Question au Gouvernement n°1760 : Instauration de groupes de niveaux

16ème Législature

Question de : Mme Virginie Lanlo (Ile-de-France - Renaissance), posée en séance, et publiée le 4 avril 2024


INSTAURATION DE GROUPES DE NIVEAUX

Mme la présidente . La parole est à Mme Virginie Lanlo.

Mme Virginie Lanlo . Les groupes de niveaux en français et en mathématiques, nous pourrions également les nommer groupes de besoin ou groupes de progrès. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

Mme Élisa Martin . Ah, ça sonne pas mal, les « groupes de progrès » ! (Sourires.)

Mme Mathilde Panot . Personne n'en veut !

Mme Virginie Lanlo . Dans le cadre de votre politique éducative – celle du choc des savoirs qui doit permettre de consolider les savoirs fondamentaux acquis dans le cadre de l'enseignement primaire –, leur création pourrait être plébiscitée si les modalités pratiques de leur instauration n'inquiétaient pas tant les chefs d'établissements. D'un territoire à l'autre, d'une ville à l'autre, d'un quartier à l'autre, le profil des enfants peut en effet varier en fonction de leur parcours scolaire : les élèves n'entrent pas tous au collège avec les mêmes acquis.

Les évaluations d'acquis, réalisées en classe de sixième, permettent aux professeurs d'identifier le niveau de leurs élèves et d'organiser leur progression vers le niveau à atteindre en fin d'année. Il nous semble donc que les groupes de niveaux peuvent répondre aux besoins des collégiens, les professeurs qui les évaluent étant les plus à même d'adapter leurs enseignements, en lien avec les professeurs des écoles qui suivaient leurs élèves en CM2.

M. Antoine Léaument . Mais personne ne veut de ces groupes !

M. Carlos Martens Bilongo . C'est n'importe quoi !

Mme Virginie Lanlo . Les cours en classe entière n'en sont pas moins à privilégier, car ils suscitent l'émulation dans le cadre de projets pédagogiques de classe. Persuadés de l'intérêt de la mesure, pourrions-nous toutefois laisser les chefs d'établissements l'appliquer, lors de cette première année, avec souplesse, et ainsi alterner cours en classe entière et cours en groupes de niveaux en fonction du profil des élèves ?

Mme la présidente . La parole est à M. le Premier ministre.

Mme Julie Laernoes . Il n'a jamais mis les pieds à l'école publique !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Je vous livrerai les témoignages de nombreux enseignants, recueillis sur le terrain, en tant que ministre de l'éducation nationale il y a quelques mois ou en tant que Premier ministre aujourd'hui.

Quand, au sein d'un même groupe classe, un professeur trouve des élèves qui ne savent pas lire et d'autres qui lisent parfaitement, il rencontre des difficultés à faire progresser tout le monde. C'est la réalité.

Mme Julie Laernoes . Ce n'est pas vrai !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . En réponse à cette situation, nous devons mettre le paquet sur l'école primaire, afin qu'il n'y ait plus ou qu'il y ait moins d'élèves entrant en classe de sixième sans maîtriser la lecture et l'écriture. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

Mme Julie Laernoes . Parlez-en avec les instituteurs !

M. Raphaël Schellenberger . Certains ministres lisent et écrivent très mal !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Nous percevons déjà les résultats de notre politique : les élèves qui étaient en classe de CP en 2017 ont de meilleurs résultats une fois parvenus en sixième, cinq ans plus tard, que ceux qui étaient inscrits en CP en 2012. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

Cependant, des écarts subsistent et les groupes de niveau doivent permettre de les résorber et de faire progresser tous les élèves.

Mme Julie Laernoes . Qu'en est-il du service public de l'éducation et qu'en est-il de l'égalité ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Que se passe-t-il aujourd'hui ? Dans les établissements scolaires, le tri se fait par l'échec, mais vous, les responsables politiques qui affirmez que les groupes de niveaux permettront de trier les élèves, vous ne vous en émouvez pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations prolongées sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.) Nous, nous voulons la réussite et la progression de tous les élèves, d'où la création de ces groupes.

M. Carlos Martens Bilongo . C'est faux !

Mme Mathilde Panot . Quelle honte, cette réforme !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Cette mesure est profondément sociale, puisqu'elle vise à donner davantage de moyens et à mieux accompagner les élèves les plus en difficultés, souvent ceux issus de milieux défavorisés.

M. André Chassaigne . Un problème que vous connaissez bien ! (Sourires.)

Mme Julie Laernoes . Vous mentez, monsieur le Premier ministre !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Lorsque j'étais ministre de l'éducation nationale,…

Mme Christine Arrighi . Mais vous ne l'êtes plus !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . …j'ai annoncé la création de 2 300 postes supplémentaires, pour faciliter l'organisation de groupes de niveaux.

Mme Julie Laernoes . Alors que vous en avez supprimé des milliers !

M. Benjamin Lucas-Lundy. Et vous les prenez où, ces 2 300 postes ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre . Les titulaires de ces postes accompagneront les élèves le plus en difficulté, notamment ceux des réseaux d'éducation prioritaire et un tiers d'entre eux travailleront dans les territoires d'outre-mer. Ceux que j'entends s'improviser défenseurs de ces mêmes territoires seraient donc bien inspirés de soutenir cette mesure, dont l'application permettra d'y ouvrir plus de postes d'enseignants.

Bien évidemment, les groupes de niveaux doivent être instaurés avec une certaine souplesse. La ministre de l'éducation nationale a justement annoncé qu'ils seraient organisés dès la rentrée 2024 dans les classes de sixième et de cinquième, mais que les cours de français et de mathématiques pourront être dispensés en classe entière pendant une à dix semaines, positionnées pendant une période de l'année laissée au choix des chefs d'établissements et des équipes pédagogiques.

Mme Julie Laernoes . Il faut de la désobéissance civile !

M. Gabriel Attal, Premier ministre . La création des groupes de niveau suivant nécessairement l'évaluation des élèves, les cours du mois de septembre seront certainement suivis en classe entière ; en cours d'année, l'évaluation de la progression des élèves, préalable à leur changement de groupe, pourra également être réalisée en classe entière ; le groupe classe pourra enfin être reconstitué à la fin de l'année. (Mme Julie Laernoes et M. Jean-René Cazeneuve s'apostrophent de banc à banc.)

La souplesse que vous appelez de vos vœux a donc été donnée aux équipes enseignantes, mais la bonne application du dispositif requiert un cadre national. (Mme Julie Laernoes s'exclame.)

Je le rappelle enfin à ceux qui représentent l'extrême gauche ici : il est inutile de hurler pour m'empêcher de parler. Épargnez votre voix pour la faire porter ailleurs – dans des manifestations ou je ne sais où –, car elle n'aura aucun effet sur mon expression. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Bertrand Pancher applaudit également. – Vives exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, GDR-NUPES et Écolo-NUPES. – M. André Chassaigne invite de la main les députés du groupe RE à se lever et à applaudir.)

Mme Julie Laernoes . Vous compromettez la vie de nos enfants !

M. François Cormier-Bouligeon . Idéologue !

Données clés

Auteur : Mme Virginie Lanlo (Ile-de-France - Renaissance)

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 avril 2024

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