16ème législature

Question N° 1684
de Mme Hélène Laporte (Rassemblement National - Lot-et-Garonne )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et souveraineté alimentaire
Ministère attributaire > Agriculture et souveraineté alimentaire

Rubrique > agroalimentaire

Titre > Part croissante des produits importés dans l'alimentation des Français

Question publiée au JO le : 04/10/2022 page : 4308
Réponse publiée au JO le : 21/02/2023 page : 1710

Texte de la question

Mme Hélène Laporte attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la part préoccupante des aliments importés dans les achats de la restauration hors domicile. En effet, pour prendre l'exemple éloquent du poulet, la part de viande importée dans l'assiette des Français, qui était inférieure à 30 % au début des années 2000, est montée à 45 % en 2019. Cette hausse spectaculaire est en grande partie tirée par la restauration hors-domicile où on estime la part de viande de volaille importée à 70-80 %. Ce report vers une alimentation importée est essentiellement motivé par des questions de coût. Ainsi, la hausse de consommation de poulet des Français a très peu profité aux producteurs nationaux et la balance commerciale de la France pour ce produit s'est largement inversée (+450 000 tonnes équivalent carcasse en 1998 ; - 250 000 en 2019). Cette situation contraste fortement avec le discours gouvernemental affichant la souveraineté alimentaire comme une priorité absolue, la « ferme France » semblant peu à peu s'effacer économiquement au profit de la centrale d'achat France. De la même façon que la loi « EGalim 1 » du 30 octobre 2018 a fixé un seuil de 50 % de produits « durables » dont 20 % de produits issus de l'agriculture biologique dans la nourriture servie en restauration collective, disposition entrée en vigueur le 1er janvier 2022, elle suggère l'imposition d'une contrainte similaire fondée sur la provenance locale des produits. Elle souhaite connaître sa position sur le sujet.

Texte de la réponse

La loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi « EGALIM », a introduit, dans son article 24, l'obligation d'atteindre au 1er janvier 2022 une part au moins égale, en valeur, à 50 % de produits durables et de qualité dans les repas servis dans les restaurants collectifs, les produits issus de l'agriculture biologique devant représenter une part au moins égale, en valeur, à 20 %. La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « Climat et résilience », a complété ces dispositions en ajoutant, à compter du 1er janvier 2024, l'objectif de 60 % de viandes et produits de la pêche de qualité et durables et en étendant ces objectifs à tous les restaurants collectifs dont des personnes morales de droit privé ont la charge. Cette loi a également introduit une nouvelle catégorie de produits durables et de qualité, comptabilisable au titre des 50 %, pour des « produits dont l'acquisition a été fondée, principalement, sur les performances en matière de protection de l'environnement et de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture, dans le respect des règles du code de la commande publique ». La mise en œuvre de cette nouvelle catégorie implique l'utilisation conjointe des deux critères, « performances environnementales » et « développement des approvisionnements directs », dans le cadre de marchés publics ou appels d'offre, critères qui peuvent permettre la sélection de produits locaux ou nationaux. Il est nécessaire de rappeler que les principes fondamentaux de la commande publique (liberté d'accès à la commande publique et d'égalité de traitement des candidats rappelés à l'article L. 3 du code de la commande publique) et les principes de non-discrimination et de liberté de circulation des personnes, des capitaux et des services énoncés dans les traités de l'Union européenne font obstacle à la prise en compte d'un critère géographique dans l'attribution des marchés publics. Néanmoins, la volonté du Gouvernement et des gestionnaires de restaurants collectifs rendant un service public, en particulier les collectivités territoriales, est bien d'assurer la souveraineté alimentaire et de favoriser les achats de produits locaux, dans des périmètres territoriaux en adéquation avec les filières de production, et dans un objectif de qualité des produits, de soutien de l'économie agricole des territoires, de réduction de l'impact environnemental des filières et de sécurisation des approvisionnements en produits vivriers. Pour cela, des guides pratiques pour les acheteurs ont été produits dans le cadre des travaux du conseil national de la restauration collective et diffusés sur la plateforme gouvernementale « ma cantine », à disposition de tous les acteurs de la restauration collective. Ces guides donnent des clés aux acheteurs pour construire des stratégies d'achats, conformes au code de la commande publique, qui permettent aux producteurs locaux ou nationaux (ou groupements de producteurs ou entreprises de production, transformation ou distribution) de candidater sur des marchés publics, avec une offre nationale, voire locale. Ces stratégies font appel notamment au « sourcing » des fournisseurs et aux techniques d'allotissement des marchés. Par ailleurs, l'article L. 230-5-1 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), modifié par la loi climat et résilience, indique que les gestionnaires de restaurants collectifs doivent développer « l'acquisition de produits dans le cadre des projets alimentaires territoriaux (PAT) définis à l'article L. 111-2-2 » du même code. Ces PAT, très majoritairement pilotés par des collectivités territoriales, sont des vecteurs opérationnels permettant le rapprochement des producteurs, transformateurs et distributeurs de denrées avec les consommateurs, et notamment les acheteurs de la restauration collective, sur un territoire. Ainsi, la mise en œuvre des techniques indiquées ci-avant, pour permettre la candidature et sélection de fournisseurs locaux et nationaux aux marchés publics, est facilitée dans le cadre d'un PAT. Actuellement, le territoire national compte plus de 400 PAT, dont les actions et l'émergence ont été fortement soutenues par le plan France Relance en 2021. Enfin, la loi climat et résilience renforce le suivi de la nature de certains approvisionnements. En effet, l'article L. 230-5-1 du CRPM impose l'élaboration d'un bilan statistique annuel par le Gouvernement à transmettre au Parlement au 1er janvier pour être rendu public. Ce bilan doit éclairer le Parlement notamment sur la « part de produits durables et de qualité […] issus d'un circuits court ou d'origine française ». Les restaurations collectives sont donc invitées à déclarer les données nécessaires à ce bilan, via des campagnes de télédéclaration sur la plateforme gouvernementale « ma cantine ». Des premiers éléments concernant ces approvisionnements « circuits courts » et « origine française » pourront ainsi être indiqués dans le bilan transmis en 2023 sur les données d'achats 2022. S'agissant des données précises des volumes importés sur un secteur particulier de la consommation comme la restauration collective, FranceAgriMer vient de lancer un appel d'offre pour obtenir des données pertinentes permettant de répondre précisément à la part des produits importés en restauration hors domicile et restauration collective. Cette étude prévoit la réalisation d'un focus spécifique sur la consommation en restauration hors foyer des viandes sur les années 2021 et 2022.