16ème législature

Question N° 14123
de M. Damien Maudet (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Haute-Vienne )
Question écrite
Ministère interrogé > Culture
Ministère attributaire > Culture

Rubrique > presse et livres

Titre > Alerte à la possible censure de trois médias indépendants

Question publiée au JO le : 26/12/2023 page : 11642
Réponse publiée au JO le : 14/05/2024 page : 3844
Date de changement d'attribution: 12/01/2024

Texte de la question

M. Damien Maudet alerte Mme la ministre de la culture au sujet des trois médias auxquels les subventions publiques ont été retirées sans raison apparente, sauf celle de ne pas soutenir la politique gouvernementale. En 2023, sans aucune explication apparente, Télé Millevaches, IPNS et La Trousse corrézienne ne bénéficieront pas du fonds de soutien aux médias d'information sociale de proximité (FSMISP). Alors que jusqu'ici ils pouvaient compter sur cette aide publique, ces organes de presse implantés sur le plateau des Millevaches et alentour, couvrant un territoire « hyper-rural » sur plusieurs départements de Nouvelle-Aquitaine, ne figurent soudainement plus dans la liste des titres soutenus. « Nos dossiers de demande de financement ont fait l'objet d'une instruction différenciée. Le jour de la commission, ils n'ont pas été présentés ! », s'est alarmé Franck Dessommes, administrateur de Télé Millevaches, qui s'est exprimé sur France 3 Limousin le 7 décembre 2023. Pour ces médias associatifs, ces aides publiques sont pourtant vitales. Cela représentera près de 20 000 euros de moins pour Télé Millevaches, 3 500 euros supprimés pour IPNS et 9 000 euros envolés pour La Trousse corrézienne. Autant d'argent dont dépendent salariés et bénévoles de ces organismes. Notamment dans le cas de Télé Millevaches, la plus vielle télévision associative de France, qui compte cinq employés et dont l'avenir est désormais rendu incertain. Ils font pourtant vivre et rayonner les communes rurales au quotidien grâce à une information indépendante essentielle. Mais alors, pourquoi ce retrait si soudain de subvention ? Thierry Letellier, maire de La Villedieu, commune de cinquante habitants du plateau de Millevaches, dans la Creuse, tient surement la réponse à cette question : « C'est une forme de censure parce que ces médias vont gratter là où ça fait mal » et va jusqu'à qualifier cette décision de « scandaleuse ». Oui, elle l'est ! Pour cause, selon les responsables de ces trois médias, le ministre de l'intérieur ne serait pas extérieur à cette décision. En août 2023 déjà, Le Monde révélait que plusieurs associations du plateau de Millevaches, parmi lesquels figuraient ces trois médias, avaient été placées sur une « liste rouge » par les préfets, qui dépendent du ministère de l'intérieur. La boucle étant bouclée, ces associations n'ont pas reçu certaines subventions. Une perte sèche pour ce monde associatif rural qui pourrait s'élever à 200 000 euros. Alors même que le FSMISP avait été mis en place en 2015, au lendemain des attentats de Charlie Hebdo, dans l'idée de soutenir la liberté d'expression, il est aujourd'hui utilisé pour couper le sifflet de ceux qui ne vont pas dans le sens du Gouvernement. « Ça a toujours été un territoire très à gauche, nourri par des vagues de néo-ruraux arrivés au XXe siècle qui menaient des expérimentations politiques et sociales », souligne Thierry Letellier. De quoi reprocher aux associations d'être proches de mouvements comme les Soulèvements de la Terre, que Gérald Darmanin a tenté de dissoudre en juin 2023. 90 % des médias en France sont détenus par 9 milliardaires, défendant plus leurs intérêts personnels que l'intérêt public. Il est vital, aujourd'hui plus que jamais, de soutenir la presse associative, sans menace de censure par coupes budgétaires arbitraires. Par ailleurs, les associations ne peuvent être condamnées à vivre ou mourir selon le bon vouloir d'un seul homme, qu'elles aillent ou non dans son sens du récit. Il lui demande si elle va réparer cette injustice et empêcher cet acte de censure.

Texte de la réponse

Le fonds de soutien aux médias d'information sociale et de proximité (FSMISP) a été créé en 2016, à la suite des attentats de Charlie Hebdo, dans l'objectif de soutenir l'information locale et la liberté d'expression. Ces médias contribuent à la vigueur du débat démocratique local en donnant la parole aux habitants des territoires ruraux et urbains. Ils sont un vecteur d'information et un facteur de cohésion sociale, et contribuent à valoriser l'image des territoires et à la faire évoluer. Ils permettent à un large public de se familiariser avec la pratique journalistique, participant ainsi de l'objectif d'éducation aux médias. Doté en 2023 d'un budget supérieur à 1,8 M€, le FSMISP a bénéficié cette année à 131 médias pour 211 dossiers de candidature déposés. Contrairement aux informations connues à la date de rédaction de la question écrite, les médias Télé Millevaches, IPNS et La Trousse corrézienne, comptent parmi les bénéficiaires de l'aide en 2023. Ils ont reçu respectivement une aide de 22 500 € pour Télé Millevaches, 10 000 € pour La Trousse corrézienne et 3 500 € pour IPNS, soit un soutien financier en hausse par rapport à 2022 pour les deux premiers et stable dans le dernier cas. L'obtention d'une aide au FSMISP n'ouvre pas droit automatique au renouvellement de la subvention l'année suivante. Les dossiers sont l'objet d'une instruction chaque année visant à évaluer l'offre éditoriale des médias au regard de : leur insertion dans un territoire et leur contribution à la mission de communication sociale de proximité ; leur contribution à l'intégration et à la lutte contre les discriminations ; la dimension d'éducation aux médias et à la liberté d'expression ; l'association des habitants au projet ; la capacité à favoriser les échanges entre les groupes sociaux et culturels et l'expression des différents courants socio-culturels ; la contribution au développement local et à la protection de l'environnement. Les dossiers de Télé Millevaches, La Trousse corrézienne et IPNS bénéficient du soutien du FSMISP au titre de 2023 au seul motif que leurs offres éditoriales satisfont à ces critères fixés par le décret du 26 avril 2016.