Question écrite n° 15232 :
Régime de TVA applicable aux indemnités de résiliation anticipée d'un bail soumi

16e Législature

Question de : Mme Véronique Louwagie
Orne (2e circonscription) - Les Républicains

Mme Véronique Louwagie appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur le régime de TVA applicable aux indemnités de résiliation anticipée d'un bail soumis à TVA, versées par un bailleur ou par un preneur assujetti à la TVA. Ce régime soulève des difficultés d'application depuis la modification du paragraphe 260 du BOI-TVA-BASE-10-10-50 du Bulletin officiel des finances publiques - Impôts (BOFiP) intervenue le 28 décembre 2022. Dans ce contexte, Mme la députée demande à M. le ministre de bien vouloir préciser si l'indemnité de résiliation anticipée versée par le preneur au bailleur est systématiquement soumise à la TVA en tant que rémunération de la renonciation du bailleur de droit de percevoir le loyer, y compris lorsque le bail ne prévoit pas la possibilité pour le preneur de demander la résiliation anticipée du bail en contrepartie du paiement d'une indemnité dont le montant serait convenu d'avance par les parties. Elle lui demande également de préciser si l'indemnité versée par le bailleur au preneur est également systématiquement soumise à la TVA en tant que rémunération de la renonciation du preneur du droit d'occuper le bien, indépendamment de ce qui adviendra du bien une fois le bail résilié (e.g. occupation par le bailleur, location à un autre preneur, vente, démolition).

Réponse publiée le 4 juin 2024

Conformément aux dispositions des articles 256 et 256 A du code général des impôts (CGI), sont soumises à la taxe sur la valeurs ajoutée (TVA), les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel, c'est-à-dire par une personne qui effectue de manière indépendante une activité économique dans le but d'en tirer des recettes présentant un caractère de permanence. Pour ces opérations, la base d'imposition est constituée par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations (CGI, article 266). La question de savoir si une somme, quelle que soit la dénomination qu'en retiennent les parties ou la réglementation qui l'encadre, constitue la contrepartie d'une opération imposable résulte, au cas par cas, de l‘analyse des circonstances de droit ou de fait dans lesquelles elle est versée. Il s'agit alors de rechercher si les sommes reçues ou à recevoir constituent ou non la contrepartie directe d'une prestation de services ou d'une livraison de biens individualisable effectuée par son bénéficiaire au profit de la partie versante ou le complément du prix d'une telle opération versé par un tiers. Selon une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), une prestation de services n'est effectuée « à titre onéreux », au sens de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, que s'il existe entre le prestataire et le bénéficiaire un rapport juridique au cours duquel des prestations réciproques sont échangées, la rétribution perçue par le prestataire constituant la contre valeur effective du service fourni au bénéficiaire. Ainsi, pour être imposées à la TVA, des indemnités doivent correspondre à des sommes qui constituent la contrepartie d'une livraison de biens ou d'une prestation de services individualisée rendue à celui qui la verse. Des paiements effectués en dehors d'un tel rapport juridique ne constituent pas des opérations imposables. Ces principes et règles sont rappelés par l'administration dans les paragraphes 240 et 250 du bulletin officiel des finances publiques référencé BOI-TVA-BASE-10-10-50. Le paragraphe 260 ne fait que les illustrer par des exemples concrets issus notamment de la jurisprudence européenne ou nationale. Ce paragraphe cite notamment l'arrêt du Conseil d'État (CE) du 15 février 2015 n° 368661, Catleya. Dans cette affaire, le juge a considéré que dans la situation dans laquelle un accord qui avait pour seul objet d'obtenir la libération des locaux afin de permettre au bailleur de disposer de la libre jouissance du local commercial, la libération des locaux par le locataire devait être regardée comme un service, individualisable, rendu au bailleur et lui permettant de conclure un nouveau bail dans des conditions de marché plus avantageuses. La reformulation des développements de ce paragraphe retenue par l'administration pour illustrer cette situation a pour objectif de recentrer l'exemple sur les faits que le CE a eu à juger sans en altérer la portée dans un sens restrictif ou extensif. En tout état de cause, il n'est pas envisageable de présumer qu'une indemnité de résiliation anticipée, qu'elle soit versée par le bailleur ou le preneur, est « systématiquement soumise à la TVA ». En effet, en matière de TVA, l'application des principes et règles rappelés ci-dessus ne peut s'opérer qu'au terme d'une analyse au cas par cas de la situation de l'espèce, à la lumière des circonstances de fait et de droit. Afin de donner de la sécurité juridique aux acteurs, des exemples des différentes distinctions possibles sont d'ores et déjà repris au bulletin officiel des finances publiques. L'administration ne manquera pas de poursuivre cette explicitation, notamment dans le cadre d'une publication plus étendue de rescrits pouvant être considérés comme topiques dans le domaine du traitement des indemnités en matière de TVA.

Données clés

Auteur : Mme Véronique Louwagie

Type de question : Question écrite

Rubrique : Taxe sur la valeur ajoutée

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Dates :
Question publiée le 13 février 2024
Réponse publiée le 4 juin 2024

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