16ème législature

Question N° 13474
de Mme Catherine Jaouen (Rassemblement National - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > justice

Titre > Accompagnement juridique des victimes de VIF

Question publiée au JO le : 05/12/2023 page : 10827
Réponse publiée au JO le : 21/05/2024 page : 4073
Date de changement d'attribution: 12/01/2024
Date de signalement: 20/02/2024

Texte de la question

Mme Catherine Jaouen interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'accompagnement juridique immédiat des victimes de violences intrafamiliales et conjugales lors du dépôt de plainte. Mme la députée rappelle que l'article 63-3-1 du code de procédure pénal prévoit que dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à être assistée par un avocat. Si elle n'est pas en mesure d'en désigner un ou si l'avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu'il en soit commis un d'office par le bâtonnier. Mme la députée interroge M. le ministre sur l'opportunité de créer un parallèle avec les victimes de violences intrafamiliales et conjugales dans le cadre du dépôt de plainte. En effet, elle souligne que si, à l'exemple du département de Vaucluse où une convention liant M. le bâtonnier à la Maison Mazarine, ainsi qu'à l'Association de médiation et d'aide aux victimes, des avocats seront amenés à assurer des permanences mensuelles, les dispositifs en faveur des victimes connaissent une amélioration notable, il est primordial de renforcer leur accompagnement juridique. La loi française autorise ainsi que le gardé à vue puisse bénéficier du conseil d'un avocat dès la première heure de GAV, tout comme elle permet de mobiliser l'aide juridictionnelle. Aujourd'hui, on constate que les victimes méconnaissent leurs droits, mais surtout l'arsenal juridique que la loi met à leur disposition : éloignement du conjoint violent du domicile, prise en charge des frais inhérents au maintien à domicile de la victime et des enfants, ordonnances d'éloignement, etc. Mme la députée interpelle donc M. ministre sur l'opportunité de faire un parallèle entre le gardé à vue disposant du droit de conseil juridique dès la première heure de GAV, avec la possibilité que les commissariats, postes de police recevant les victimes aient la possibilité de disposer d'une liste d'avocats volontaires en mesure de conseiller les victimes, dès le dépôts de plainte, pour entamer les bonnes démarches permettant de protéger victimes et enfants. Elle demande s'il serait possible de faire évoluer la loi ou les réglementations aux fins qu'en lien avec les barreaux, des listes d'avocats dédiés puissent être communiquées aux victimes, dès le dépôt de plainte.

Texte de la réponse

Le ministère de la Justice est pleinement engagé dans l'accompagnement et l'accès au droit des victimes d'infractions pénales tout au long de la procédure pénale. Cette attention s'inscrit en outre entièrement dans la politique pénale prioritaire de lutte contre les violences au sein du couple dans laquelle est engagé le ministère de la Justice, au bénéfice des victimes de violences intrafamiliales. Outre l'accompagnement par le ministère de la Justice du renforcement de l'arsenal législatif intervenu au cours des dernières années et notamment la possibilité pour les professionnels de santé de signaler sous certaines conditions les violences conjugales, même sans l'accord de la victime, à la suite de la loi du 30 juillet 2020, la création d'une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales visant à les soutenir financièrement pour se mettre à l'abri à la suite de l'adoption de la loi du 28 février 2023, la prise en compte des intérêts des victimes au cours de la procédure pénale à la suite de l'adoption du décret n° 2022-656 du 25 avril 2022. L'accompagnement juridique des victimes de violences intrafamiliales se trouve en outre garanti par l'article 10-2 du code de procédure pénale, lequel énumère l'ensemble des droits accordés à la victime, qui lui sont notifiés par l'officier ou l'agent de police judiciaire en charge de recueillir sa déposition. Cet article prévoit que lui sont notamment notifiés, dès le recueil de sa plainte ou déposition, outre le droit d'être assistée par une association d'aide aux victimes agréée, le droit d'être assistée d'un avocat et de bénéficier, si les conditions d'accès sont réunies, de l'aide juridictionnelle. Plus spécifiquement et dans la continuité des mesures issues du Grenelle destinées à améliorer l'accompagnement de la victime dès l'initiation de la procédure pénale, de nombreux postes d'intervenants sociaux destinés à être immédiatement mis en relation avec les victimes au sein des services d'enquête ont été créés dans les commissariats et gendarmeries. Au 31 décembre 2023, 468 intervenants sociaux étaient actifs dans les services d'enquêtes, couvrant l'ensemble des départements. Ces intervenants sociaux rencontrent les victimes présentes dans les locaux de police ou de gendarmerie afin de renforcer l'information de leurs droits et de les accompagner dans leurs démarches en les orientant le cas échéant vers les contacts utiles au niveau local, parmi lesquels les permanences d'avocats. Dans ce cadre légal et réglementaire, il importe de rappeler que le ministère de la Justice sensibilise régulièrement les procureurs généraux et procureurs de la République à l'attention devant être portée aux victimes d'infractions commises au sein du couple, tant au stade de l'enquête, qu'au stade de la poursuite et du jugement de ces infractions. La politique pénale de lutte contre les violences intrafamiliales se caractérise en effet par une volonté renouvelée de faciliter l'accès au droit des victimes et la connaissance et l'exercice de leurs droits par celles-ci, et ce dès le stade du dépôt de plainte. Ainsi par dépêche du 24 septembre 2021, le ministère de la Justice préconise notamment aux procureurs généraux et procureurs de la République de faire accompagner les victimes par des intervenants sociaux ou l'association d'aide aux victimes, de prévoir l'assistance de la victime par un avocat lors de confrontations ou bien encore de mettre en place des permanences « urgences familiales » avec désignation d'un avocat formé aux violences. Dans le cadre de ces orientations, de nombreux dispositifs sont déployés localement afin d'assurer l'accompagnement juridique effectif de la victime dès le recueil de sa plainte, en prévoyant notamment son orientation systématique et immédiate vers les associations d'aide aux victimes et en concluant des protocoles locaux associant les barreaux, afin de prévoir la possibilité d'une intervention en urgence d'un avocat au soutien des victimes de violences intrafamiliales lorsque celles-ci en font la demande. Ainsi, à titre d'illustration de ces pratiques, le parquet de Reims, l'ordre des avocats du barreau de Reims, l'association France Victimes 51 et la direction départementale de la sécurité publique de la Marne ont signé une convention qui permet, à titre expérimental, la présence de l'avocat pour le dépôt de plainte en matière de violences conjugales. Le barreau de la Seine-Saint-Denis comprend quant à lui un groupe « Droits des femmes victimes de violences » dont les membres se sont engagés à intervenir en urgence au titre de l'aide juridictionnelle, et à suivre les formations relatives au processus de violences. Le tableau des avocats du groupe de permanence est transmis à l'ensemble des partenaires amenés à intervenir après un signalement de faits de violences (associations, services enquêteurs, mairies, urgences). Le ministère assure la promotion de ces partenariats locaux afin de favoriser le déploiement de ces bonnes pratiques sur l'ensemble du territoire en les diffusant sur l'intranet destiné à tous les agents. Il n'est ainsi pas nécessaire de modifier le cadre légal d'autant que ces conventions avec les barreaux ont vocation à se multiplier dans le cadre des comités de pilotages institués par le décret du 23 novembre 2023 portant création des pôles spécialisés en matière de violences intrafamiliales au sein de toutes les juridictions.