Pollutions éternelles (PFAS) de la rivière le Julien (Langres)
Question de :
M. Christophe Bentz
Haute-Marne (1re circonscription) - Rassemblement National
M. Christophe Bentz interroge Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités sur des analyses révélant une pollution par des substances per-et-polyfluoroalkylées (PFAS) dites « pollutions éternelles ». À la suite de l'enquête collaborative internationale Forever Pollution Project, le journal Le Monde a dévoilé une carte des pollutions éternelles en Europe le 23 février 2023. Cette enquête, relayée par la suite dans la presse locale, révèle une contamination de la rivière le Julien dans la zone industrielle (ZI) Les Franchises de Langres (52). L'association SOS Pays de Langres, créée récemment à l'initiative de riverains, s'est emparée du dossier. Cette dernière a commandé de nouvelles analyses qui confirment une pollution de l'eau avec 280 et 1 190 ng/l, mais aussi de la terre avec 24 et 78 µg/kg. Pour le moment le législateur n'a pas retenu de norme, mais le seuil hotspot des experts est de 100 ng/l. En outre, pour des œufs pondus par les poules d'un particulier picorant à proximité en plein air, les analyses sont de 12,7 µg/kg alors que la norme européenne de référence est de 1,7 µg/kg. Les conséquences des polluants éternels sur la santé sont nombreuses : cancers de la thyroïde, cholestérols, etc. Or le site des Franchises de Langres comporte des usines, des productions agricoles et des établissements scolaires. D'autres sites en Haute-Marne et en France étant également concernés par ces contaminations et face à un potentiel scandale sanitaire, il souhaite savoir ce que les autorités publiques comptent entreprendre pour lutter contre la persistance des pollutions et protéger la santé des personnes fortement exposées.
Réponse publiée le 11 juin 2024
Les substances per- ou polyfluoroalkyles (PFAS), large famille d'environ 10 000 composés chimiques, sont des molécules très persistantes, largement répandues dans l'environnement qui représentent un enjeu de santé publique. Pour structurer son action en réponse à ces préoccupations grandissantes, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires a publié le 17 janvier dernier son plan d'action ministériel sur les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS). Ce plan s'appuie sur six axes d'actions ayant pour objectifs la définition de normes réglementaires pour guider l'action publique, la réduction des émissions des industriels, l'amélioration des connaissances sur ces substances et leur restriction sur le marché européen. Comme indiqué dans l'axe 3 du plan, après l'enquête Esteban menée de 2014 à 2016, une nouvelle enquête nationale de biosurveillance Albane va être lancée cette année afin de produire des données complémentaires d'imprégnation aux PFAS et identifier plus précisément les sources et les facteurs d'exposition permettant de mieux cibler les mesures de réduction des expositions. Au niveau européen, le programme de biosurveillance HBM4EU (Human biomonitoring in Europe), mené de 2014 à 2021, a permis d'établir des niveaux de référence concernant l'exposition interne à 12 PFAS chez 1 957 adolescents européens âgés de 12 à 18 ans. Ces données établissent une tendance à la baisse des concentrations en ce qui concerne le PFOA et le PFOS, mais pas pour les autres composés perfluorés. Le partenariat européen PARC (Partnership for the Assessment of Risks from Chemicals), prenant la suite de HBM4EU, va étudier les PFAS afin de surveiller l'imprégnation des populations européennes et de l'environnement, d'identifier les impacts sanitaires de ces substances et de faire le lien avec les travaux règlementaires en vue de réduire les expositions. Ce plan a été complété le 5 avril dernier par la publication d'un plan interministériel sur les PFAS afin de répondre aux préoccupations grandissantes concernant les impactes des PFAS sur la santé humaine. Sur le volet de l'eau potable, de la compétence du ministère de la santé, dans le cadre de la transposition de la directive de 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, une ordonnance, deux décrets et 13 arrêtés ont été publiés fin décembre 2022. Pour ce qui est des nouveaux paramètres, dont les PFAS, leur recherche est rendue obligatoire à partir de janvier 2026, comme prévu par la directive, en lien avec les capacités analytiques existantes. En revanche, les nouvelles limites de qualité entrent en application à partir de janvier 2023, permettant ainsi aux autorités locales de gérer les situations de présence de ces nouveaux paramètres. En ce qui concerne l'amélioration de la connaissance, la surveillance et les normes de rejets industriels, un arrêté ministériel visant à établir un premier état des lieux de la présence des PFAS au sein des rejets aqueux de secteurs industriels a été publié en juin 2023. Cet arrêté cible les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) soumises à autorisation sur un large champ de filières industrielles (environ 5 000 installations industrielles) et permettra de proposer, dans un deuxième temps et au vu de cet état des lieux, une surveillance pérenne des substances majeures qui auront été identifiées, et ainsi d'engager des actions de réduction des émissions de PFAS. Pour aller plus loin, face au constat de la présence ubiquitaire de ces substances dans l'environnement, générant des risques potentiellement non contrôlés, les Pays-Bas et l'Allemagne, avec le soutien de la Norvège, du Danemark et de la Suède, ont préparé une proposition de restriction dans le cadre du règlement REACH, visant à couvrir un large éventail d'utilisations des PFAS. Le dossier rendu public le 7 février 2023 est actuellement soumis à l'expertise par les comités scientifiques de l'Agence européenne des produits chimiques. Les autorités françaises suivent avec attention le déroulement de ce processus de restriction et apportent leur soutien au consortium. Pour ce qui concerne plus précisément le cas des contaminations signalées au niveau de la rivière du Julien à Langres, les investigations sont en cours au sein de la Direction régionale de l'environnement et du logement pour comprendre l'origine de ces contaminations.
Auteur : M. Christophe Bentz
Type de question : Question écrite
Rubrique : Pollution
Ministère interrogé : Travail, santé et solidarités
Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires
Dates :
Question publiée le 20 février 2024
Réponse publiée le 11 juin 2024