L'automaticité d'application de pénalités fiscales lors de retard de succession
Question de :
M. André Chassaigne
Puy-de-Dôme (5e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine - NUPES
M. André Chassaigne interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, sur l'automaticité d'application de pénalités fiscales lors de retard de succession. L'article 1701 du code général des impôts prévoit un paiement des droits des actes et mutations antérieur à l'exécution de l'enregistrement, de la publicité foncière ou de la formalité fusionnée. Par dérogation, l'article 1717 autorise un paiement fractionné ou différé. Les articles 641 et suivants fixent les délais de règlement des successions. Ainsi, lorsqu'une une déclaration est déposée en retard, des intérêts de retard sont appliqués, 0,20 % par mois, soit 2,4 % par an et une majoration de 10 % à 80 %, selon la situation. Or dans la majorité des cas, les héritiers ne sont pas responsables du retard pris dans la succession. Trois exemples locaux reflètent parfaitement ces situations. Ainsi, un neveu hérite de sa tante une maison familiale qu'il souhaite conserver. N'ayant pas les ressources suffisantes pour s'acquitter des droits de succession, il met sa maison principale en vente et met plus d'un an à trouver un acquéreur. Autre exemple, une fille hérite de son père décédé en Thaïlande. Elle produit un certificat de décès mais ne peut pas, malgré de nombreuses démarches, obtenir de certificat de coutume. Là encore, la succession est bloquée et les pénalités de retard s'appliquent. Enfin, une femme hérite de son mari décédé prématurément. Il détenait des parts dans un groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) avec une autre personne. Cette dernière souhaite minorer de manière drastique la valeur des parts du défunt. S'en suit une procédure judiciaire relativement longue et couteuse. Là encore, la femme subit des pénalités fiscales de retard. Dans ces trois situations, les ayants droit ne sont pas responsables du retard pris dans le règlement des successions. Pour autant, ils se retrouvent contraints de s'acquitter de pénalités fiscales, sanction qu'ils jugent inique. Ces pénalités devraient être appliquées en fonction de la situation et non pas de matière systématique. Les services fiscaux locaux pourraient alors être à même de juger de la pertinence d'infliger ou pas des pénalités de retard. Au regard de ces arguments, il lui demande si une réflexion est portée afin d'annuler l'automaticité de la mise en place des pénalités fiscales lors de retard pris dans le règlement de succession en laissant aux services fiscaux locaux le seul jugement d'application de ces intérêts de retard.
Réponse publiée le 14 mai 2024
Le dépôt tardif d'une déclaration de succession entraîne l'application, d'une part, d'intérêts de retard et, d'autre part, de majorations. Les intérêts de retard ne constituent pas une sanction mais ont pour seul objet d'indemniser le préjudice subi par l'État du fait du retard subi dans l'encaissement de l'impôt. Quant aux majorations, elles ont pour objet d'inciter les contribuables à déposer dans le délai requis les déclarations qui sont nécessaires à l'administration pour s'assurer que l'assiette et la liquidation de l'impôt acquitté sont conformes à la loi. Cet objectif ne peut être atteint que par l'application de majorations à caractère automatique, sans qu'il soit possible, au niveau législatif, de prendre en compte la grande diversité des situations susceptibles d'être rencontrées. Les obstacles auxquels peuvent être confrontés les contribuables pour satisfaire leurs obligations déclaratives, tels que ceux évoqués par la présente question écrite, peuvent en revanche être pris en compte dans un second temps, au moyen d'une remise gracieuse. En effet, conformément aux dispositions de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales, l'administration a la possibilité de réduire les pénalités, voire de les supprimer totalement dans les situations qui le justifient, après analyse au cas par cas de la situation. À cet effet, les contribuables qui n'ont pas été en mesure de déposer la déclaration de succession dans le délai légal, en règle générale de six mois, peuvent demander à bénéficier d'une remise des pénalités en précisant les circonstances qui ont fait obstacle au respect du délai légal. Cette possibilité de remise, pour laquelle les services locaux procèdent à une analyse bienveillante, est de nature à répondre aux légitimes préoccupations exprimées dans votre question en permettant à l'administration d'adapter les sanctions à chaque situation particulière.
Auteur : M. André Chassaigne
Type de question : Question écrite
Rubrique : Donations et successions
Ministère interrogé : Comptes publics
Ministère répondant : Comptes publics
Dates :
Question publiée le 19 mars 2024
Réponse publiée le 14 mai 2024