16ème législature

Question N° 15286
de Mme Christelle D'Intorni (Les Républicains - Alpes-Maritimes )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère attributaire > Agriculture et souveraineté alimentaire

Rubrique > associations et fondations

Titre > Lutte contre l'insécurité alimentaire

Question publiée au JO le : 20/02/2024 page : 1077
Réponse publiée au JO le : 16/04/2024 page : 3006
Date de changement d'attribution: 05/03/2024

Texte de la question

Mme Christelle D'Intorni appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur une problématique soulevée par les Restos du cœur, institution fondamentale dans la lutte contre l'insécurité alimentaire. En effet, les représentants de cette organisation caritative lui ont exprimé des préoccupations significatives quant à la qualité nutritionnelle des denrées alimentaires qu'ils reçoivent des entreprises. Mme la députée souhaite rapporter que de nombreuses entreprises, dans un geste louable de générosité et de responsabilité sociale, aient opté pour le don de leurs invendus plutôt que de les détruire, afin d'éviter les coûts liés à l'élimination des déchets. Cependant, certaines se permettent de faire des dons dans un objectif purement intéressé, celui d'éviter de payer des frais de déchetterie. Il résulte de ce qui précède que les inquiétudes des Restos du cœur soient légitimes dans la mesure où ils se plaignent parfois d'être le réceptacle de mauvaises nourritures et de devenir une forme de dépotoir. À cet égard, Mme la députée sait qu'il existe des dispositions législatives. En effet, la loi dite « Garot » de 2016 oblige les magasins alimentaires de plus de 400 m2 à proposer une convention de don à des associations d'aide alimentaire afin qu'elles reprennent les invendus encore consommables lors de leurs ramasses. Aujourd'hui l'article D. 541-310 du code de l'environnement prévoit que les denrées alimentaires soumises à une date limite de consommation (DLC) peuvent faire l'objet d'un don seulement lorsque le délai restant jusqu'à son expiration est, au jour de prise en charge du don par l'association d'aide alimentaire égal ou supérieur à 48 heures. Toutefois, Mme la députée s'interroge sur le respect de ces prescriptions par les acteurs de la distribution et sur les contrôles menés par l'État pour s'assurer de la conformité de ces dons. En conséquence, elle lui demande des éclaircissements sur les mesures que le Gouvernement compte prendre pour garantir que les délais de 48 heures soient respectés.

Texte de la réponse

Le rapport d'information n° 2025 présenté par Mme Graziella Melchior et M. Guillaume Garot en application de l'article 145-7 du règlement de la commission des affaires économiques sur l'évaluation de la « loi Garot » souligne la problématique de la qualité du don et notamment de la distribution de produits difficiles à redistribuer car disposant d'une durée de vie résiduelle courte. Le rapport préconise plusieurs recommandations pour remédier à cette problématique. Par ailleurs, une étude ayant été conduite par l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) a permis de comprendre les causes du gaspillage alimentaire au sein même des associations d'aide alimentaire, le mesurer et tester des actions de réduction s'il ne peut être évité. Cette étude publiée en septembre 2023 a corroboré cette problématique de qualité du don, en lien notamment avec le don de denrées à date limite de consommation (DLC) courtes voire dépassées, et a émis plusieurs recommandations.  L'article D. 541-310 du code de l'environnement indique que les denrées alimentaires données doivent avoir un délai restant jusqu'à expiration de la DLC de 48 heures (h) ou plus, sauf si les associations sont en mesure de redistribuer les denrées concernées dans un délai inférieur. Afin d'assurer l'application de cette disposition et de faciliter les partenariats entre les acteurs de la chaîne alimentaire et les associations d'aide alimentaire, des modèles de conventions de don ont été élaborées et indiquent que le donateur s'engage, d'une façon générale, à mettre à disposition de l'association des denrées dont le délai restant jusqu'à expiration de la DLC figurant sur l'emballage du produit est égal ou supérieur à 48 h au jour de la prise en charge. Le modèle de convention précise que l'association ne récupérera des denrées à DLC de moins de 48 h à compter de la date de prise en charge que si elle a la possibilité de les redistribuer avant expiration de la DLC. Prenant acte de ces constats objectivés et des recommandations leur étant associés, le Gouvernement met en place plusieurs actions afin de diminuer les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des partenariats existants entre les distributeurs et les associations d'aide alimentaire : - en ce qui concerne les sanctions en cas d'infraction, la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (dite loi AGEC) a permis de concrétiser l'une des recommandations du rapport susmentionné en augmentant la sanction liée à la destruction de denrées encore consommables à une amende pouvant atteindre 0,1 % du chiffre d'affaires, et la sanction liée au fait de ne pas proposer une convention de don à une contravention de 5ème classe ; - concernant le renforcement de la règlementation relative à la qualité du don, le décret n° 2019-302 du 11 avril 2019 a introduit l'obligation de mettre en place un plan de gestion de la qualité du don, comprenant un plan de sensibilisation de l'ensemble du personnel, un plan de formation du personnel chargé du don et les conditions d'organisation du don. Cette disposition est entrée en vigueur au 1er janvier 2020. La loi AGEC a élargi le périmètre du plan de gestion de la qualité du don en introduisant des procédures de suivi et de contrôle de la qualité du don ; - s'agissant du respect des dispositions législatives et règlementaires, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a réalisé une enquête nationale en 2021. Le taux d'établissements en anomalie était de 20,87 % pour un total de 345 établissements contrôlés ; - les contrôles sur l'application des dispositions législatives et réglementaires relatives au gaspillage alimentaire seront renforcés dès 2024, notamment pour ce qui concerne les obligations des industries agro-alimentaires (réalisation d'un diagnostic des pertes alimentaires, mise en place d'un plan de gestion de la qualité du don, proposition d'une convention de don aux associations, publicité de leurs engagements en la matière) ; - au sujet de la mise en avant des distributeurs soucieux de la qualité de leurs dons et des contraintes logistiques de leurs associations partenaires : le lancement du label « anti-gaspillage alimentaire » dans le secteur de la distribution associé vise à valoriser les distributeurs les plus vertueux et notamment les dons de qualité tout en prenant en compte la question de la facilitation de la logistique des dons. En outre, le comité national de coordination de la lutte contre la précarité alimentaire (COCOLUPA), installé en septembre 2020 par le ministre chargé des solidarités et de la santé, impliquant les ministres chargés de l'alimentation et du logement, prévoit, dans le cadre du plan d'action pour la transformation de l'aide alimentaire et la lutte contre la précarité alimentaire, de définir les conditions et les mesures visant à garantir la qualité des produits rejoignant une « filière de dons alimentaires » mais aussi de diversifier les sources d'approvisionnement de l'aide alimentaire en vue de répondre aux enjeux du développement durable. Des mesures visant à pallier les problématiques logistiques auxquelles sont confrontées les associations ont été travaillées en partenariat avec les acteurs et sont regroupées dans un livrable dont la publication est prévue prochainement.