moselle (4e circonscription) - Les Républicains

M. Fabien Di Filippo alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la situation financièrement intenable dans laquelle se trouvent de nombreux départements. Les départements de France sont confrontés à la hausse permanente de leurs dépenses et de leurs charges : l'Association des départements de France estime à 4 milliards d'euros leurs dépenses supplémentaires entre 2019 et 2022, pour l'essentiel non compensées. Concernant leurs charges, celles-ci ne cessent d'augmenter depuis 2018 : Ségur de la santé, point d'indice des fonctionnaires, revalorisation du RSA, handicap, choc migratoire, facture croissante de la prise en charge des mineurs non accompagnés, protection de l'enfance. Parallèlement à cela, les départements voient leurs ressources principales attaquées, avec la chute annoncée des droits de mutation dans un contexte de crise immobilière aiguë (-18 % en moyenne) alors qu'environ 20% de leurs ressources sont issues des frais de notaires. L'effondrement de la construction et du volume des crédits bancaires accordés aux ménages les place dans une situation intenable, qui ne leur permet pas de faire face aux dépenses que l'État leur demande d'assumer. Jusqu'à présent, le système de péréquation mis en place par l'Association des départements de France permet que les collectivités départementales les plus solides aident les plus fragiles, mais cette solidarité interne risque d'être mise à mal : en effet, au vu de la situation actuelle, toutes les recettes de la péréquation seront taries dans deux ans. Si un fonds d'urgence de 60 millions d'euros destiné aux départements les plus en difficulté devrait être débloqué, notamment à destination des plus ruraux, le président de l'ADF estime que l'enveloppe doit être réhaussée à hauteur de 100 millions d'euros, via un « fonds de soutien exceptionnel » et que la dotation globale de fonctionnement doit être indexée sur l'inflation. Cette DGF représente 8,269 milliards d'euros, alors qu'avec une indexation elle atteindrait 9,133 milliards. Selon une analyse de l'agence de notation Standard and Poor's, les collectivités locales françaises seraient les entités les plus fragiles financièrement après les provinces chinoises. Il est urgent de réagir et d'apporter à nos collectivités un soutien financier à la hauteur de leurs besoins, mais aussi d'engager une réelle réforme qui leur permette de garantir et de sanctuariser leurs recettes. Concernant les départements, la quantité et la complexité de leurs missions et l'importante dégradation de leurs finances justifient leur appel urgent à la solidarité nationale, d'autant plus que leur autonomie financière et fiscale n'a cessé d'être réduite au cours des dix dernières années. Il lui demande donc quelle aide l'État compte leur apporter pour les aider à faire face à la hausse de leurs charges et de leurs dépenses et à la baisse de leurs recettes.

Réponse publiée le 20 février 2024

Partenaires indispensables de l'État au quotidien, les départements assument des compétences essentielles : les compétences sociales, les compétences d'ingénierie, l'entretien de nos routes et de nos collèges. Aussi, le Gouvernement s'engage à leurs côtés pour les plus en difficulté. Si des difficultés spécifiques nécessitent des réponses adaptées, il convient de rappeler que leur situation financière demeure globalement favorable. Ces dernières années, non seulement grâce aux recettes élevées de Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de DMTO, mais aussi grâce à la baisse des dépenses de revenu de solidarité active (RSA), les départements ont très nettement amélioré leurs ratios financiers. Au 1er janvier 2023, les départements étaient dans une situation financière inédite avec des niveaux d'épargne brute et d'épargne nette historiquement élevés résultant essentiellement du dynamisme des DMTO (+25 % entre 2020 et 2021 ; +3 % entre 2021 et 2022) conjugué au ralentissement des dépenses sociales. L'amélioration notable de leur capacité d'autofinancement leur a permis de maintenir leurs dépenses d'investissement à un niveau élevé tout en réduisant leur dette sur la période 2017-2022 (-6,7 % soit -2,2 Md€). En 2023, la baisse des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) devrait être en effet significative, à la mesure de la rétractation du marché immobilier. Cependant, si l'hypothèse d'une baisse de l'ordre de -20 % de ces recettes était confirmée, la majorité des départements connaîtraient malgré tout un niveau de DMTO supérieur à celui de 2019. Il s'agit d'un retour au niveau de recettes fiscales des années ante crise sanitaire. Les niveaux historiquement élevés des années passées ne pouvaient se maintenir durablement au regard du caractère cyclique du marché immobilier français. De plus, malgré cette baisse conséquente, la grande majorité des départements devrait terminer l'exercice 2023 avec une épargne brute comme nette positives. Le Gouvernement n'a pas attendu de constater l'effet de la baisse du marché immobilier sur les recettes des départements pour prendre des mesures fortes en leur faveur. Ainsi, dès la loi de finances pour 2023, le filet de sécurité inflation exceptionnel créé en 2022 au titre de 2022 a été étendu : les départements peuvent désormais en bénéficier au titre de 2023 et le seuil de perte d'épargne brute a été abaissé. Y sont éligibles les collectivités (1) dont le potentiel fiscal ou financier par habitant est inférieur au double de la moyenne de la strate et (2) ayant perdu au moins 15 % d'épargne brute entre 2022 et 2023. Leur dotation est égale à 50 % de la différence entre la hausse de leurs dépenses d'énergie entre 2023 et 2022 et la moitié de la hausse de leurs recettes de fonctionnement entre 2023 et 2022. De plus, afin de cibler le soutien de l'État, un travail a été mené tout au long de l'année 2023 en étroite collaboration avec Départements de France pour identifier les départements les plus en difficulté. Afin de leur apporter l'aide nécessaire, le projet de loi de finances (PLF) pour 2024 met en œuvre les engagements pris par la Première ministre sur le fonds de sauvegarde. Il est ainsi proposé que son montant soit égal au montant du fonds de sauvegarde mis en réserve au titre des années 2022 et 2023, soit près de 53 M€, ce qui permettra un soutien d'un montant total estimé à 106 M€ du fait de l'abondement exceptionnel par l'État d'un montant équivalent au fonds. Ce fonds sera réparti entre les départements dont la situation financière est actuellement la plus fragilisée, au regard de leur taux d'épargne brute et de leur indice de fragilité sociale en 2022. S'ajoutent à cette mesure les autres annonces effectuées par le Première ministre lors de la clôture des Assises nationales des départements de France : un fonds territorial d'accessibilité doté de 300 M€ sur 5 ans ; une aide de l'État aux départements portée à 100 M€ pour les mineurs non accompagnés ; une enveloppe de 150 M€ pour l'autonomie dégagée par la CNSA en 2024.

Données clés

Auteur : M. Fabien Di Filippo

Type de question : Question écrite

Rubrique : Départements

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Dates :
Question publiée le 26 septembre 2023
Réponse publiée le 20 février 2024

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