Question écrite n° 12052 :
Problématique des logements considérés comme des passoires thermiques

16e Législature

Question de : M. Jean-Luc Bourgeaux
Ille-et-Vilaine (7e circonscription) - Les Républicains

M. Jean-Luc Bourgeaux appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur le report du calendrier de l'interdiction de la mise en location des logements considérés comme des « passoires thermiques », à partir de 2025. Bien que le retrait des logements les plus énergivores (G en 2025, F en 2028 et E en 2034) soit souhaitable, tant sur le plan économique qu'écologique, la forte accélération donnée avec la loi « Climat et Résilience » est contre-productive car elle ne laisse pas suffisamment de temps aux propriétaires pour réaliser les travaux nécessaires. La problématique est encore plus difficile en copropriété du fait des obligations légales d'unanimité pour lancer les travaux. Force est de constater que les consommateurs ainsi que les bailleurs institutionnels et sociaux, ne bénéficient pas de l'accompagnement technique et financier nécessaire permettant la bonne réalisation des travaux dans un délai si contraint. Des dispositifs d'aides existent, mais sont très complexes pour les ménages. Dans ce contexte, la remise en cause du calendrier envisagé n'est pas une réponse satisfaisante et aboutit, en réalité, à abandonner les ménages qui vivent dans ces passoires thermiques avec une forte hausse des charges de chauffage. Les provisions de charges chez certains locataires et copropriétaires ont bondi de 40 % à 80 % en moyenne, avec des pics fin 2022 amenant à des factures multipliées par 10. La conséquence en est une hausse importante des impayés (+10 % depuis un an) et de plus en plus de signalements auprès de la Banque de France pour des incidents de paiement et de surendettement. L'annonce d'un report des échéances ne peut donc se faire sans soutien financier pour des ménages, qui ont déjà subi une hausse de 26,5 % de leur électricité en moins d'un an et des prix du gaz qui restent très hauts par rapport à la situation d'avant-crise. Par ailleurs, si les locataires dans le parc privé ont pu bénéficier d'un gel des loyers dans certaines grandes agglomérations depuis août 2022, tel n'est pas le cas des bailleurs sociaux, qui ont augmenté les loyers de 3,5 % en 2023. Les pouvoirs publics doivent assumer leurs ambitions et se donner les moyens de les atteindre en prenant les mesures financières adaptées pour que chaque habitant puisse vivre dignement dans son logement. Il lui demande de lui indiquer les mesures que le Gouvernement entend prendre en la matière.

Réponse publiée le 30 avril 2024

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi climat et résilience, a effectivement prévu de nouvelles mesures concernant la décence des logements : à compter du 1er janvier 2025, un logement nouvellement mis en location ou dont le bail de location fait l'objet d'une mesure de reconduction, expresse ou tacite, devra respecter un niveau de performance minimal au sens de l'article L.173-1-1 du code de la construction et de l'habitation. Ce niveau de performance minimal correspondra à la classe F du DPE, jusqu'au 31 décembre 2027, puis à la classe E du DPE, entre le 1er janvier 2028 et le 31 décembre 2033, et enfin à la classe D du DPE, à partir du 1er janvier 2034. Pour mémoire, un DPE est valable 10 ans à compter de sa réalisation. L'objectif du Gouvernement est d'accélérer la rénovation du parc de logements pour répondre aux objectifs nationaux d'économies d'énergie et de neutralité carbone fixés pour l'année 2030, mais aussi pour lutter contre la précarité énergétique des ménages. La promulgation de la loi climat et résilience a permis ainsi d'initier une dynamique de rénovation auprès de l'ensemble du secteur qui permettra de répondre au calendrier imposé par la loi. Un important travail a déjà été fait afin d'améliorer la communication des informations utiles vers les propriétaires bailleurs, concernant leurs obligations à venir, mais aussi les aides financières et les accompagnements qui leur sont proposés, notamment à travers le réseau des espaces conseils France Rénov'. En février dernier, le Gouvernement a annoncé une correction du calcul du DPE qui pénalisait les petites surfaces de moins de 40m2 et qui menaçait de sortir des biens du marché locatif au 1er janvier prochain sans aucune raison. A la mi-avril, ce sont plus de 45 000 logements dont l'étiquette a été modifiée et plus de 10 000 logements comptabilisés sur le site de l'Ademe qui sont sortis du statut de passoires thermiques. Un travail est également en cours avec le ministère de la culture pour communiquer davantage auprès des particuliers et des professionnels sur les méthodes de rénovation adaptées d'une part au bâti ancien, et d'autre part au bâti faisant l'objet de mesures de protection spécifique. Pour accompagner l'ensemble des propriétaires, propriétaires occupants comme propriétaires bailleurs, dans la réalisation des travaux d'amélioration de la performance énergétique de leurs logements, plusieurs dispositifs d'aides ont par ailleurs été renforcés et améliorés. Ainsi, depuis le 1er janvier 2024, les propriétaires occupants de logements peuvent bénéficier de la mise en œuvre d'un parcours accompagné, pour la réalisation de rénovations d'ampleur. Grâce à un travail étroit avec la FFB et la Capeb, le Gouvernement a simplifié ce dispositif pour permettre aux Français d'accélérer leurs travaux de rénovation. Ainsi entre le 15 mai 2024 et le 31 décembre 2024, les adaptations suivantes seront en vigueur : - la possibilité de bénéficier de MaPrimeRénov' par geste, quelle que soit l'étiquette de son logement, - la suppression de fourniture d'un diagnostic de performance énergétique (DPE) pour déposer un dossier, - la réouverture de la possibilité de réaliser un geste d'isolation seul, - le conditionnement, en conséquence, du geste de ventilation à des travaux d'isolation. En outre, les aides pourront atteindre jusqu'à 90% du montant hors taxes des travaux pour un ménage très modeste avec un plafond de travaux maximum de 70 000 euros. Les ménages bénéficieront à cet effet de l'appui d'un Accompagnateur Rénov', qui les accompagnera dans la programmation et la réalisation des travaux et dont le dispositif montera en puissance dans les prochains mois. D'ici la fin de l'année, 5000 accompagnateurs Rénov seront certifiés (contre 3000 actuellement). La définition des travaux nécessaires sera basée sur un audit énergétique, établi à l'aide d'un logiciel respectant la nouvelle méthode du DPE et qui aura fait l'objet d'une validation par l'administration, ce qui limitera les risques de fraude. En outre, dans le cadre de ce parcours, l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) valorisera directement, à son niveau les certificats d'économie d'énergie (CEE) pour le compte du ménage la possibilité de fournir une avance à hauteur de 70 % de la prime attendue actuellement possible pour les ménages très modestes est étendue aux ménages modestes. Au global, les crédits mobilisés au titre des aides à la rénovation énergétique des logements par l'ANAH atteignent un niveau inédit pour l'année 2024. Afin de faciliter le financement du reste à charge dans le cadre de la réalisation de rénovations globales, la loi de finances pour 2024 a permis de proroger l'éco-PTZ jusqu'au 31 décembre 2027 et a augmenté le plafond des prêts de l'éco-PTZ couplés au bénéfice de l'aide MaPrimeRénov' à 50 000 €, ainsi que la durée maximale de remboursement de 15 ans à 20 ans. Enfin, sur le plan fiscal, les bailleurs privés bénéficient du dispositif habituel de déduction du déficit foncier du revenu imposable, dont le plafond d'imputation sur le revenu global est exceptionnellement doublé (21 400 €) pour tous les travaux de rénovation énergétique éligibles, réalisés depuis le 1er janvier 2023 et jusqu'au 31 décembre 2025, à concurrence des dépenses nécessaires pour permettre au bien de passer d'une classe énergétique E, F ou G à une classe énergétique A, B, C ou D. L'enjeu est d'en faire un outil puissant d'accompagnement à la réalisation des travaux des propriétaires bailleurs selon le calendrier de la loi climat et résilience. Le dispositif fiscal « Denormandie ancien », destiné à encourager l'investissement locatif intermédiaire en centre-ville des communes dont le besoin de réhabilitation de l'habitat est particulièrement marqué ou qui ont conclu une convention d'opération de revitalisation de territoire, est également prolongé jusqu'au 31 décembre 2026. Toutes ces mesures doivent permettre de faciliter et encourager la rénovation des logements.

Données clés

Auteur : M. Jean-Luc Bourgeaux

Type de question : Question écrite

Rubrique : Logement

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Logement

Dates :
Question publiée le 10 octobre 2023
Réponse publiée le 30 avril 2024

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