Question écrite n° 15621 :
Usine de traitement des déchets : les riverains doivent être écoutés !

16e Législature

Question de : Mme Charlotte Leduc
Moselle (3e circonscription) - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale

Mme Charlotte Leduc alerte M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la création d'une usine de traitement de déchets non dangereux et dangereux à Givet (08600). Elle attire l'attention sur les récents appels des riverains rassemblés en collectifs et professionnels de santé du canton de Givet qui montrent que le développement de cette usine amènera des émissions atmosphériques chargées de particules fines. Ils alertent notamment sur la production d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), de cadmium, de mercure, de plomb, de dioxyde de soufre (SO2), de monoxyde de carbone (CO) et d'oxyde d'azote (NOx). Récemment, de nombreuses études médicales montrent la corrélation entre ces polluants et de graves conséquences sanitaires et environnementales pour la population. Ce sont 950 000 tonnes de déchets par an qui passeront par cette usine, dont 570 000 tonnes de déchets dont la provenance est inconnue. Cela représente plus de 200 passages de camions et 1 167 tonnes de produits dangereux incinérés par jour. L'origine de ces déchets est aujourd'hui inconnue, car si l'entreprise estime que l'ensemble des déchets sera issu des 200 km à la ronde, l'ensemble des déchets ménagers des Ardennes ne représentent que 60 000 tonnes par an. La mission régionale d'autorité environnementale Grand Est fait part de la même inquiétude en demandant à l'entreprise de préciser l'origine de ces déchets. Au vu de la production locale de déchets largement inférieure aux besoins de l'usine, ce projet montre une inadéquation forte avec les objectifs énoncés par le ministère et le plan régional de prévention et de gestion des déchets de la région, qui prônent une gestion locale et une économie circulaire des déchets. De plus, il convient de remettre en cause le sérieux de l'étude d'impact effectuée sur ce projet. Les remontées des habitants montrent que les données ont été récoltées pendant les périodes les plus favorables à l'enquête et ne prennent pas en compte le climat global sur l'année dans la vallée de la Meuse. Plus précisément, l'étude de la pluviométrie a été réalisée du 16 mai au 13 juin et l'étude de la fréquence des vents du 16 au 18 mai 2022. En seulement 4 jours, impossible de savoir la fréquence des vents sur l'année tandis que les mois de mai et juin ne correspondent aucunement à la moyenne pluviométrique de la région. La région est pourtant marquée par des vents dominants et la présence récurrente de brouillards pouvant occasionner la stagnation en basse altitude des rejets polluants. De manière générale, la question de l'impact du dérèglement climatique sur ces données dans les années à venir n'est pas prise en compte. Cela pose un véritable problème de contamination des terres agricoles et des eaux de surfaces et souterraines avoisinantes. Sur la question de l'eau, la mission régionale d'autorité environnementale Grand Est interpelle le manque d'étude environnementale sur les besoins en eau de cette usine et l'interroge au prisme du dérèglement climatique. Enfin, Givet se situant à un carrefour européen et les particules pouvant retomber dans les 200 km2 de diamètre, cela impacterait la France, le Luxembourg, la Belgique et l'Allemagne. En Belgique, la population locale est particulièrement remontée, 8 bourgmestres de la région de Namur se sont insurgés contre ce projet et n'estiment pas avoir été consultés. Pourtant, ce sont des élus locaux et citoyens européens qui seront tout autant impactés. Contenir l'enquête publique au canton français de Givet révèle le manque de sérieux des études réalisées à propos de cette usine. Vu la contestation des citoyens français, belges et allemands, vu l'impact environnemental européen du projet, vu l'avis de mission régionale d'autorité environnementale Grand Est, vu le manque de certitude sur l'origine des déchets et vu l'absence d'une étude d'impact sérieuse et documentée, elle lui demande de suspendre en l'état le projet d'usine de traitement des déchets sur la commune de Givet.

Réponse publiée le 28 mai 2024

Le projet d'usine de traitement de déchets à Givet (Ardennes) vise à l'implantation d'une installation de traitement de déchets issus du bâtiment des travaux publics. La capacité de traitement de l'installation projetée sera de 950 000 t/an. Le pétitionnaire souhaite traiter des déchets provenant de la région Grand-Est, mais aussi de la Belgique et du Luxembourg. Plusieurs installations de traitement sont prévues dans le cadre du projet, et notamment une installation de désorption thermique, visant à éliminer les composés organiques de déchets bitumineux (capacité de traitement de 350 000 t/an pour ces déchets classés comme dangereux). L'enquête publique a été ouverte le 8 janvier 2024. Dans un premier temps, prévue sur une durée d'un mois (comme le prévoit la réglementation), elle a été prolongée de 15 jours, jusqu'au 22 février 2024. La commissaire-enquêtrice a sollicité un délai pour la rédaction de son rapport. L'enquête publique est achevée. Face à cette opposition et aux nombreuses contributions portées sur les registres dans le cadre de l'enquête (environ 1800 contributions ont été portées sur le registre dématérialisé), le porteur de projet a organisé deux réunions publiques le 29 janvier et le 7 février 2024. Ces réunions ont réuni chacune environ 400 personnes. La préfecture attend les avis des conseils municipaux des communes dans le périmètre de l'enquête publique. Deux communes belges font partie du rayon d'affichage et sont donc concernées par l'enquête publique. Dans ce contexte, la Ministre wallonne de l'environnement, de la nature, de la forêt, de la ruralité et du bien-être animal a écrit au préfet des Ardennes afin de lui demander un délai supplémentaire pour lui remettre un avis sur ce projet, délai qui lui a été accordé. A l'issue de cette consultation, la préfecture proposera une décision au conseil départemental de l'environnement, des risques sanitaires et technologiques.

Données clés

Auteur : Mme Charlotte Leduc

Type de question : Question écrite

Rubrique : Déchets

Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires

Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires

Dates :
Question publiée le 27 février 2024
Réponse publiée le 28 mai 2024

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