16ème législature

Question N° 130
de Mme Anna Pic (Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES) - Manche )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition énergétique
Ministère attributaire > Transition énergétique

Rubrique > logement : aides et prêts

Titre > Dysfonctionnements du dispositif MaPrimeRénov'

Question publiée au JO le : 10/01/2023
Réponse publiée au JO le : 18/01/2023 page : 424

Texte de la question

Mme Anna Pic appelle l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur les dysfonctionnements du dispositif d'aide à la rénovation énergétique MaPrimeRénov'. Instauré en 2020 pour permettre aux Français les plus modestes de rénover leur logement, ce dispositif piloté par l'Agence nationale de l'habitat (Anah) connaît un succès non négligeable avec plus d'un million de demandes enregistrées depuis son lancement. Symbole de la volonté des citoyens de réduire leur consommation d'énergie afin de faire des économies et de protéger la planète, l'engouement autour de ce dispositif est visiblement contrarié par un certain nombre de complications. Le 17 octobre 2022, la Défenseure des droits publiait un rapport dans lequel elle critiquait vivement le dispositif dont il est question, faisant état de « graves dysfonctionnements techniques récurrents » s'agissant des démarches administratives à effectuer. Aides versées trop tardivement et entraînant de lourdes difficultés financières, éléments de dossier impossibles à modifier, délais d'instructions interminables ou encore difficultés d'accès à un conseiller, les problèmes s'accumulent, comme en attestent les 500 réclamations reçues par l'autorité à l'origine du rapport. En outre, l'obligation de créer un compte sur le portail informatique du dispositif est particulièrement décriée puisqu'elle est à l'origine d'une rupture d'égalité devant le service public. Les conclusions du rapport de la Défenseure des droits sont d'ailleurs corroborées par de nombreux témoignages de citoyens issus de la circonscription de Mme la députée. Ainsi, et alors que l'Anah annonce un délai de traitement de deux semaines, plusieurs dossiers déposés en décembre 2021 sont toujours sans réponse aujourd'hui. Cette situation entraîne la caducité des devis demandés aux entreprises et impose de renouveler des démarches pourtant effectuées préalablement. Par ailleurs, l'ensemble des échanges de courriels sur la plateforme informatique de l'Anah ne sont pas à disposition des utilisateurs, ces derniers ne disposant donc d'aucune trace de leurs échanges avec l'agence et ne disposent d'aucun recours. Dès lors, elle souhaite connaître les intentions du ministre pour permettre une plus grande efficience dans l'instruction des dossiers et ainsi répondre aux attentes des citoyens et à la nécessaire accélération de la transition énergétique.

Texte de la réponse

DISPOSITIF MAPRIMERÉNOV'


Mme la présidente. La parole est à Mme Anna Pic, pour exposer sa question, n°  130, relative au dispositif MaPrimeRénov'.

Mme Anna Pic. Depuis son instauration en 2020, le dispositif MaPrimeRénov', dont l'objectif est de permettre aux Français les plus modestes de rénover leur logement, connaît un succès non négligeable. En effet, le nombre de demandes enregistrées depuis son lancement – plus de 1 million – montre que la volonté des citoyens de réduire leur consommation d'énergie et de protéger la planète est bien réelle. C'est une excellente nouvelle.

Néanmoins, l'engouement des demandeurs pour ce dispositif est contrarié par certaines difficultés procédurales. En octobre dernier, la Défenseure des droits a rendu une décision dans laquelle elle critique vivement MaPrimeRénov', affirmant que les démarches administratives se heurtent à de « graves dysfonctionnements techniques récurrents ». Aides versées trop tardivement, qui entraînent de lourdes difficultés financières ; éléments de dossier impossibles à modifier ; délais d'instruction interminables ; difficultés d'accès à un conseiller : les complications s'accumulent, comme en attestent les 500 réclamations qu'elle a reçues.

Plusieurs témoignages de citoyens de ma circonscription, dans la Manche, corroborent ce constat, comme celui d'un jeune couple, avec deux enfants en bas âge. Il a accédé à la propriété et décidé d'installer une pompe à chaleur et des fenêtres plus performantes pour son logement. Après avoir déposé le dossier complet sur le site de l'Anah – Agence nationale de l’habitat – au mois d'avril 2022 et avoir obtenu une réponse favorable, il a engagé les travaux puis envoyé les factures acquittées pour obtenir le remboursement des frais avancés. En septembre 2022, ces usagers étaient toujours en attente du paiement. Les découverts mensuels s'accumulent, tout comme les avertissements de leur établissement bancaire.

L'obligation de créer un compte sur le portail informatique du dispositif est particulièrement décriée, puisqu'elle est à l'origine d'une rupture d'égalité devant le service public. Si la transformation numérique des services publics est bienvenue et participe à atteindre un objectif que nous partageons tous, elle ne doit pas se faire de façon déshumanisante, en complexifiant les démarches et, in fine, en éloignant les usagers en difficulté avec les outils numériques. Là encore, j'ai reçu de nombreux témoignages en ce sens. Alors que l'Anah, chargée de piloter le dispositif, annonce un délai de traitement des dossiers de deux semaines, nombre d'entre eux sont toujours sans réponse plusieurs semaines ou mois plus tard. Cette situation est problématique puisqu'elle entraîne la caducité des devis demandés aux entreprises et impose de renouveler les démarches, pourtant effectuées au préalable. En outre, les demandeurs n'ont pas accès aux courriels échangés sur la plateforme informatique de l'Anah ; faute de trace de leurs échanges avec l'agence, ils ne disposent d'aucun recours.

Dans le cadre de la lutte contre le dérèglement climatique, la rénovation énergétique des bâtiments relève de l'absolue nécessité ; de plus, il s'agit d'une source d'économie considérable pour les Français. Que comptez-vous faire pour remédier aux complications que rencontrent les usagers du dispositif MaPrimeRénov' et pour permettre une instruction plus efficiente des dossiers ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Je vous remercie pour votre question, qui m’offre l’occasion de mettre en valeur la création du dispositif de soutien à la rénovation énergétique. Vous l’avez dit, celle-ci est nécessaire pour plusieurs raisons, notamment pour lutter contre le dérèglement climatique : des bâtiments mal isolés participent au réchauffement. Certaines politiques écologiques suscitent des débats sur la priorité à donner à la fin du mois ou à la fin du monde ; ici, ces deux préoccupations convergent, puisque cette mesure est bonne pour le climat comme pour le pouvoir d’achat des allocataires. Le choc énergétique que nous vivons renforce la pertinence et la nécessité du dispositif.

Depuis son lancement en janvier 2020, plus de 1,5 million d’usagers ont bénéficié de MaPrimeRénov’. Ils ont ainsi, et notre pays avec eux, économisé l’équivalent de la consommation électrique de la ville de Lyon.

Bien sûr, des améliorations sont possibles. Vous avez cité le chiffre de 500 dossiers signalés par la Défenseure des droits ; j'ai connaissance de 600 dossiers. Même supérieur au vôtre, ce chiffre ne représente que 0,04 % du total. On peut choisir de braquer les projecteurs sur les 600 dossiers qui posent problème, mais aussi sur les 1,4 million qui n'en posent pas. En octobre dernier, 91 % des dépositaires d'un signalement avaient été accompagnés dans leurs démarches. Les autres le sont à mesure que nous en avons connaissance : le Gouvernement – et à travers lui l’Anah – n’a qu’une envie : conduire le plus grand nombre de dossiers à leur terme.

Désormais, nous devons continuer à améliorer et à simplifier le dispositif. Il reste des angles morts. Les copropriétés en font partie. Il est parfois complexe de réunir une majorité en faveur des travaux, or la volonté d’un seul copropriétaire ne peut suffire pour résoudre les problèmes de passoire thermique, en particulier quand cela suppose des travaux à l’extérieur du bâtiment. Il faut emporter l’aval de la majorité.

L’information peut également être améliorée. Aussi avons-nous créé, en 2022, France Rénov' et l’accès à un accompagnateur France Rénov', afin de faciliter les parcours des ménages. Il s'agit notamment de redonner à la relation humaine la place que vous appelez de vos vœux, afin que la procédure ne soit pas uniquement numérisée et que les candidats bénéficient de conseils. On en sait l’importance pour de nombreux ménages.

Cette semaine, vous examinerez la proposition de loi visant à ouvrir le tiers financement à l’État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique. J'espère qu'elle offrira l'occasion d'étendre les bienfaits que MaPrimeRénov' apporte déjà aux particuliers, et d'optimiser le dispositif.