Question écrite n° 11527 :
Protection des captages d'eau destinés à la consommation humaine

16e Législature

Question de : Mme Ersilia Soudais
Seine-et-Marne (7e circonscription) - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale

Mme Ersilia Soudais appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la question de la protection des captages d'eau destinés à la consommation humaine. Les périmètres de protection des captages, définis aux articles L. 1321-2 et R. 1321-13 du code de la santé publique, assurent la protection des captages d'eau destinée à la consommation humaine vis-à-vis des pollutions ponctuelles et accidentelles. La mise en place de ces périmètres de protection est obligatoire sur l'ensemble des captages depuis la loi du 3 janvier 1992. Les associations environnementales de la circonscription de Mme la députée l'ont alertée au sujet de la protection des captages d'eau de Seine-et-Marne. En effet, 109 captages d'eau potable du territoire, soit 31,3 %, n'étaient pas protégés par une déclaration d'utilité publique, en date du 31 décembre 2022. Une situation d'autant plus inquiétante que la Seine-et-Marne est un département de culture intensive et se trouve être également le département d'Île-de-France le plus avancé en matière de développement de la méthanisation agricole. En effet, lorsqu'un captage d'eau n'est pas protégé par une DUP, il n'existe pas de périmètre de protection autour de ce captage, n'entraînant ainsi aucune contrainte de distance de sécurité pour l'épandage de pesticides ou de déchets de méthaniseurs sur les espaces agricoles à proximité. Il n'existe pas non plus de prescriptions spécifiques destinées aux industriels, à la protection des infrastructures ou de l'assainissement. Ces absences de dispositifs de protection représentent une réelle problématique de santé publique pour les consommateurs. Pour rappel, lors de sa dernière campagne d'analyses de mars 2023 (rapport 2022-AST-0255), l'ANSES a annoncé avoir trouvé des résidus de pesticides à des taux importants dans plus d'un tiers des échantillons d'eau potable prélevés sur les captages. Le rapport montre par exemple que sur la circonscription de Mme la députée, sur le site de captage d'Annet-sur-Marne, 13 pesticides ont été détectés, dont un, le chlorothalonil, à une concentration préoccupante de plus de 100 ng/L. Enfin, il est constaté une réelle lenteur dans l'aboutissement des procédures de déclaration d'utilité publique engagées par les collectivités. Il n'est pas rare que la finalisation d'un dossier de DUP nécessite parfois dix voire quinze ans, ce qui est bien trop long au vu de l'importance des enjeux de la protection des captages d'eau. Elle lui demande donc ce qu'il compte faire pour faciliter et systématiser la mise en place réglementaire des périmètres de protection des captages destinés à la consommation humaine.

Réponse publiée le 19 décembre 2023

Au 1er octobre 2023, le département de Seine-et-Marne compte, 350 captages d'alimentation en eau potable (AEP) actifs. Parmi eux, 250 disposent d'ores et déjà d'un arrêté préfectoral de déclaration d'utilité publique (DUP) instituant des périmètres de protection autour de ces captages d'eau. Ainsi, ce sont près de 71,5 % des captages AEP qui sont protégés. Sur les 100 captages restants, la procédure est actuellement engagée pour 81 d'entre eux. Il est à noter que pour les 19 captages non protégés et pour lesquels aucune procédure n'a encore été engagée,15 de ces ouvrages seront abandonnés au cours de l'année 2024 (abandon en raison de leur mauvaise qualité d'eau, les communes desservies devant être raccordées à d'autres ressources). Pour les 4 autres, plusieurs demandes et relances ont bien été formulées aux deux maîtres d'ouvrage afin d'initier la procédure. La procédure d'instauration des périmètres de protection des captages AEP est une procédure qui s'inscrit dans la durée. En effet, elle comporte plusieurs étapes administratives et techniques : une délibération de la collectivité pour la mise en place des périmètres de protection autour du ou des ouvrages de prélèvement ; une instruction technique avec la constitution d'un dossier technique (bureau d'études) et l'avis d'un hydrogéologue agréé en matière d'hygiène publique ; une instruction administrative avec constitution des dossiers et consultation administrative interservices ; la préparation du dossier de DUP : projet d'arrêté et enquête parcellaire suivie de l'enquête publique ; l'avis du Conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CoDERST) ; la prise de l'arrêté de DUP par le préfet ; l'acquisition des terrains et la mise en application des prescriptions administratives. Par ailleurs cette procédure administrative, qui reste à l'initiative des maires des collectivités locales concernées, fait intervenir de nombreux acteurs : services de l'Etat (préfecture, direction départementale des territoires, direction régionale et interdépartementale de l'environnement, de l'aménagement et des transports, …), collectivités, financeurs (agence de l'eau, conseil départemental), chambres d'agriculture, hydrogéologues agréés, bureaux d'études… Des réunions semestrielles de suivi de l'état d'avancement des procédures de DUP sont organisées par la délégation départementale de Seine-et-Marne de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France avec la plupart de ces acteurs. Les procédures de DUP continuent de progresser régulièrement. Il convient toutefois de préciser que la procédure réglementaire de DUP des captages d'eau potable a vocation à protéger les ouvrages vis-à-vis des pollutions ponctuelles et accidentelles. Bien que cette procédure puisse avoir un effet protecteur vis-à-vis des pollutions diffuses d'origine agricole, liées notamment à l'utilisation des pesticides, d'autres leviers réglementaires sont mobilisés dans cet objectif. Les pollutions diffuses sont en effet prises en compte dans le cadre des démarches relatives aux aires d'alimentation de captages, politique relevant de la compétence du ministère chargé de l'environnement qui vise notamment à mettre en œuvre des actions, sur la base du volontariat dans un premier temps, de réduction de l'usage de produits phytosanitaires. S'agissant des résultats de la campagne de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé rappelle que la limite de qualité applicable aux pesticides et à leurs métabolites pertinents est de 2 µg/L pour l'eau brute utilisée pour la production d'eau destinée à la consommation humaine et de 0,1 µg/L pour l'eau distribuée (concentration applicable par molécule individuelle). Les autorités sanitaires prennent les mesures adaptées dès lors que des dépassements sont observés. Enfin, comme vous le savez, le Gouvernement entend agir pour la protection des aires d'alimentation des captages d'eau potable à travers les mesures du plan gouvernemental d'action pour une gestion résiliente et concertée sur l'eau de mars 2023 (mesure 28) et du futur plan Ecophyto 2030.

Données clés

Auteur : Mme Ersilia Soudais

Type de question : Question écrite

Rubrique : Eau et assainissement

Ministère interrogé : Santé et prévention

Ministère répondant : Organisation territoriale et professions de santé

Dates :
Question publiée le 26 septembre 2023
Réponse publiée le 19 décembre 2023

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