Instauration d'un moratoire sur les décrets quant à l'artificialisation des sols
Question de :
M. Guy Bricout
Nord (18e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires
M. Guy Bricout attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les suites de la loi Climat et résilience en matière d'artificialisation des sols. En effet, il s'avère que les préfets bloquent d'ores et déjà des élus locaux dans la modification de leur PLU en arguant du fait que ceux-ci ne permettent pas d'atteindre l'objectif de réduction de la consommation d'espace de 50 % dans les 10 ans. Et ce alors que les conférences des Scot ont jusqu'au 22 octobre 2022 - selon la loi - pour rendre leurs propositions devant servir de base à la mise à jour des Sraddet puis des Scot. M. le député appelle l'attention sur le fait que ces refus hâtifs et ne respectant pas le tempo fixé par la loi freinent d'ores et déjà le développement de l'attractivité économique, industrielle, culturelle de nombre des territoires. Par ailleurs, cet objectif de réduction de 50 % de la consommation d'espace en dix ans aurait pour conséquence une augmentation de l'inflation foncière. Aussi, il lui demande s'il pense, suite aux requêtes formulées déjà par de nombreux élus face à ces différents risques, instaurer un moratoire sur les décrets d'application de la loi Climat et résilience relatifs à la lutte contre l'artificialisation des sols, ceci afin de permettre aux acteurs concernés que sont les élus locaux d'anticiper l'application de cet objectif via la concertation.
Réponse publiée le 6 décembre 2022
La loi « Climat Résilience » du 22 août 2021 a fixé l'objectif d'atteindre le « zéro artificialisation nette des sols » en 2050, avec un objectif intermédiaire de réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers dans les dix prochaines années. Cette trajectoire progressive est à décliner dans les documents de planification et d'urbanisme, et doit être conciliée avec l'objectif de soutien de la construction durable, en particulier dans les territoires où l'offre de logements et de surfaces économiques est insuffisante au regard de la demande. Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a rappelé dans une circulaire datée du 4 août 2022 à destination des préfets qu'il est nécessaire d'attendre les résultats de la concertation conduite localement entre les collectivités, au sein des conférences de Schéma de cohérence territoriale (SCOT) et au sein de chaque région, avant d'appliquer la réforme relative à la réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers aux territoires infrarégionaux. Ces discussions entre collectivités territoriales correspondent au travail de territorialisation qui est en cours au niveau régional et infra-régional et qui conduira à la mise en conformité des documents de planification et d'urbanisme (schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), SCOT, PLU, cartes communales) avec les objectifs de la loi « Climat et Résilience ». Pour autant, si la déclinaison territoriale est échelonnée dans le temps, l'objectif national de réduction de 50% couvre bien l'ensemble de la première tranche de dix années et ce depuis la promulgation de la loi. Ainsi, pour créer les conditions d'une bonne application de la loi à moyen terme, les élus concernés sont sensibilisés au fait qu'il convient de veiller d'ores et déjà à la réduction de la consommation des espaces à leur niveau et ce d'ici l'approbation ou l'évolution de leur document d'urbanisme. Même dans l'attente des propositions des conférences de SCOT et des travaux engagés par les régions, cela implique de ne pas retenir dans les documents d'urbanisme en cours de modification des hypothèses de consommation manifestement incompatibles avec une politique de sobriété foncière de maîtrise de l'étalement urbain. En ce qui concerne l'inflation foncière liée à la raréfaction du foncier, de nombreux outils existent et peuvent permettre de réguler le marché immobilier : usage du droit de préemption, constitution de réserves foncières le cas échéant par déclaration d'utilité publique, ou création de zones d'aménagement différé au sein desquelles les prix sont gelés pendant 6 ans en vue d'un aménagement public par une collectivité locale. À ce titre, les établissements publics fonciers (EPF) peuvent accompagner les collectivités dans leur stratégie foncière : ils acquièrent en effet du foncier pour le compte des collectivités ou de l'aménagement qu'elles ont désigné. Les EPF peuvent aussi effectuer des minorations foncières en mobilisant la taxe spéciale d'équipement (TSE), en particulier pour des projets très coûteux et déficitaires comme la reconversion de friches. Ce mécanisme conduit l'EPF à minorer les prix de cession lors du rachat du foncier par les collectivités territoriales. Cette pratique contribue à maîtriser la spéculation foncière et immobilière. Enfin, les décrets mentionnés dans la question ne fixent pas d'échéances et d'objectifs chiffrés. Ils précisent certaines modalités d'application de la loi, en particulier pour les régions couvertes par un schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET). Il n'est pas prévu de moratoire sur ces textes. Mais comme l'a évoqué la Première ministre dans son discours au 18ème congrès des Régions de France à Vichy le 16 septembre 2022, un travail de concertation et de réflexion se poursuit notamment avec des parlementaires et des associations nationales d'élus sur les conditions de mise en œuvre de la réforme vers le « zéro artificialisation nette ».
Auteur : M. Guy Bricout
Type de question : Question écrite
Rubrique : Urbanisme
Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires
Dates :
Question publiée le 20 septembre 2022
Réponse publiée le 6 décembre 2022