16ème législature

Question N° 144
de M. Sylvain Carrière (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Hérault )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère attributaire > Transition écologique et cohésion des territoires

Rubrique > environnement

Titre > Place Aristide Briand Sète

Question publiée au JO le : 31/01/2023
Réponse publiée au JO le : 08/02/2023 page : 934

Texte de la question

M. Sylvain Carrière alerte M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les travaux de la place Aristide Briand en centre ville de Sète dans l'Hérault. La municipalité y a entamé la destruction de la place pour construire un nouveau parking souterrain. Celui-ci vise à créer plus de 300 places de voiture. Or cette place comporte 77 arbres remarquables dont 52 doivent être arrachés et déplacés dans un lieu tiers pour la bonne réalisation du projet. Plusieurs centaines d'habitants s'y opposent et se sont réunis en un collectif, Bancs Publics, afin de défendre les aspects patrimoniaux et écologiques de la place. Un autre parking, Jean Jaurès, construit dans des conditions hydrologiques similaires, est souvent fermé pour cause d'inondations par remontée de nappes. 72 plaintes ont ainsi été déposées contre le projet place Aristide Briand par anticipation au risque lié au retrait-gonflement des argiles qu'implique un tel projet en zone de remontée de nappe. Le 15 décembre 2022, après plus d'une année de lutte pour la préservation de la place, le tribunal administratif suspend les travaux place Aristide Briand. Victoire pour le collectif citoyens Bancs Publics ainsi que pour la préservation des arbres et du patrimoine de la place. Victoire ? De courte durée car le préfet de l'Hérault a décidé de passer en force en autorisant l'arrachage des 52 arbres le 21 décembre 2022. Ce passage en force, en dépit de toute évaluation environnementale et du principe « éviter réduire compenser », n'est pas du simple fait du préfet mais bien une volonté de l'État. Dans le même temps, la préfète d'Indre-et-Loire s'est opposée à la destruction de terres agricoles pour l'implantation d'un projet d'incubateur à start up en refusant d'accorder une autorisation. Elle a pour cela été évincée. Dès lors, pourquoi communiquer sur l'étonnement et « l'imprévisibilité du changement climatique » lors des vœux du Président de la République ? M. le député demande l'arrêt pur et dur de l'arrachage de ces arbres, il demande que l'État fasse son travail de planificateur écologique en statuant de manière claire sur ce genre de projet écocide. M. le ministre défend les ZFE ? Pourquoi alors œuvrer en faveur des nouveaux parkings en centre-ville et donc du tout voiture ? M. le ministre peut agir vite et fort. Il lui demande s'il va le faire.

Texte de la réponse

TRAVAUX DE LA PLACE ARISTIDE-BRIAND À SÈTE


Mme la présidente. La parole est à M. Sylvain Carrière, pour exposer sa question, n°  144, relative aux travaux de la place Aristide-Briand à Sète.

M. Sylvain Carrière. Je souhaite vous alerter sur les travaux de la place Aristide-Briand dans le centre-ville de Sète, dans l'Hérault. La municipalité a entamé la destruction de la place pour construire un nouveau parking souterrain, doté de plus de 300 places pour les voitures. Or cette place compte soixante-dix-sept arbres remarquables, dont cinquante-deux doivent être arrachés et déplacés dans un lieu tiers pour la bonne réalisation du projet. Plusieurs centaines d'habitants s'y opposent et se sont réunis dans un collectif, Bancs publics, afin de défendre les aspects patrimoniaux et écologiques de la place. Un autre parking, Jean-Jaurès, construit dans des conditions hydrologiques similaires, est souvent fermé pour cause d'inondation par remontée de nappe.

Soixante-douze plaintes ont été déposées contre le projet de la place Aristide-Briand par anticipation des risques liés au retrait-gonflement des argiles qu'impliquent un tel projet en zone de remontée de nappe.

Le 15 décembre 2022, après plus d'un an de lutte pour la préservation de la place, le tribunal administratif a suspendu les travaux place Aristide-Briand. C'est une victoire pour le collectif citoyen Bancs publics, ainsi que pour la préservation des arbres et du patrimoine de la place. Mais cette victoire fut de courte durée : le 21 décembre 2022, le préfet de l'Hérault a décidé de passer en force en autorisant l'arrachage des cinquante-deux arbres.

Ce passage en force, en dépit de toute évaluation environnementale et du principe éviter réduire compenser, n'est pas le seul fait du préfet : il répond à une volonté de l'État. Dans le même temps, la préfète d'Indre-et-Loire a été évincée après s'être opposée à la destruction de terres agricoles pour l'implantation d'un projet d'incubateurs à start-up et avoir refusé d'accorder une autorisation.

Dès lors, pourquoi faire l'étonné et communiquer sur l'imprévisibilité du changement climatique lors des vœux du Président de la République ? Je plaide pour l'arrêt pur et simple de l'arrachage de ces arbres et demande à l'État de s'en tenir à son travail de planificateur écologique en statuant de manière claire sur ce type de projet écocide.

Comment pouvez-vous défendre les zones à faibles émissions (ZFE) et la réduction de la pollution atmosphérique à l'origine de 40 000 morts par an quand vous autorisez la construction d'un parking de 300 places en plein centre-ville ? Quelle incohérence !

Sète n'est pas concernée par l'instauration d'une ZFE, car son agglomération compte moins de 150 000 habitants. Mais où est l'étude d'impact sur la pollution supplémentaire qu'entraînerait la construction d'une telle infrastructure ? Que faites-vous des arbres qui participent à filtrer l'air et apportent de l'ombre, réduisant ainsi les phénomènes d'îlots de chaleur urbains ?

Vous êtes l'autorité compétente pour statuer sur un tel chantier et pourriez envoyer un message fort en tant que secrétaire d'État chargée de l'écologie : celui d'un gouvernement à l'écoute, soucieux de la protection de l'environnement, soucieux de nos concitoyens, dont plus de 16 000 ont signé la pétition demandant la suspension du chantier. La France et nos enfants vous regardent. Je vous regarde aussi et attends une prise de position ferme.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l’écologie.

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l’écologie. Le code de l'environnement prévoit que les parkings publics de plus de cinquante emplacements ne soient soumis à évaluation environnementale qu'après un examen préalable au cas par cas. C'est donc dans le cadre de cette procédure d'examen au cas par cas que les services du préfet de la région Occitanie ont été saisis par le maître d'ouvrage. Sur la base de la description du projet, du contexte environnemental local et des engagements du maître d'ouvrage, le préfet de région a considéré que la prise en compte de l'environnement et de la santé humaine était suffisante et a décidé de ne pas soumettre le projet au processus d'évaluation environnementale, et donc à la réalisation d'une étude d'impact.

La demande de la société publique locale (SPL) du bassin de Thau était accompagnée d'éléments engageant le maître d'ouvrage : suppression d'environ 400 places de stationnement en surface, extension de la zone piétonne, mise en place de mesures d'évitement, réduction des effets négatifs du projet. La décision de non-soumission à évaluation environnementale est donc valable pour le projet présenté au préfet de région.

Il est à noter que l'opération de déplantation puis de replantation des arbres à proximité, tout en conservant une partie non négligeable des tilleuls argentés plantés récemment – en 2017 –, ainsi que la plantation ultérieure d'un nombre d'arbres supérieur au nombre actuel, plaidait pour l'autorisation de ces travaux.

Dans l'hypothèse où des données complémentaires tendant à modifier l'appréciation de l'état initial du projet seraient produites, le maître d'ouvrage devra s'interroger sur la nécessité de redéposer une demande d'examen au cas par cas auprès du préfet de région, pour confirmation de la non-nécessité de soumission à l'évaluation environnementale. Le maître d'ouvrage pourrait également, dans ce cas, se soumettre volontairement à une évaluation environnementale, ce qui entraînerait la production d'une étude d'impact et une consultation du public.

Mme la présidente. La parole est à M. Sylvain Carrière.

M. Sylvain Carrière. Pour ce type de chantier, le maître d'ouvrage doit effectivement réaliser une étude environnementale – ce qui a été le cas. Mais elle semble incomplète et certains éléments nous laissent douter de son bien-fondé. En effet, dans un premier rapport au cas par cas déposé sur le site de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) Occitanie, il fait état de la nécessité d'un pompage de 180 mètres cubes par heure pour la bonne réalisation des travaux. Or, dans la seconde étude, identique en tous points, seuls 30 mètres cubes par heure sont annoncés.

Bien entendu, les arbres remarquables arrachés doivent être compensés ; mais les racines de ceux qui vont être replantés ne pourront se développer à cause du béton. Les arbres ne retrouveront donc jamais une taille adéquate – ils resteront des arbustes.