16ème législature

Question N° 11532
de Mme Karine Lebon (Gauche démocrate et républicaine - NUPES - Réunion )
Question écrite
Ministère interrogé > Travail, plein emploi et insertion
Ministère attributaire > Travail, plein emploi et insertion

Rubrique > économie sociale et solidaire

Titre > Baisse du soutien financier de l'État à l'expérimentation TZCLD

Question publiée au JO le : 26/09/2023 page : 8465
Réponse publiée au JO le : 28/11/2023 page : 10738

Texte de la question

Mme Karine Lebon alerte M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur les conséquences de la décision du Gouvernement de réduire le soutien financier de l'État à l'expérimentation territoire zéro chômeur de longue durée. Cette expérimentation est pourtant une étape importante vers la fin de la privation durable d'emploi. Elle doit permettre de démontrer collectivement que le chômage de longue durée n'est pas une fatalité, que le droit à l'emploi est possible pour toutes et tous. Alors que la contribution destinée à financer les emplois créés était calculée sur la base de 102 % du Smic brut depuis plusieurs années, l'arrêté du 31 juillet 2023 fixant le montant de la participation de l'État au financement de la contribution au développement de l'emploi du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024 prévoit une baisse de ce taux à 95 % à partir du 1er octobre 2023.  Cette baisse représente concrètement plusieurs millions d'euros en moins alloués cette année à l'expérimentation. Elle est de nature à fragiliser le modèle économique d'un grand nombre d'entreprises à but d'emploi, voire à mettre à mal un des principes fondamentaux du projet : l'atteinte de l'exhaustivité. En effet, c'est bien pour parvenir à mettre fin à la privation durable d'emploi sur les territoires que les entreprises à but d'emploi embauchent les personnes concernées, sans sélection. Alors que les deux lois d'expérimentation ont été adoptées à l'unanimité au Parlement, alors que 48 territoires supplémentaires ont été habilités depuis deux ans, alors que ce sont déjà près de 4 000 personnes qui sont sorties de la privation durable d'emploi grâce au projet, cette baisse des financements alloués suscite l'incompréhension parmi les acteurs du projet. Dans la mesure où l'article 9 de la loi du 14 décembre 2020 dispose que « l'expérimentation est mise en place avec le concours financier de l'État (...) », on peut légitimement se demander si les acteurs des territoires auront les moyens de remplir leur mission en faveur de l'emploi territorialisé. Aujourd'hui, 58 territoires dans 38 départements et 14 régions, en Hexagone et en outre-mer, sont engagés pour faire de l'emploi un droit. Plus de 110 territoires émergents préparent activement leur candidature à l'habilitation et mobilisent, parfois depuis plusieurs années, les personnes privées durablement d'emploi de leur territoire et les acteurs locaux du droit à l'emploi pour atteindre cet objectif. Plusieurs centaines d'élus locaux, d'acteurs de l'insertion par l'activité économique, du secteur du travail protégé et adapté, de partenaires sociaux, d'acteurs économiques, sont ainsi mobilisés pour inventer un nouveau paradigme qui mette fin à la privation durable d'emploi. Dans le département de La Réunion, la ville du Port a pu ainsi intégrer le dispositif en novembre 2022 afin de construire une offre de travail en contrat à durée indéterminée et à temps choisi en direction des personnes habitant les quartiers retenus depuis au moins six mois et sans activité, soit 500 personnes éligibles. Des résultats concrets ont pu être appréciés depuis la mise en œuvre du dispositif il y a moins d'un an, avec des prévisions d'une quinzaine d'embauche en CDI chaque année. Face à la réussite de l'expérimentation « territoire zéro chômeur de longue durée », Mme la députée demande à M. le ministre s'il souhaite effectivement baisser la participation au dispositif et les raisons qui l'ont poussé à cette décision. Elle souhaite également savoir quelles mesures il compte mettre en place afin de compenser la baisse de la participation de l'État au dispositif et ainsi assurer à tous les territoires sélectionnés sa bonne mise en œuvre.

Texte de la réponse

La loi du 14 décembre 2020 relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique et à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » a prolongé, pour une durée de cinq ans l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée ».  Elle est mise en place dans soixante territoires, dont les dix territoires habilités dans le cadre de la loi du 29 février 2016. A ce jour, 58 territoires sont habilités, La possibilité d'augmenter le nombre de territoires habilités au-delà de soixante est ouverte, à titre dérogatoire, par décret en Conseil d'État. Cette expérimentation fait l'objet d'une évaluation conduite par un comité scientifique, composé de personnalités reconnues pour leurs compétences académiques et de représentants des services des études et des statistiques des personnes publiques intéressées. Ce comité scientifique, présidé par M. Yannick L'Horty, a été installé en juin 2023. Le rapport d'évaluation sera rendu en 2025. L'expérimentation est mise en place avec le concours financier de l'Etat et des départements concernés ainsi que des autres collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale volontaires mentionnés au Il de l'article 9 de la loi du 14 décembre 2020 et d'organismes publics et privés volontaires, susceptibles de tirer un bénéfice financier de ces embauches. L'expérimentation a bénéficié d'un soutien conséquent et continu de l'Etat : entre 2017 et 2022, le financement de l'Etat est passé de 14,9 M€ en 2017 à 32,8 M€ en 2022. Entre 2021 et 2023 l'augmentation des crédits votés a été de 57 % pour atteindre 44,94 M€, afin de financer en prévisionnel à fin 2023, un volume de 2 276 salariés en Equivalents Temps Plein (hors financements des Conseils Départementaux et autres partenaires). L'Etat apporte son concours financier à plusieurs titres. Il finance tout d'abord une dotation d'amorçage pour chaque ETP nouvellement créé, à hauteur d'un taux plafond de 30% du SMIC horaire, mais aussi un Complément Temporaire d'Equilibre (CTE) en cas de déséquilibre financier des structures et enfin une Contribution au Développement de l'Emploi (CDE). Un décret fixe la Contribution au Développement de l'Emploi (CDE) dans une fourchette de 53 à 102 % du SMIC par emploi. Elle était à 95 % avant la crise Covid, par l'arrêté du 26 décembre 2018. Elle a été montée à 102 % durant la crise Covid, soit le maximum, par un arrêté du 12 juillet 2021. Par un arrêté du 31 juillet 2023 elle a de nouveau été fixée à 95 % à compter du 1er octobre 2023, soit le même niveau qu'en 2019. Le taux reste dans le haut de la fourchette et n'induit pas une baisse du budget de l'expérimentation. En effet pour 2024, le budget dédié à cette expérimentation est porté dans le projet de loi de finances à hauteur de 68,6 ME, représentant une augmentation de 53% des crédits inscrits dans la loi de finances pour 2023, ce qui constitue la plus forte croissance du budget du ministère du travail.