16ème législature

Question N° 14549
de M. Francis Dubois (Les Républicains - Corrèze )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et souveraineté alimentaire
Ministère attributaire > Agriculture et souveraineté alimentaire

Rubrique > agriculture

Titre > Crise de la filière apicole, concurrence déloyale

Question publiée au JO le : 30/01/2024 page : 554
Réponse publiée au JO le : 12/03/2024 page : 1822

Texte de la question

M. Francis Dubois appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la grave crise que traverse actuellement la filière apicole française, notamment limousine. Habituellement, les apiculteurs écoulent majoritairement leur production de miel en vendant directement à des conditionneurs en circuit long. Ce circuit de vente leur assure en temps normal un chiffre d'affaires correct et leur permet d'en tirer des revenus fiables. Or dans un contexte déjà difficile où la consommation de miel est en baisse du fait de la forte inflation des produits alimentaires, il ressort que pour l'année 2023, la vente en circuit long a été catastrophique : les conditionneurs n'ont pas acheté assez - les apiculteurs se retrouvant ainsi avec des stocks énormes sur les bras - et quand ils ont acheté, les prix d'achat proposés aux apiculteurs ont été divisés par deux. Les conditionneurs, qui sont au nombre de 5 en France et dont le principal détient près de 50 % du marché, préfèrent se tourner vers l'import et acheter massivement en Europe ou hors Union européenne du « miel » à bas coût (en 2022, 30 000 tonnes de miel ont été importées, pour une consommation française de 40 000 tonnes). Ce miel moins cher est certes plus rentable pour les conditionneurs et leur permet de répondre aux demandes de prix bas de la grande distribution mais il est dans le même temps d'une piètre qualité et d'origine douteuse. Les contrôles auxquels doivent être soumis ces miels étrangers importés seraient en partie biaisés selon la filière apicole puisque l'un des plus grands laboratoires d'analyses appartient au plus gros conditionneur qui se retrouve ainsi juge et partie. L'office européen de lutte anti-fraude a mis à jour une fraude importante : 30 % de ces miels seraient frelatés et composés d'un simple mélange artificiel de fructose et de glucose et sans intervention des abeilles. De tels agissements trompent le consommateur et le mettent en danger. Les apiculteurs dénoncent cette concurrence déloyale aux conséquences graves pour la filière : dès cet hiver, nombre d'entre eux se retrouvent en grandes difficultés, notamment de trésorerie, du fait des lourdes charges qu'ils doivent néanmoins continuer à payer et le risque de voir des exploitations disparaître en 2024 est réel. La concurrence déloyale dont est victime la filière apicole française est un exemple type de ce qui dysfonctionne aujourd'hui dans l'agriculture et qui explique notamment la crise agricole que l'on traverse. Sachant le service rendu par les pollinisateurs à toute l'agriculture et la nécessité d'assurer la souveraineté alimentaire du pays, il est urgent de protéger la filière apicole française. En conséquence, pour calmer l'inquiétude grandissante des apiculteurs, notamment en Corrèze, il l'interroge sur les mesures qu'il entend prendre pour soutenir cette filière d'excellence et dans quels délais. Il lui demande également de renforcer les contrôles des laboratoires qui analysent les miels d'import pour aller vers plus de transparence et lutter ainsi contre la concurrence déloyale étrangère.

Texte de la réponse

La filière apicole française est confrontée à diverses difficultés, relatives à la commercialisation et à l'accumulation des stocks de miel. En outre, de nombreux apiculteurs subissent des pertes de production liées à la recrudescence des aléas climatiques. Dans ce contexte, le Gouvernement a annoncé, le 23 février 2024, la mise en place d'un soutien d'urgence exceptionnel doté d'une enveloppe de 5 millions d'euros (M€) prenant la forme d'avances de trésorerie, d'aides conjoncturelles, ainsi que de prises en charge des cotisations de mutualité sociale agricole. Ce dispositif, dont les conditions d'accès seront définies en concertation avec les acteurs de la filière apicole, a pour objectif de soutenir les apiculteurs professionnels connaissant des difficultés de trésorerie. Par ailleurs, l'État poursuivra son accompagnement de la filière au moyen d'un plan d'actions structuré autour de 4 axes. Tout d'abord, le Gouvernement souhaite améliorer la réglementation relative à l'étiquetage de l'origine des miels et renforcer les contrôles sur l'authenticité et la qualité des produits, afin de lutter contre les fraudes et améliorer la transparence de l'information fournie au consommateur. Cet axe d'action s'inscrit dans le cadre de l'accord entre le Conseil de l'Union européenne (UE) et le Parlement européen, activement défendu par la France, visant à rendre obligatoire une indication claire du pays producteur du miel par ordre pondéral décroissant, et non plus seulement s'il provient ou non de l'UE, comme c'est le cas pour les mélanges de miels. De plus, l'État mobilisera une enveloppe complémentaire de 500 000 euros (€), afin de soutenir des actions de communication et de promotion des produits de la ruche. Des travaux seront également menés pour améliorer la connaissance du marché du miel et encourager les partenariats entre producteurs et conditionneurs, en donnant à la filière les outils d'un pilotage renforcé. Enfin, le Gouvernement veillera à conforter la résilience de la filière apicole, par un renforcement du soutien apporté aux actions sanitaires à hauteur de 200 000 €, pour un montant total de 1,8 M€. Dans ce cadre, des travaux seront engagés pour traiter les conséquences de la prolifération du frelon asiatique. Ainsi, le ministre chargé de l'agriculture demeure pleinement engagé aux côtés de la filière apicole, dont il mesure l'excellence et l'engagement des acteurs au quotidien.