16ème législature

Question N° 1769
de M. Marc Le Fur (Les Républicains - Côtes-d'Armor )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition énergétique
Ministère attributaire > Transition énergétique

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Marché de l'électricité et protection des consommateurs

Question publiée au JO le : 04/10/2022 page : 4400
Réponse publiée au JO le : 14/02/2023 page : 1529

Texte de la question

M. Marc Le Fur interroge Mme la ministre de la transition énergétique sur les pratiques des fournisseurs alternatifs d'électricité. Depuis l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité de nombreux opérateurs ont fait leur apparition. La plupart de ces fournisseurs alternatifs ne produisent pas ou peu d'électricité et se fournissent en grande partie via le mécanisme de l'ARENH qui leur permet d'acheter un volume d'électricité nucléaire bon marché à EDF. En parallèle, ils se fournissent sur le marché de gros. Or l'évolution à la hausse du prix sur le marché de gros, qui dépend du prix du gaz, conduit certains de ces fournisseurs alternatifs à se retirer du marché, à refuser de nouveaux clients voire même à inviter ceux dont les contrats arrivent à échéance à ne pas se réengager. Ces pratiques interrogent s'agissant de la protection des plus de 12 millions de consommateurs qui ont opté pour ces fournisseurs alternatifs. Il est fâcheux que des entreprises, qui pour certaines sont étrangères et ne produisent pas d'électricité en France, profitent de leur accès au nucléaire français bon marché au détriment des consommateurs. Il est intolérable que ces entreprises s'enrichissent en se permettant de valoriser l'électricité obtenue par l'ARENH au tarif du marché de gros. Cela est d'autant moins acceptable, qu'outre cet accès au nucléaire bon marché, certaines de ces entreprises bénéficient de financements publics conséquents pour mener à bien des projets parmi lesquels l'implantation d'éoliennes offshores. C'est pourquoi il lui demande ce qu'entend faire le Gouvernement afin de protéger le consommateur et le contribuable français face à ces éventuels abus.

Texte de la réponse

Dans le contexte actuel de hausse des prix inédite sur les marchés de gros de l'électricité, certains fournisseurs alternatifs font effectivement le choix de se retirer du marché, ou ne proposent plus d'offres. S'agissant de la protection des consommateurs, il est tout d'abord à noter que conformément à l'article L331-1 du code de l'énergie, chaque consommateur est libre de choisir son fournisseur d'électricité. En particulier, pour les consommateurs résidentiels, il est possible de changer de fournisseur à tout moment, quelle que soit la durée du contrat souscrit. Le site du Médiateur de l'énergie (www.energie-info.fr/) permet de connaître les fournisseurs d'électricité qui proposent un contrat de fourniture d'énergie dans un secteur géographique donné. Un moteur de recherche permet la consultation des offres des différents fournisseurs à partir du code postal et éventuellement du nom de la commune où se situe le point de livraison. S'agissant de l'ARENH (Accès régulé à l'électricité nucléaire historique) octroyé aux fournisseurs alternatifs, le dispositif est construit de manière à ce que les quantités d'ARENH servent à l'approvisionnement du portefeuille de consommateurs des fournisseurs qui en bénéficient : à cet effet, un complément de prix permet de capter a posteriori les bénéfices qu'un fournisseur aurait pu réaliser en revendant sur les marchés ses quantités d'ARENH excédentaires par rapport aux besoins de ses clients et de pénaliser les fournisseurs effectuant une demande excessive. De plus, le décret n° 2022-1380 du 29 octobre 2022 modifiant les modalités d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique vise à donner à la Commission de régulation de l'énergie (CRE), dans le cadre de son contrôle ex-ante sur le niveau de demande des fournisseurs, la capacité de le corriger s'il s'avère que celui-ci est manifestement excessif par rapport au portefeuille du fournisseur ou à ses possibilités de croissance de portefeuille. En effet, depuis 2019, la somme des volumes d'ARENH demandés dépasse le volume d'ARENH maximal pouvant être cédé par EDF, occasionnant un phénomène de rationnement des droits à l'ARENH des consommateurs français. Ce phénomène s'est accentué depuis, et est de nature à rendre le prix des offres de fourniture d'électricité de plus en plus dépendant des fluctuations du marché de gros de l'électricité. Dans ces conditions, le projet de décret a pour objectif de s'assurer que les volumes d'ARENH bénéficient au mieux aux consommateurs, et d'éviter au maximum que des volumes d'ARENH soient alloués à des fournisseurs dont la demande d'ARENH ne serait pas motivée par l'approvisionnement d'un portefeuille de consommateurs, mais par la perspective de revente sur les marchés de volumes achetés à prix règlementé bien inférieur. En outre, en cas d'abus avéré dans l'utilisation de l'ARENH, les fournisseurs indélicats s'exposent à des sanctions prononcées par le Comité de règlement des différends et des sanctions (CoRDiS), organe indépendant de la CRE, qui a le pouvoir de sanctionner notamment tout abus de droit d'ARENH ou d'entrave à l'exercice de ce droit. La Commission de régulation de l'énergie a récemment confirmé que certains fournisseurs faisaient l'objet d'investigations, en particulier s'agissant d'agissements susceptibles de constituer un abus d'ARENH (cf. communiqué de presse du 9 septembre 2022). Par ailleurs, il convient de noter que, si certains fournisseurs sont également titulaires de contrats de soutien public pour le développement d'ENR, ce soutien revêt un caractère symétrique : il se traduit par un versement de compensation par l'État lorsque le niveau du tarif contractuel est inférieur aux prix de marché, mais ce flux s'inverse en épisodes de prix de marchés plus élevés, comme c'est actuellement le cas, conduisant à un retour des opérateurs vers les finances publiques.