16ème législature

Question N° 147
de M. Jean-Félix Acquaviva (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires - Haute-Corse )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Agriculture et souveraineté alimentaire
Ministère attributaire > Agriculture et souveraineté alimentaire

Rubrique > agriculture

Titre > Réforme de la PAC et avenir de l'élevage agro-sylvo-pastoral de la Corse

Question publiée au JO le : 31/01/2023
Réponse publiée au JO le : 08/02/2023 page : 924

Texte de la question

M. Jean-Félix Acquaviva alerte M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la nouvelle orientation du Plan stratégique national établissant le règlement d'aides de la Politique agricole commune (PAC) qui prévoit un seuil de chargement animal minimum de 0,2 UGB/ha (unité gros bétail par hectare). En l'espèce, ce nouveau taux plancher tend à condamner à la disparition une large frange des cheptels de différents massifs, au premier rang desquels celui de la Corse, mais également ceux des Alpes, du Massif Central, des Pyrénées, ou du Jura. Par rapport aux autres types d'élevage intensifs, ces élevages pastoraux de montagne de haute altitude ou au climat méditerranéen sont qualifiés de « peu productifs » mais apportent une contribution essentielle à la valorisation agricole, à l'entretien des sols, à la protection de la biodiversité et à l'emploi dans des zones très isolées aux conditions climatiques et géographiques souvent difficiles. Ces inquiétudes vis-à-vis de la réforme de la PAC viennent s'ajouter à des situations déjà fortement fragilisées par la conjonction de plusieurs crises relatives à la sécheresse, à l'explosion du coût des intrants ainsi qu'aux problèmes sanitaires. Le risque est donc grand d'une mort annoncée de l'élevage en Corse et dans ces territoires. À chaque réforme de la PAC, des débats récurrents ont lieu en faveur d'une reconnaissance de la spécificité des surfaces pastorales de montagne et insulaires telles que les châtaigneraies, les chênaies ainsi que les parcours ligneux. Cette demande n'est jamais entendue. Une fois de plus, ces surfaces constituent pourtant le fondement du système d'élevage agro-sylvo-pastoral de la Corse notamment, qui confère la typicité, la qualité et la renommée des produits agricoles du territoire. C'est pourquoi M. le député souhaiterait connaître la position du Gouvernement vis-à-vis des inquiétudes légitimes soulevées par les éleveurs et les organisations agricoles pastorales au sujet de l'instauration de ce nouveau seuil de chargement animal minimum de 0,2 UGB/ha. Il demande ainsi une révision de cette nouvelle règle afin de ne pas compromettre l'avenir de l'élevage pastoral en Corse notamment et souhaite connaître les perspectives à ce sujet.

Texte de la réponse

ÉLEVAGE AGRO-SYLVO-PASTORAL EN CORSE


Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour exposer sa question, n°  147, relative à l'élevage agro-sylvo-pastoral en Corse.

M. Jean-Félix Acquaviva. La nouvelle orientation du plan stratégique national (PSN) qui établit les règles applicables aux aides de la politique agricole commune (PAC) prévoit un seuil de chargement animal de 0,2 unité de gros bétail (UGB) par hectare. Ce nouveau taux plancher inquiète bon nombre d’éleveurs dans nos massifs, au premier rang desquels celui de la Corse, mais également ceux des Alpes, du Massif central, des Pyrénées et du Jura. À terme, c’est la survie des cheptels qui est en jeu. En effet, comme chacun sait, par rapport aux élevages intensifs, les élevages pastoraux de montagne, de haute altitude ou soumis à un climat méditerranéen sont « peu productifs ». Malgré cette faible productivité, toute relative, ils apportent une contribution essentielle à la valorisation agricole, à l'entretien des sols, à la protection de la biodiversité et surtout à l'emploi, dans des zones souvent très isolées, aux conditions climatiques et géographiques difficiles.

Les appréhensions que suscite la réforme de la PAC interviennent de surcroît dans des situations déjà fortement fragilisées par la conjonction de plusieurs crises liées à la sécheresse, à l'explosion du coût des intrants, ainsi qu'aux problèmes sanitaires. Je le répète, le risque est donc grand d'une mort annoncée de l'élevage en Corse et dans les territoires de montagne.

À chaque réforme de la PAC reviennent les débats concernant la reconnaissance de la spécificité des surfaces pastorales de montagne et insulaires, telles que les châtaigneraies, les chênaies et les parcours ligneux. Cette demande n'est jamais entendue. Ces surfaces constituent pourtant le fondement du système d'élevage agro-sylvo-pastoral, de la Corse notamment, qui confère la spécificité, la qualité et la renommée des produits agricoles du territoire.

C'est pourquoi, madame la ministre déléguée, je vous demande la révision du nouveau seuil minimal de chargement animal, fixé à 0,2 UGB par hectare. L’avenir de l'élevage pastoral en Corse et dans nos massifs ne doit pas être compromis.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées. Tout au long de l'élaboration du plan stratégique national, une attention particulière a été portée aux dispositions applicables aux surfaces pastorales. Les coefficients d'admissibilité ont d'ailleurs été maintenus dans la version finale du plan, adopté le 31 août 2022.

Les griefs de la Commission européenne contre l'actuelle programmation, les difficultés rencontrées lors des contrôles pour vérifier les indices de pâturage et l'évolution vers une évaluation automatisée de l'admissibilité ont conduit à instaurer un critère de chargement pour déterminer l'admissibilité des surfaces concernées, dont l'entretien est principalement assuré par les animaux, en particulier pour les surfaces à forte proportion de ligneux.

Ce critère s'appliquera uniquement aux prairies composées majoritairement de ligneux – arbres, arbustes ou buissons –, dans trente-huit départements du Sud de la France, ainsi qu'aux surfaces de chênaies et de châtaigneraies situées dans la zone Causses-Cévennes et en Corse. Il concernera les exploitations qui déclarent ce type de surfaces, qu'elles soient individuelles, en société ou gestionnaires d'estives. Le taux plancher de chargement sera fixé à 0,2 unité de gros bétail par hectare admissible, ce qui correspond à un type d’élevage extensif et permet d’assurer un entretien minimal des surfaces.

Il ne s’agit pas d’évaluer la capacité fourragère des surfaces concernées, mais de s’assurer que l’exploitation dispose d’un nombre d’animaux suffisant pour maintenir les milieux ouverts et exploitables, et de vérifier l’absence d’enfrichement.

Le taux sera calculé sur le fondement des surfaces admissibles, ce qui permettra de mieux reconnaître l’activité pastorale de ces aires spécifiques. En effet, à la différence des surfaces graphiques utilisées pour calculer le taux de chargement de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), les surfaces admissibles tiennent compte de la diversité des territoires, en appliquant des coefficients d’admissibilité différenciés selon la disponibilité en ressources fourragères.

Dans le cas où le seuil de chargement ne serait pas atteint, les surfaces seront plafonnées, de manière à parvenir au taux de 0,2 UGB par hectare. Le plafonnement ne concernera que les surfaces pastorales composées majoritairement de ligneux et ne sera pas susceptible de remettre en cause l’admissibilité des autres types de pâturage, vérifiés selon d’autres critères. Le dispositif est très technique et très complexe mais il assure une certaine protection ; cela devrait apaiser les inquiétudes que vous avez évoquées dans votre question.