16ème législature

Question N° 1217
de M. Bastien Lachaud (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Seine-Saint-Denis )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur et outre-mer
Ministère attributaire > Intérieur et outre-mer

Rubrique > logement

Titre > Discrimination dans l'accès à l'hébergement d'urgence

Question publiée au JO le : 13/09/2022 page : 4000

Texte de la question

M. Bastien Lachaud interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le traitement différencié et discriminatoire réservé aux personnes réfugiées et sans-abri dans l'accès à l'hébergement d'urgence. La nécessité d'accueillir de très nombreuses personnes réfugiées de nationalité ukrainienne, suite à la guerre d'agression menée par la Russie et la violation de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Ukraine, a conduit les pouvoirs publics français à déployer d'importantes capacités d'hébergement d'urgence pour l'accueil des réfugiés. Ainsi, au 18 août 2022, près de 87 804 places d'hébergement destinées aux réfugiés de nationalité ukrainienne sont comptabilisées, selon les chiffres rendus publics par le ministère de l'intérieur. Cependant, un grand nombre de ces places d'hébergement destinées aux réfugiés de nationalité ukrainienne demeurent vacantes - le ministère de l'intérieur évoque ainsi un taux moyen d'occupation de 55 %, soit 39 708 places disponibles. Simultanément, des milliers de personnes de nationalités différentes demeurent sans solution d'hébergement, contraintes de dormir à la rue ou au sein de campements de fortune. Ces personnes se voient refuser l'accès aux places d'accueil destinées aux réfugiés de nationalité ukrainienne. Ainsi par exemple, entre le 14 juin et le 20 juillet 2022, sur les 1 179 demandes faites à l'association Utopia 56, qui vient en aide aux personnes exilées et aux personnes à la rue, 66 % sont restées sans solution d'hébergement. Au même moment, le centre d'hébergement alors situé Porte de Versailles à Paris et destiné à l'accueil des réfugiés de nationalité ukrainienne comptabilisait entre 450 et 500 places libres chaque soir. Des milliers de personnes en situation d'extrême vulnérabilité se donc trouvent privées d'accueil et mises en danger, alors même que des capacités d'hébergement déjà financées et existantes demeurent sous-utilisées au motif que les demandeurs ne seraient pas de la « bonne » nationalité. Cette situation de traitement différencié, que l'on peut donc qualifier de discriminatoire, a suscité l'émotion légitime de nombre de concitoyens, d'acteurs associatifs et d'élus. Ce constat a conduit les associations Utopia 56 et Médecins du monde à saisir le juge des référés liberté du tribunal administratif de Paris. Après un premier rejet de cette requête, les associations ont fait appel auprès du Conseil d'État, appel rejeté à son tour. La justice estime notamment que le dispositif destiné aux personnes de nationalité ukrainienne et bénéficiant de la protection temporaire présente un caractère spécifique et qu'il ne doit pas être confondu avec l'accueil des autres publics en situation d'errance. Le ministère de l'intérieur, quant à lui, aurait indiqué, dans le cas spécifique du centre d'accueil qui était situé Porte de Versailles à Paris jusqu'à sa fermeture le 28 août dernier, que la convention liant l'État au prestataire privé responsable du centre, prévoyait de réserver exclusivement celui-ci aux personnes ukrainiennes bénéficiaires de la protection temporaire. M. le député considère ces réponses comme tout à fait insatisfaisantes, au vu de la situation discriminatoire qui existe de fait entre les personnes de nationalité ukrainienne et les autres, situation qui place des milliers de personnes sans-abri en danger et engendre des atteintes graves et manifestement illégales à plusieurs libertés fondamentales : droit à l'hébergement, à l'intérêt supérieur de l'enfant, à l'asile. M. le député souhaite donc savoir ce que M. le ministre compte faire pour remédier à cette situation et assurer l'accueil digne de l'ensemble des personnes demandeuses d'une place d'hébergement, indépendamment leur nationalité. À cet effet, il souhaite savoir quelles dispositions il compte prendre pour ouvrir les centres d'hébergement d'urgence déjà existants et vides à l'ensemble des personnes en situation de très grande précarité, quelle que soit leur nationalité ou pays d'origine et, au-delà, pour financer la création de places d'hébergement à la hauteur des besoins.

Texte de la réponse