Question écrite n°12512 : Application d'accords de modération des marges face à la crise fruits et légumes

16ème Législature

Question de : M. Grégoire de Fournas (Nouvelle-Aquitaine - Rassemblement National)

M. Grégoire de Fournas interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur l'accord de modération des marges dans le secteur des fruits et légumes frais. Les accords de modération des marges sont prévus à l'article L. 611-4-1 du code rural et de la pêche maritime. Ces accords renouvelés annuellement entre l'État et les entreprises de la distribution qui le souhaitent consistent à réduire la marge de l'entreprise de distribution et ses magasins sur les produits en crise conjoncturelle, afin que son taux de marge brut sur un fruit ou légume concerné soit inférieur ou égal à son taux de marge brut moyen des trois dernières années sur le rayon. Cependant, la marge pratiquée par le distributeur sur un produit similaire est différente selon qu'il est importé ou produit sur le territoire national, sans toutefois être prise en compte dans le calcul du taux de marge. Par ailleurs, la « marge plateforme » liée aux coûts logistiques est parfois présentée par les distributeurs comme une prestation de service logistique et se voit non seulement supportée par les entreprises de première mise en marché mais également décomptée de la marge du distributeur. Ces deux éléments, parmi d'autres, sont de nature à fausser les calculs de réduction de marge censée aider le produit national en crise conjoncturelle. La multiplication des produits qui traversent ces crises et leur difficile écoulement sur le marché conduisent les représentants de la production et de la mise en marché de fruits et légumes à s'interroger sur l'application et la portée de l'accord de modération des marges, d'autant que les professionnels de la filière et les services de l'État ont travaillé de concert sur l'évolution du dispositif de crise conjoncturelle, publié cet été 2023. Ces accords de modération des marges sont incitatifs, puisqu'ils exonèrent les distributeurs signataires du paiement de la taxe additionnelle à la taxe sur les surfaces. Ils sont également coercitifs, le non-respect ou le retard dans leur mise en œuvre étant théoriquement sanctionné d'une amende civile. Malgré ces volets incitatif et coercitif, il est légitime de s'interroger sur l'engagement des entreprises de distribution dans ces accords, tout en sachant que la structuration des distributeurs rend plus difficiles les contrôles : groupes intégrés avec franchisés, groupes indépendants fédérant des associés... L'article 1er de l'arrêté du 28 février 2012 précise que les signataires de cet accord rendent compte de son application. M. le député demande donc à M. le ministre quels sont les moyens mis en place par l'État pour contrôler la bonne application de ces accords. Il lui demande les preuves de l'application des sanctions prévues. Enfin, il lui demande un état des lieux de la taxation additionnelle pour les distributeurs non-signataires.

Réponse publiée le 4 juin 2024

Les accords de modération des marges sont prévus par l'article L. 611-4-1 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), et ont été effectivement mis en place depuis l'année 2011. L'objectif poursuivi par ce dispositif, propre au secteur des fruits et légumes frais, est de soutenir cette filière en période de crise conjoncturelle, par une baisse des prix des fruits et légumes frais au stade de la distribution, afin de relancer la consommation de ces produits, et de favoriser ainsi la sortie de crise par un retour à l'équilibre entre l'offre et la demande. À cette fin, l'accord de modération des marges, signé entre l'État et chaque distributeur volontaire, prévoit que le distributeur applique une diminution de sa marge sur les fruits et légumes frais pendant les situations de crise conjoncturelle (telles que définies à l'article L. 611-4 du CRPM). Dans de telles situations de crise, le distributeur signataire réduit la marge brute pratiquée sur le produit identifié « en crise » afin de ramener ce taux de marge brute à un niveau inférieur ou égal au taux moyen de marge brute du rayon fruits et légumes frais. En contrepartie, les distributeurs signataires de tels accords bénéficient d'une exemption de la taxe additionnelle à la taxe sur les surfaces commerciales (TaSCom) définie à l'article 302 bis ZA II du code général des impôts. Par ailleurs, l'article L. 611-4-1 du CRPM prévoit que le non-respect de l'accord de modération signé est sanctionné d'une amende civile, dont le montant peut atteindre 2 millions d'euros. Concernant l'année 2023, 13 accords annuels de modération des marges de distribution de fruits et légumes frais ont été cosignés entre des enseignes de la grande distribution, le ministère chargé de l'économie et des finances et le ministère chargé de l'agriculture. Le suivi de ce dispositif connaît cependant des limites, peu de bilans étant retournés en fin d'année par les signataires de la grande distribution en direction des ministères concernés. À titre indicatif, les services du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire n'ont reçu à ce stade pour les années 2021 et 2022 qu'une partie des tableaux de suivi attendus. Les résultats de l'application des accords de modération des marges pour l'année 2023 sont à attendre au quatrième trimestre de l'année 2024. En 2023, suite à des travaux avec les professionnels du secteur des fruits et légumes, le ministère chargé de l'économie et des finances et le ministère chargé de l'agriculture ont fait évoluer le dispositif de suivi des crises conjoncturelles, qui sert de socle aux accords de modération des marges, sur 3 aspects : la liste des produits suivis, le seuil et le nombre de jours entraînant le déclenchement et la sortie de la situation de crise conjoncturelle et les éléments de pondération entrant dans le calcul de l'indicateur. L'arrêté du 24 mai 2005 fixant les modalités d'application de l'article L. 611-4 précité a ainsi été modifié par arrêté du 4 juillet 2023. La caractérisation de la sortie de crise est ainsi passée à 1 jour après la remontée des indicateurs de marché au lieu de 3 antérieurement, ce qui était souhaitable dans la mesure où une durée longue semble créer de l'inertie avec des prix bas alors que le marché redevient actif. Cette nouvelle définition de la sortie de crise devait donc alléger plus rapidement la contrainte pesant sur la marge et le prix du distributeur et favoriser la reprise du marché. Les modifications ont également porté sur le suivi de la mise en œuvre des accords qui doit désormais être effectué par les administrations centrales (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises) et non plus par les services déconcentrés. Ces évolutions devaient permettre d'améliorer la remontée d'informations et l'évaluation du dispositif. Il convient néanmoins pour cela que les signataires des accords fassent effectivement parvenir les comptes-rendus annuels, sachant que l'absence de transmission, par les distributeurs, aux administrations centrales précitées de ces documents ne fait pas l'objet de sanction en l'état actuel des textes. À ce jour, les administrations centrales des 2 ministères concernés poursuivent les travaux sur ce dispositif, afin d'en simplifier la mise en œuvre et d'en améliorer le suivi et le respect.

Données clés

Auteur : M. Grégoire de Fournas (Nouvelle-Aquitaine - Rassemblement National)

Type de question : Question écrite

Rubrique : Consommation

Ministère interrogé : Agriculture et souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture et souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 31 octobre 2023
Réponse publiée le 4 juin 2024

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