16ème législature

Question N° 1740
de M. Sébastien Peytavie (Écologiste - NUPES - Dordogne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Santé et prévention
Ministère attributaire > Santé et prévention

Rubrique > femmes

Titre > Instauration d’un arrêt menstruel

Question publiée au JO le : 03/04/2024
Réponse publiée au JO le : 03/04/2024 page : 2589

Texte de la question

Texte de la réponse

INSTAURATION D'UN ARRÊT MENSTRUEL


Mme la présidente . La parole est à M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie . Madame la ministre du travail, de la santé et des solidarités, la société est prête ; l’êtes-vous ? Alors que 7 millions de femmes et de personnes menstruées souffrent de règles douloureuses, que 2,5 millions de femmes sont atteintes d’endométriose et que 66 % des femmes salariées souhaiteraient bénéficier de l’arrêt menstruel, êtes-vous prête à agir pour que le monde du travail cesse enfin d’imposer aux salariées de souffrir en silence ?

Car avoir des règles incapacitantes au travail, c'est s'exposer à une double peine : celle de travailler dans la souffrance ou celle de s’arrêter en subissant le délai de carence que vous imposez dans pareil cas. À cause de cette double peine, les personnes concernées peuvent perdre jusqu’à 10 % de leur salaire chaque mois et 25 % des personnes atteintes d'endométriose sont forcées de renoncer à leur carrière. Ces jours de carence sont une véritable punition financière, encourue pour le simple fait d’être une femme et d’avoir des douleurs menstruelles, ces mêmes douleurs qu’ont pu expérimenter certains députés de votre majorité la semaine dernière. Le régime de l’affection de longue durée (ALD) n’est pas non plus une réponse à la hauteur, puisqu’il ne concerne que 0,005 % des personnes atteintes d'endométriose, lesquelles subissent jusqu’à dix ans d’errance médicale.

Les premières discriminations, ce sont celles subies par les femmes, parce que les règles sont encore un tabou dans le monde du travail et parce que le régime actuel est incapable de prendre en compte le caractère cyclique des menstruations ou les autres maladies gynécologiques telles que le fibrome ou le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK).

Alors êtes-vous prête à instaurer un arrêt menstruel sans jour de carence, ce qui serait un signe fort de votre engagement à faire enfin de la santé menstruelle un enjeu de santé publique et de solidarité nationale ? L’Espagne, mais aussi les villes de Lyon, de Strasbourg ou de Saint-Ouen, ainsi que les entreprises Carrefour, L'Oréal ou Louis Design ont franchi le pas. L'entrée récente du droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution a montré que nos institutions pouvaient évoluer avec leur temps. La société est prête, alors qu’attendez-vous ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES.)

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention . Je tiens d'abord à saluer votre combat et votre engagement sur ces questions (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES), dont nous aurons l'occasion de parler jeudi dans cet hémicycle. Vous l'avez rappelé, les dysménorrhées constituent un véritable enjeu de santé publique – rien que pour l'endométriose, une Française sur dix serait concernée, ce qui montre l'étendue du sujet – et entraînent les conséquences que nous connaissons : des douleurs mal prises en charge, voire pas du tout, des règles parfois invalidantes, une errance thérapeutique qui, dans le cas de l'endométriose, peut durer jusqu'à sept années. Ces pathologies sont une des premières causes d'infertilité pour les femmes et un grand motif de préoccupation.

L'enjeu consiste à de les détecter et à les prendre en charge plus tôt que nous ne le faisons actuellement, car des traitements pour amoindrir les douleurs existent. Grâce au déploiement de la stratégie nationale de lutte contre l'endométriose décidée par le Président de la République, qui s'est emparé du sujet depuis 2022, nous avons instauré un accompagnement et une prise en charge loués par les professionnels. J'ai réuni la semaine dernière le comité de pilotage de cette stratégie, dont les membres ont salué les mesures prévues dans ce cadre. Je me suis aussi rendu à l'hôpital Cochin, où j'ai pu constater que les professionnels de santé saluent eux aussi la mobilisation permise par cette stratégie.

Vous l'avez rappelé, cette question concerne également le droit du travail et le cadre applicable aux femmes concernées. Une femme qui souffre de dysménorrhées peut déjà se rendre chez son médecin et obtenir un arrêt de travail.

M. Sébastien Peytavie . Avec des jours de carence !

Mme Marie-Charlotte Garin . Ce qui signifie des pertes de salaire et de pouvoir d'achat !

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué . Néanmoins, de nombreuses entreprises se mobilisent et cette tendance doit s'accentuer : c'est aux entreprises d'organiser le recours au télétravail (M. Sébastien Peytavie fait un geste de dénégation), de mieux impliquer la médecine du travail et de faire en sorte que cette question soit prise en compte.

Mme Marie-Charlotte Garin . Et la solidarité nationale ?

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué . Je soutiendrai les mesures de votre proposition de loi qui vont dans ce sens. (Mme Sandrine Rousseau applaudit.)