16ème législature

Question N° 1168
de M. Frédéric Cabrolier (Rassemblement National - Tarn )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition énergétique
Ministère attributaire > Transition énergétique

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Prolifération des projets d'implantation de parcs éoliens

Question publiée au JO le : 13/09/2022 page : 4025
Réponse publiée au JO le : 11/10/2022 page : 4590

Texte de la question

M. Frédéric Cabrolier appelle l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur la publication fin juillet 2022, sans consulter ni l'Assemblée nationale ni le Sénat, d'un arrêté pour débloquer 10 GW d'énergies renouvelables c’est-à-dire plus de 3 000 éoliennes en cours d'examen par les préfectures ou en instruction devant les tribunaux, et sur son annonce de réduire le temps des contentieux à moins de 10 mois avant de passer à la phase suivante, qui est un coup de force pour accélérer la construction de parcs éoliens. Cette annonce est en parfaite contradiction avec la déclaration officielle de Mme la ministre à l'AFP à Berlin le 27 mai 2022, où elle disait exactement l'inverse : « Ne pas se raconter d'histoires » : le Gouvernement ne veut pas brusquer le développement de l'éolien. Le déploiement de l'énergie éolienne en France, source de controverses récurrentes dans l'opinion, se fera à un rythme que la « société est prête à accepter ». Pourtant, produire plus d'électricité décarbonée avec des énergies renouvelables est un leurre ; le mix électrique français est déjà décarboné à plus de 92 % (2021) et l'intermittence de l'éolien ne ferait que dégrader les émissions de CO2 de la France : il faut notamment 30 tonnes d'acier pour fabriquer les mâts et les fondations d'une éolienne nécessitent de couler 1 000 tonnes de béton. L'Allemagne montrée en exemple est l'un des pays les plus pollueurs d'Europe. Sa production d'électricité n'est décarbonée qu'à hauteur de 53 %, les 47 % restant de leur production sont assurés par des énergies fossiles (gaz, charbon, lignite). La voie des éoliennes ruine l'indépendance stratégique que le pays avait acquise avec les investissements des précédentes générations dans le nucléaire, augmente sa dépendance aux énergies fossiles et dégrade sa balance commerciale puisque la France ne produit pas d'éoliennes ! En plus, les éoliennes sont une menace pour la biodiversité : dans le Tarn, des associations de protection des oiseaux ont démontré une forte surmortalité des rapaces et des chauves-souris sur deux parcs éoliens, obligeant le préfet du Tarn à prendre des arrêtés d'urgence pour suspendre l'activité des éoliennes en journée jusqu'au départ supposé en migration des faucons sur la zone ! Pourtant, dans le Tarn, de nombreux projets de parcs éoliens sont en cours d'examen comme à Rayssac ou Lombers, sur la circonscription de Mme la députée, ou sont en cours d'instruction devant les tribunaux suite à des recours lancés par des associations ou des citoyens qui s'opposent à ces implantations. Aussi, elle lui demande pour quelles raisons elle a changé de discours sur l'éolien en 3 mois et si elle compte effectivement accélérer leur implantation contre l'avis de la population locale.

Texte de la réponse

Le mix énergétique global de la France repose toujours à près de deux tiers sur les énergies fossiles (gaz, charbon, pétrole) et un tiers sur le mix électrique décarboné. La guerre en Ukraine a d'ailleurs rappelé notre forte dépendance aux énergies fossiles importées. En sortir rapidement est impératif, à la fois pour lutter contre le réchauffement climatique et renforcer notre autonomie stratégique, notamment dans la situation géopolitique actuelle. Pour cela, il faut accentuer nos efforts d'efficacité et sobriété énergétique, mais aussi électrifier des pans entiers de notre économie : transport, chauffage, industrie. En conséquence, malgré une baisse de la consommation d'énergie totale, nos besoins en électricité vont s'accroître. Compte tenu des délais de construction de centrales nucléaires, les énergies renouvelables permettront de faire face à l'augmentation de la demande d'électricité dans un délai très contraint, sans augmenter nos émissions de gaz à effet de serre. L'étude « Futurs énergétiques 2050 » de RTE (Réseau de transport d'électricité) montre qu'indépendamment de nos choix sur l'énergie nucléaire, il est indispensable de développer massivement toutes les énergies renouvelables électriques pour atteindre la neutralité carbone en 2050 et assurer notre sécurité d'approvisionnement électrique. Notre combat n'est pas celui des énergies renouvelables contre l'énergie nucléaire, mais résolument celui des énergies décarbonnées contre les énergies fossiles. Car ce sont elles qui sont responsables du dérèglement climatique et de ses conséquences sur la biodiversité. Au 31 décembre 2021, l'énergie éolienne représente en France une puissance cumulée effective de 18,9 GW, et produit l'équivalent de la consommation annuelle d'électricité de plus de 8 millions de foyers. Ainsi, environ 8 % de la production électrique française est réalisée par l'éolien qui représente la troisième énergie du mix électrique de la France devant le gaz. Ces chiffres démontrent l'importance de la filière éolienne française pour la sécurité d'approvisionnement énergétique de la France.  L'éolien permet de renforcer la résilience de la France en cas de crise économique, géopolitique ou sanitaire. En effet, une fois installées, les éoliennes ne nécessitent que très peu de maintenance pour produire de l'électricité et ne dépendent pas de l'apport de combustibles fossiles pour assurer la continuité de leur production. Au cours de la crise sanitaire, alors que d'autres moyens de production ont connu des difficultés pour leur maintenance, les éoliennes ont continué de produire. La production de l'éolien a d'ailleurs parfois dépassé 22 % de la consommation d'électricité instantanée. Afin de déployer rapidement de nouvelles capacités d'énergie renouvelable, notamment dans une logique de sécurité d'approvisionnement électrique pour les prochains hivers, des mesures d'accélération ont été mises en place ou sont actuellement à l'étude au niveau règlementaire. Il est d'ailleurs rappelé au député que la Constitution française distingue dans ses articles 34 et 37 les domaines de la loi et du règlement, ce qui autorise le Gouvernement à prendre des mesures règlementaires sur tout ce qui ne relève pas du domaine de loi. Plusieurs mesures d'urgence, n'étant pas du niveau législatif, ont ainsi été instaurées cet été afin de garantir une viabilité économique aux projets de production d'énergie renouvelable déjà autorisés, mais bloqués dans leur construction du fait de la situation économique. De même, une instruction du Gouvernement à destination des préfets a été publiée afin de leur demander d'accélérer les délais d'instruction. L'éolien a de nombreuses retombées économiques positives sur le territoire français, en générant plus de 22 000 emplois directs et indirects en France, notamment dans les zones rurales touchées par la désindustrialisation. En 2020, le marché de l'éolien français a représenté plus de 768 millions d'euros d'exportation. Pour autant, le développement de l'éolien terrestre doit se faire en lien avec les différents enjeux des territoires. De nombreuses évolutions ont récemment renforcé les exigences de concertation sur les projets. Le porteur de projet est notamment tenu d'envoyer le résumé non technique de son étude d'impact au maire de la commune avant le dépôt de sa demande d'autorisation. Le maire a ensuite la possibilité de formuler des observations sur ce résumé, auxquelles le porteur de projet est tenu de répondre. Le projet de loi sur l'accélération du déploiement des énergies renouvelables vise a adressé le sujet de l'acceptabilité des territoires et l'appropriation des projets par ses habitants en prévoyant notamment des mesures sur le partage de la valeur. Concernant l'impact de l'éolien sur la biodiversité, les éoliennes sont soumises à la réglementation des Installations Classées pour la protection de l'Environnement et doivent bénéficier d'une autorisation environnementale afin d'être construites. Les porteurs de projet doivent pour cela réaliser une étude d'impact et notamment justifier que les impacts sur la biodiversité sont évités et réduits au maximum et que les impacts résiduels sont compensés. De plus, le dernier rapport du GIEC souligne qu'au-delà de 1,5°C de réchauffement, le changement climatique aura des impacts irréversibles, notamment sur la biodiversité, du fait d'un nombre croissant d'extinction. En permettant de lutter contre le réchauffement climatique, l'éolien permet, sur le long terme, de préserver la biodiversité. Le Gouvernement assure au député Cabrolier sa pleine détermination à lutter contre le dérèglement climatique, combat qui doit tous nous rassembler.